Terralaboris asbl

Employés de l’industrie chimique : conditions de paiement de la prime de fin d’année à un délégué commercial

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 21 septembre 2011, R.G. 2009/AB/52.308

Mis en ligne le lundi 5 décembre 2011


C. trav. Bruxelles, 21 septembre 2011, R.G. n° 2009/AB/52.308

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 21 septembre 2011, la Cour du travail de Bruxelles analyse les deux conventions collectives prises au sein de la CP 207 et en examine l’application à un délégué commercial.

Les faits

Une employée est engagée en qualité de « Product Specialist ». Il s’agit d’un contrat d’employé à durée indéterminée, par lequel l’intéressée se voit confier la responsabilité de développer et de gérer la clientèle d’hôpitaux, les bandagistes, grossistes, pharmaciens, médecins et patients du secteur. L’employeur relève de la commission paritaire pour employés de l’industrie chimique, étant la CP 207.

Environ deux ans après l’engagement, l’intéressée est licenciée moyennant un préavis de trois mois.
Par le biais de son organisation syndicale, elle demande paiement des primes de fin d’année en application d’une convention collective de secteur.

Vu l’absence de suite utile donnée à sa demande, elle introduit une procédure devant le Tribunal du travail de Nivelles, section Wavre.

Décision du tribunal du travail

En ce qui concerne les primes de fin d’année (un second poste – mineur – étant réglé), le tribunal relève que, à partir de la description de la fonction, ainsi que d’autres dispositions contractuelles (voiture de société, remboursement de frais de téléphone), l’employée présente toutes les particularités liées à la profession de représentant de commerce et qu’elle a, dès lors, droit aux primes de fin d’année. Celles-ci sont en effet réclamées sur la base des dispositions sectorielles applicables aux représentants.

Position des parties en appel

La société interjette appel, considérant que l’intéressée avait la qualité de déléguée médicale et ne tombait par conséquent pas dans le champ d’application des dispositions sectorielles, étant d’une part la convention collective du 10 juin 2003, limitée aux seuls représentants de commerce et d’autre part celle du 28 juin 2005, qui touche les employés dont les fonctions sont reprises dans une classification de fonctions spécifique au secteur. De cette classification, sont exclus les cadres, les représentants de commerce et les délégués médicaux. Aucun des deux textes ne permettrait dès lors le paiement de la prime de fin d’année réclamée.

Quant à l’employée, elle soutient à titre principal avoir eu la qualité de représentant de commerce au sens de l’article 4 de la loi du 3 juillet 1978, ce qui entraînerait l’application de la CCT du 10 juin 2003. A titre subsidiaire, elle se fonde sur la convention collective du 28 juin 2005, considérant rentrer dans les catégories d’employés dont les fonctions sont reprises dans la classification sectorielle.

Décision de la cour du travail

La cour réforme la décision du premier juge en ce qui concerne la qualité de représentant de commerce, cette fonction étant définie à l’article 4, alinéa 1er de la loi du 3 juillet 1978 comme impliquant que le représentant s’engage contre rémunération à prospecter et visiter une clientèle en vue de la négociation ou de la conclusion d’affaires (hormis les assurances) sous l’autorité, pour le compte et au nom d’un ou de plusieurs commettants. Tel n’est pas le cas en l’espèce, puisque la fonction de l’intéressée comporte des éléments de gestion et de développement de clientèle, impliquant certes la visite et la prospection mais nullement la négociation et la conclusion d’affaires avec celle-ci.

Il appartient, pour la cour, à l’employée de prouver qu’elle recevait des commandes ou concluait des ventes, ce qu’elle ne fait pas. Les autres éléments figurant dans le contrat sont impuissants à renverser cette constatation. La CCT du 10 juin 2003 ne peut dès lors trouver à s’appliquer.

Par contre, en ce qui concerne l’autre convention collective, celle-ci vise les employés dont les fonctions sont reprises dans la classification de fonctions fixée par la commission paritaire 207, texte qui renvoie à une ancienne CCT (17 janvier 1947) selon laquelle sont employés ceux dont les fonctions effectives sont reconnues à prédominance intellectuelle par la loi et/ou la jurisprudence. Or, tel est bien le cas en l’espèce, puisque le contrat est lui-même qualifié de contrat de travail d’employé.

La cour considère ne pas pouvoir suivre la société, qui prétend que seraient exclus de la notion d’employé au sens ci-dessus non seulement les représentants de commerce mais également les délégués commerciaux. En effet, rien de tel ne figure dans le texte et, en outre, la cour retient que la classification dans les diverses catégories est opérée selon que leurs fonctions répondent par analogie aux fonctions définies au titre d’exemple. Ainsi, même si les fonctions de représentant ou de délégué ne sont pas explicitement mentionnées, ceci ne signifie pas qu’elles sont exclues du champ d’application.

S’il y a lieu de recourir, par analogie, à l’examen de la fonction de l’employée, la cour considère qu’elle pourrait être classée en catégorie 3 et que, même si ceci devait être discuté (ce qui ne lui est pas soumis), il n’en demeure pas moins qu’elle a la qualité d’employé.

La cour réforme dès lors le jugement en ce qu’il a fondé le droit aux primes de fin d’année sur la convention collective relative aux représentants de commerce mais, pour d’autres motifs, confirme le droit pour la déléguée au bénéfice desdites primes.

Intérêt de la décision

Cette décision est rendue dans le cadre des règles relatives au secteur de l’industrie chimique (employés). L’arrêt rappelle utilement les sources de droit fondant le droit pour les employés à une prime de fin d’année et reprend la distinction à retenir entre les employés ayant la qualité de représentant de commerce au sens de l’article 4 de la loi du 3 juillet 1978 et les délégués médicaux n’ayant pas cette qualité.


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