Terralaboris asbl

A quoi correspond la consolidation des lésions ?

Commentaire de Trib. trav. Bruxelles, 7 février 2006, R.G. 7.688/99

Mis en ligne le jeudi 21 février 2008


Tribunal du travail de Bruxelles, 7 février 2006, R.G. n° 7688/99

TERRA LABORIS ASBL – Mireille JOURDAN

Dans le jugement annoté, le tribunal du travail a rappelé qu’il s’agit à la fois d’un fait médical et d’un fait juridique. La date de consolidation ne correspond pas nécessairement à la notion d’aptitude au sens de la réglementation en soins de santé et indemnités.

Les faits de la cause

Lors d’un mouvement au travail (effort de traction sur des dalles en béton), un ouvrier se fit une contusion de l’épaule droite. L’entreprise d’assurances refusa l’accident. L’intéressé resta en incapacité de travail et subit divers traitements et une intervention chirurgicale. Vu les très faibles résultats du dernier traitement (infiltrations), un avis médical fut demandé à un spécialiste sur l’évolution du cas. Celui-ci signala qu’il ne pouvait envisager de nouvel acte thérapeutique et que le dossier pouvait être clôturé. Il conseilla à l’intéressé de se rendre chez un rhumatologue.

Entre temps, celui-ci, toujours en incapacité de travail, était devenu invalide et était, ainsi, à charge de l’INAMI.

Le tribunal ayant désigné un expert, suite à la citation lancée par le travailleur, celui-ci déposa son rapport concluant à la consolidation à la date de la consultation du spécialiste.

Position des parties

Le travailleur ne contestait pas le rapport d’expertise sauf en ce que, ayant retenu la position du spécialiste fixant la date de consolidation au mois de juin 2001, il n’avait pas pris en compte la poursuite de l’incapacité de travail (invalidité) jusqu’un an plus tard. Il faisait valoir que sa situation était pendant cette période restée inchangée.

L’entreprise d’assurances sollicitait l’entérinement du rapport, au motif que les systèmes d’évaluation en maladie-invalidité et en accident du travail ne conduisent pas nécessairement à des conclusions identiques et contestait que les conclusions tirées en assurance maladie puissent être transposées en accident du travail.

La décision du tribunal

Le tribunal du travail rappelle que la consolidation est à la fois un fait médical et un fait juridique.
Au sens médical, c’est le moment où les lésions se fixent, soit qu’elles aient disparu, soit qu’il apparaît qu’aucun traitement médical ne peut être envisagé pour encore améliorer significativement celles-ci. Au sens juridique, c’est le jour où l’incapacité présente le caractère de permanence. A dater de celui-ci, les indemnités journalières sont remplacées par l’allocation annuelle.

La date de consolidation est, au sens de l’article 24 de la loi, le moment où les lésions n’évolueront plus et où aucun traitement médical n’est plus de nature à améliorer significativement la capacité résiduelle du travailleur sur le marché général du travail de telle sorte que l’incapacité permanente peut être déterminée et que l’indemnisation sur la base de celle-ci peut être arrêtée sous réserve des possibilités de révision et d’aggravation prévues par la loi.

Il en résulte, pour le tribunal, que la date de consolidation ne coà¯ncide pas nécessairement avec la date effective de reprise du travail, non plus qu’avec celle où le travailleur est reconnu apte à travailler au sens de la réglementation en soins de santé et indemnités.

Il poursuit que, la date retenue par l’expert était adéquatement motivée, notamment par la constatation que les efforts thérapeutiques entrepris n’étaient plus susceptibles de modifier sensiblement le tableau séquellaire. Il pouvait dès lors être constaté qu’à cette date l’état physique ce l’intéressé n’était plus susceptible d’une évolution sensible et qu’aucun traitement de nature à encore permettre une amélioration ne pouvait être envisagé. C’est la stabilisation de l’état séquellaire qui constitue la consolidation.

En ce qui concerne la compatibilité de cette conclusion avec le maintien en incapacité de travail (et invalidité) après cette date, le tribunal l’admet d’autant que plus aucune évolution des lésions imputable à l’accident n’a été constatée ultérieurement. Il précise encore que la consolidation des lésions n’exclut pas l’éventualité de traitements extérieurs dès lors que ceux-ci ne sont plus susceptibles d’influencer significativement la capacité concurrentielle du demandeur sur le marché général du travail. Tel est ici le cas pour les traitements chez le rhumatologue.

Intérêt de la décision

L’intérêt de la décision est de rappeler la définition de la consolidation des lésions, en cas de persistance de l’incapacité de travail de la victime, au sens de la législation en matière de soins de santé et indemnités. Si d’autres situations permettent de la définir plus facilement (ainsi la reprise du travail, notamment), il faut être circonspect dès lors que le travailleur reste incapable de travailler. Les causes de cette incapacité doivent être recherchées et, à les supposer indépendantes de l’accident du travail, les deux systèmes d’indemnisation suivront leurs règles propres.

Il n’empêche que l’attention doit être attirée sur le fait que, les causes de l’incapacité (invalidité) étant étrangères à l’accident, l’interdiction de cumul ne doit pas valoir.


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