Terralaboris asbl

Comment calculer la rémunération de base en vue de l’indemnisation d’un travailleur victime d’un accident du travail survenu pendant l’exécution de travail autorisé ?

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 20 février 2006, R.G. 46.363

Mis en ligne le vendredi 22 février 2008


Cour du Travail de Bruxelles, 20 février 2006, R.G. n° 46.363

TERRA LABORIS ASBL – Mireille Jourdan

Dans un arrêt du 20 février 2006, la cour du travail de Bruxelles a envisagé, pour un travailleur en incapacité de travail et affecté à un travail autorisé, la problématique de l’application de l’article 37 de la loi sur les accidents du travail ou des articles 34 à 36 et, particulièrement, le régime résiduaire de l’article 36 § 1er.

Les faits

Une vendeuse dans un commerce de détail indépendant fut victime d’un accident du travail en octobre 2002. Depuis 6 ans, elle était en incapacité de travail et avait été reconnue en invalidité par sa mutuelle, et ce, jusqu’à la date de son 65e anniversaire, en 2010.

Elle avait toutefois repris un travail préalablement autorisé, conformément à l’article 100, § 2 de la loi coordonnée du 14 juillet 1994 sur l’assurance soins de santé et indemnités.

La position du tribunal

Par jugement du 5 janvier 2005, le tribunal du travail de Nivelles avait considéré que la rémunération de base doit être calculée conformément aux articles 34 à 36 de la loi. L’article 34 dispose, en effet, que la rémunération de base est celle à laquelle le travailleur a droit pour l’année qui a précédé l’accident, en raison de la fonction exercée dans l’entreprise au moment de celui-ci. L’article 36 vise diverses hypothèses où la période de référence est incomplète (ou situation assimilée), occupation de moins d’un an, etc.

La position des parties en appel

L’entreprise d’assurances entendait faire fixer la rémunération sur la base de l’article 37 de la loi, qui vise le travail autorisé des pensionnés.

La position de la cour

La cour du travail rappelle, d’abord, que l’article 37 est une exception aux articles 34, 35 et 36 de la loi et que, selon la Cour de cassation, il est de stricte interprétation. Il ne peut dès lors être appliqué par analogie.

Il ressort des travaux préparatoires de la loi (loi programme du 22 décembre 1989) qu’il vise les bénéficiaires d’une pension de retraite ou de survie. L’article 37 ne peut donc s’appliquer qu’aux travailleurs dont le travail est autorisé dans les limites du travail autorisé des pensionnés.

La référence légale est ici la limite des revenus.

L’article 37 ne s’applique dès lors pas aux travailleurs en incapacité de travail, qui effectuent un travail autorisé. Dans cette hypothèse, c’est le médecin conseil de la mutualité qui autorise le travail, qui précise sa nature, son volume et ses conditions d’exercice. Il y a d’ailleurs des conditions légales sur le plan médical, étant que l’intéressé doit avoir conservé une réduction de sa capacité de gain d’au moins 50% et que le travail doit être compatible avec l’affection en cause. Dans ce cas, les limites légales sont relatives à l’état de santé de l’assuré social et sont totalement étrangères à celles du travail autorisé des pensionnés.

Par rapport à la situation de l’ouvrier mineur, la cour précise encore que si la pension d’invalidité de ce dernier suppose qu’il soit dans l’incapacité de travailler dans la mine, cette incapacité doit exister exclusivement au regard de ce travail, une personne capable de travailler sur le marché général du travail n’étant pas concernée. En outre, d’autres conditions spécifiques sont prévues dans le cas de l’ouvrier mineur, de telle sorte que leur situation n’est pas comparable. La cour relève notamment que la situation familiale de l’ouvrier mineur entraînera les mêmes conséquences qu’en matière de pension sur le plan du partage et du taux de la pension en cas de séparation.

Le régime de l’incapacité de travail et de l’invalidité au sens de la loi du 14 juillet 1994 n’est nullement un régime de fin de carrière, et ce même si l’invalidité est reconnue jusqu’à l’âge de la pension, comme en l’espèce. Cette situation n’est en effet nullement irréversible et la santé peut être recouvrée, ce qui mettrait fin à l’invalidité.

En conclusion, la capacité normale de travail de l’assuré social qui accomplit un travail autorisé dans le cours d’une incapacité de travail s’apprécie en fonction d’une rémunération qui doit être complétée conformément à l’article 36, § 1er de la loi, d’une rémunération hypothétique pour les journées en dehors des temps de repos pour lesquelles il n’a pas perçu de rémunération.

Intérêt de la décision

La question examinée par la cour du travail ne se pose pas fréquemment et il est bon de rappeler les règles en la matière, étant d’une part que le champ d’application de l’article 37 est limité aux pensionnés et que lorsque l’on a à faire à une situation qui n’est pas visée par une autre disposition spécifique, par exemple l’article 37bis qui vise le travail à temps partiel, l’article 38 qui concerne l’apprenti ou le mineur d’âge, c’est l’article 36, § 1er qu’il faut appliquer, s’agissant d’une règle à caractère résiduaire.


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