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Allocations familiales pour travailleurs salariés : conditions de maintien de la qualité d’allocataire au cas où l’enfant poursuit des études à l’étranger

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 23 février 2012, R.G. 2010/AB/841

Mis en ligne le vendredi 29 juin 2012


Cour du travail de Bruxelles, 23 février 2012, R.G. 2010/AB/841

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 23 février 2012, la Cour du travail de Bruxelles rappelle qu’une mère perd sa qualité d’allocataire lorsqu’elle n’élève pas effectivement l’enfant : si celui-ci rejoint son père, installé à l’étranger, les allocations familiales ne sont plus dues.

Les faits

Suite à la séparation d’un couple, la mère assume seule d’éducation et l’entretien de ses deux enfants. Elle perçoit les allocations familiales pour ceux-ci.

Dans le cadre de la procédure judiciaire de divorce, il est acté que l’ainée (majeure) vit avec son père aux Etats-Unis. Suite à diverses péripéties, liées au départ impromptu de l’enfant pour rejoindre son père, il y a radiation dans les registres de l’administration communale, tentative de réinscription à l’initiative de la mère à son domicile et, ultérieurement, radiation avec effet rétroactif à la date réelle de départ.

Entre-temps, la mère introduit auprès du SPF Sécurité sociale une demande de dérogation en faveur de l’enfant, au motif qu’elle est partie aux Etats-Unis pour poursuivre ses études et qu’elle bénéficie toujours de l’intervention financière de la mère. Des dérogations sont ainsi accordées pour plusieurs années.

Suite à un courrier adressé par l’enfant à l’ONAFTS, précisant qu’elle vivait de manière principale avec son père, le dossier d’allocations familiales est revu, le paiement des allocations est suspendu et une demande de récupération est notifiée.

Décision du tribunal du travail

Le Tribunal du travail de Nivelles confirme la décision de l’ONAFTS, au motif que l’enfant ne faisait plus partie du ménage de sa mère depuis le 1er mai 2006, vu qu’elle se trouvait chez son père à l’étranger.

Position de parties en appel

La mère fait valoir les démêlés qui l’ont opposée à son époux, pendant ces années, considère avoir fidèlement suivi les recommandations d’un inspecteur de la Caisse (dont elle dépendait avant l’ONAFTS) et fait valoir l’erreur invincible. Elle expose en effet avoir eu confirmation qu’en tant qu’étudiante poursuivant des études à l’étranger sa fille pouvait bénéficier des allocations familiales et qu’une procédure existait aux fins d’obtenir la dérogation à la condition de résidence, procédure que la mère enclencha.

En ce qui concerne l’ONAFTS, il considère qu’il est établi, preuves à l’appui, que l’intéressée résidait chez son père et poursuivait ses études dans un collège américain depuis la date concernée. Si la mère continuait à percevoir les allocations, pendant cette période, c’est parce qu’elle avait la qualité d’allocataire apparente et que, selon un extrait du registre national, l’enfant était toujours inscrit dans le ménage de sa mère. Ce n’est que eu égard aux éléments découverts lors de la revision du dossier qu’il fut constaté que la mère ne remplissait plus les conditions de l’article 69, §1er, alinéas 1 et 2 des lois coordonnées, étant qu’elle n’élevait pas effectivement l’enfant.

En outre, l’ONAFTS fait valoir des manœuvres frauduleuses dans le chef de la mère aux fins de conserver un avantage pécuniaire (déclarations fausses lors de l’enquête domiciliaire, eu égard notamment aux termes de l’ordonnance de référé qui avait été rendue, à propos des enfants du couple).

Décision de la cour du travail

La cour rappelle l’article 52 des lois coordonnées sur les allocations familiales, étant que celles-ci ne sont pas dues pour les enfants élevés ou suivant des cours en dehors du Royaume. Cette règle connaît cependant des possibilités de dérogation, que la mère actionna. Les dérogations ministérielles obtenues le furent sur la base des déclarations faites par celle-ci et la cour relève que ce n’est que suite à l’intervention de la fille que la situation exacte fut portée à la connaissance de l’ONAFTS. Pour la cour, la seule question est de savoir si la mère avait encore la qualité d’allocataire, c’est-à-dire qu’elle pouvait être la personne à qui les allocations devaient être payées, dès lors qu’elle n’élevait pas l’enfant. L’article 69 des lois coordonnées définit, en effet, les allocataires, étant qu’il s’agit prioritairement de la mère mais que, si celle-ci n’élève pas effectivement l’enfant, l’allocataire est la personne physique ou morale qui remplit ce rôle.

Cette condition n’étant pas remplie dans son chef, pour la cour, il est évident qu’il y a indu.

En ce qui concerne l’erreur invincible, la cour rappelle, comme l’avait fait le tribunal, que la preuve de celle-ci doit être apportée par l’intéressée. En conséquence, l’indu doit être remboursé dans sa totalité.

La cour constate, cependant, qu’il n’y a pas lieu d’examiner l’existence de manœuvres frauduleuses dans une telle situation.

Intérêt de la décision

Dans ce cas d’espèce, la Cour du travail de Bruxelles rappelle très utilement quelles sont les conditions pour avoir la qualité d’allocataire en matière d’allocations familiales et que des enfants suivant des études à l’étranger peuvent continuer à bénéficier des allocations, à la condition qu’une dérogation ait été accordée par le SPF Sécurité sociale et qu’elle coïncide avec la réalité.


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