Terralaboris asbl

Détermination du CPAS compétent en cas de séjours dans des maisons d’accueil successifs

Commentaire de C. trav. Mons, 18 mai 2011, R.G. 2009/AM/21.718

Mis en ligne le vendredi 18 novembre 2011


Cour du travail du Mons, 18 mai 2011, R.G. n° 2009/AM/21.718

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 18 mai 2011, la cour du travail de Mons rappelle la règle applicable en ce qui concerne la détermination du CPAS secourant, dans l’hypothèse de séjours dans des établissements d’accueil successifs.

Les faits

Le parcours du demandeur, ayant donné lieu litige, est le suivant :

  • hébergement dans une maison d’accueil de la ville de Mons et domiciliation dans la même ville avec intervention du CPAS pour une période allant jusqu’au 1er février 2000 ;
  • brèves prestations en qualité d’intérimaire et ré-intervention du CPAS jusqu’au mois d’octobre mais hébergement pendant cette période à concurrence de trois mois dans un home dans une autre commune avec domiciliation dans celui-ci, ensuite à l’Armée du Salut à Bruxelles et retour à la maison d’accueil de Mons en septembre 2000 ;
  • situation de sans-abri pendant quelques jours suite à son exclusion de la maison d’accueil et admission à la Communauté Emmaà¼s de Marchienne-au Pont, avec cependant une nouvelle domiciliation à Mons à partir d’octobre 2000.

Suite à ces déménagements et changements de domicile, se pose la question de la détermination du CPAS compétent, le CPAS de Mons ayant refusé d’intervenir à partir du moment où l’intéressé fut exclu de la maison d’accueil. Le CPAS de Mons renvoie au CPAS de Charleroi, qui s’estime incompétent au motif que l’intéressé était domicilié à Mons et que ce domicile était devenu effectif, dans la mesure où il y avait interruption entre les séjours en maison d’accueil.

Décision du tribunal du travail

Le tribunal du travail a considéré que c’est le CPAS de Charleroi qui devait intervenir.

Position des parties en appel

Le CPAS de Charleroi (appelant) considère que c’est celui de Mons qui est compétent, sur la base de l’article 2, § 1er de la loi du 2 avril 1965 relatif à la prise en charge des secours accordés par les commissions d’assistance publique.

Décision de la cour du travail

La cour du travail, devant régler la règle de compétence à partir d’une situation régie par la loi du 7 août 1974 instituant le droit à un minimum de moyens d’existence, reprend son article 7, selon lequel le CPAS compétent est celui désigné par la législation sur l’assistance publique pour accorder une aide à cette personne. Il convient dès lors de se reporter à la loi du 2 avril 1965. Le principe de base de la compétence territoriale des CPAS figure à l’article 1, § 1er de la loi : c’est le centre secourant, c’est-à-dire celui de la commune sur le territoire de laquelle se trouve la personne qui a besoin d’assistance et dont le Centre a reconnu l’état d’indigence. La cour souligne qu’il s’agit d’une question de fait, puisqu’il faut rechercher la résidence habituelle, à l’exclusion de la résidence occasionnelle. La charge de la preuve incombe au demandeur. A cet égard, l’inscription dans les registres ne constitue qu’une présomption réfragable, le CPAS pouvant apporter la preuve d’une autre résidence.

La cour poursuit en citant l’énoncé de l’article 2, § 1er, qui contient une règle dérogatoire, étant – notamment – qu’est compétent le CPAS de la commune où l’intéressé est inscrit au moment de son admission dans un établissement (ou chez une personne privée) tel que désigné par la loi. Cette dérogation permet à la commune d’inscription de rester compétente dans certaines hypothèses limitativement énumérées. Pour la cour, qui rappelle ici la doctrine (M. DUMONT, « La compétence territoriale du CPAS » in Actualités de la sécurité sociale, C.U.P., Larcier, 2004, p.20), ces exceptions sont limitativement énumérées, afin d’éviter que des communes sur le territoire desquelles existent des structures d’accueil soient pénalisées. Il en découle que le centre ainsi désigné reste compétent pendant toute la durée du séjour même si la personne n’y est plus inscrite au moment où elle sollicite l’aide.

La cour aborde ensuite l’article 2, § 3 de la loi, qui vise l’hypothèse où une personne est admise successivement et sans interruption par plusieurs établissements (ou personnes – comme vu ci-dessus) ou lorsque pendant son séjour dans un des ces établissements (ou chez les personnes ci-dessus), elle doit subir un traitement dans un établissement de soins. Dans cette hypothèse, le même CPAS reste compétent.

La cour conclut qu’en cas d’interruption de séjour dans un de ces établissements, la règle de base joue, à savoir que le CPAS compétent est celui de l’établissement du lieu où l’intéressé réside et, en conséquence, lorsqu’il y a résidence dans une institution, le CPAS de la commune sur laquelle se trouve l’établissement en question. La cour précise encore que la Cour de cassation s’est prononcée sur la définition de « notion d’interruption », et ce dans un arrêt du 24 mai 2004 (Cass., 24 mai 2004, Pas. I. p. 891), où elle a retenu que le CPAS de la commune du lieu d’inscription demeure compétent lorsque la personne est admise successivement et sans interruption par plusieurs établissements, cette compétence cessant lorsque le séjour est interrompu. Dans cette hypothèse, la règle de compétence dérogatoire ne peut plus recevoir application et il y a lieu de revenir à la règle générale. La Cour de cassation a considéré que le juge du fond doit dans cette hypothèse déterminer le CPAS compétent en raison de la présence habituelle du demandeur sur le territoire d’une commune déterminée. En l’occurrence, la cour va retenir que le CPAS de Mons est intervenu au titre de centre du domicile de secours jusqu’au moment où l’intéressé a été exclu de la maison d’accueil.

Le centre territorialement compétent est dès lors celui de Charleroi. La cour confirme ici le jugement dont appel.

Intérêt de la décision

Cet arrêt donne un bon cas d’application des règles fixées à l’article 1er de la loi du 2 avril 1965 et rappelle la combinaison des règles d’intervention des CPAS (CPAS secourant – CPAS du domicile de secours) en cas de séjour dans un établissement et surtout en cas d’interruption de séjour, à la lumière de la jurisprudence de la Cour de cassation.


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