Terralaboris asbl

Intervention de l’INAMI dans des frais de rééducation fonctionnelle à l’étranger : conditions

Commentaire de C. trav. Mons, 9 février 2012, R.G. 2009/AM/21.572

Mis en ligne le mardi 26 juin 2012


Cour du travail de Mons, 9 février 2012, R.G. n° 2009/AM/21.572

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 9 février 2012, la Cour du travail de Mons rappelle le mécanisme du règlement CEE n° 14108/71 et précise les conditions dans lesquelles des frais de rééducation fonctionnelle en Suisse peuvent être mis à charge de l’INAMI.

Les faits

Un organisme assureur adresse au Collège des médecins-directeurs du service des soins de santé de l’INAMI une demande d’intervention pour des frais de rééducation fonctionnelle en Suisse. Cette demande est accompagnée d’un avis défavorable du médecin-conseil.

La décision du Collège des médecins-directeurs est également défavorable en ce qui concerne la rééducation fonctionnelle elle-même, au motif qu’elle peut se faire en Belgique. L’organisme assureur notifie cette décision à son affiliée et celle-ci introduit un recours devant le tribunal du travail de Mons.

Décision du tribunal du travail

Par jugement du 28 décembre 2008, le tribunal ordonne une réouverture des débats afin d’être informé sur l’établissement suisse (affiliation au régime de sécurité sociale suisse, dispensation de soins thérapeutiques pris en charge par celui-ci). Par jugement du 26 mars 2009, il déboute l’intéressée de sa demande, au motif que l’établissement n’est pas assujetti au régime de sécurité sociale nationale.

Décision de la cour du travail

Saisie de l’appel de l’intéressée, la cour est amenée à rappeler les conditions mises par la législation pour le remboursement de frais de rééducation fonctionnelle.

L’article 34 de la loi coordonnée le 14 juillet 1994 prévoit que les soins nécessités par une rééducation fonctionnelle figurent parmi les prestations de santé remboursables. Il faut entendre par là une rééducation physique mais également les soins dispensés dans les centres de rééducation fonctionnelle pour toxicomanes. Le système a permis que soient conclues diverses conventions entre l’INAMI et des centres thérapeutiques non reconnus comme centres hospitaliers.

Les conditions d’intervention de l’INAMI sont fixées à l’arrêté royal du 3 juillet 1996, étant que l’autorisation du Collège des médecins-directeurs est requise. La cour rappelle le mécanisme d’introduction de la demande et reprend particulièrement la règle en cas de refus de prestations : il y a refus lorsque le bénéficiaire ne se trouve pas effectivement sur le territoire belge ou lorsque les prestations ont été fournies en dehors de celui-ci. Le Roi peut cependant fixer des conditions dans lesquelles elles peuvent être accordées et tel est le cas pour la rééducation fonctionnelle ou professionnelle effectuée à l’étranger.

Il faut cependant avoir égard aux normes internationales applicables et la cour rappelle que le règlement CEE n° 1408/71 a été rendu applicable à la Suisse, et ce par une loi du 30 janvier 2002. Il faut dès lors appliquer l’article 22 du règlement : le travailleur salarié (ou non) qui peut avoir droit aux prestations d’un Etat et est autorisé par l’institution compétente de celui-ci à se rendre sur le territoire d’un autre Etat pour y recevoir des soins appropriés a droit aux prestations en nature servies par l’institution du lieu de séjour (ou de résidence) et ce pour le compte de l’institution compétente, selon les dispositions de la législation applicable dans l’Etat de séjour, comme s’il y était affilié.

Le règlement prévoit expressément que l’autorisation requise ne peut être refusée si les prestations sont prévues par la législation de l’Etat de résidence et si les soins ne peuvent être dispensés dans un délai normalement nécessaire et ce eu égard à son état de santé et à l’évolution probable de la maladie (la cour rappelant que ces dispositions sont applicables par analogie aux membres de la famille).

Dès lors, le mécanisme applicable est le suivant : si le ressortissant d’un Etat membre se rend sur le territoire d’un autre Etat pour s’y faire soigner, il doit demander l’autorisation auprès de l’institution compétente (c’est-à-dire celle de l’Etat de résidence), qui peut la refuser et notamment lorsque les soins peuvent être utilement dispensés dans cet Etat dans des délais normaux. En outre, s’agissant de prestations en nature, le droit à celles-ci n’est ouvert que si l’institution du lieu de séjour (ou de résidence) prend elle-même ces frais en charge selon sa propre législation, comme si l’intéressé y était affilié. Ceci signifie qu’il y aurait prise en charge par la sécurité sociale belge du coût des soins dispensés dans l’établissement choisi, dans les mêmes conditions de prise en charge que la sécurité sociale suisse appliquerait.

La cour examine les éléments du dossier et constate qu’existent en Belgique des centres de rééducation fonctionnelle où l’intéressé aurait pu séjourner et qui aurait convenu au traitement. Par ailleurs, elle estime qu’il n’est pas établi à suffisance de droit que la Suisse prenne en charge les frais de séjour dans l’institution suisse choisie dans le cadre de sa sécurité sociale, de telle sorte que les conditions requises ne sont pas remplies.

La cour relève encore surabondamment qu’il n’y a pas eu demande d’autorisation préalable.

Intérêt de la décision

Cet arrêt aborde la question du remboursement de frais exposés au titre de rééducation fonctionnelle. Il rappelle que le règlement CEE 1408/71 a été étendu à la Suisse par une loi du 30 janvier 2002.

Il découle de ce règlement que si des frais sont exposés pour des prestations à l’étranger, ils ne peuvent être pris en charge par l’Etat de résidence que dans les conditions de l’Etat de séjour. La cour y insiste également sur le rôle du Collège des médecins-directeurs.


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