Terralaboris asbl

Licenciement avec effet immédiat : quid en cas de prestations après la date de congé ?

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 26 juin 2012, R.G. 2006/AB/48.447

Mis en ligne le jeudi 28 février 2013


Cour du travail de Bruxelles, 26 juin 2012, R.G. n° 2006/AB/48.447

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 26 juin 2012, la Cour du travail de Bruxelles rappelle la jurisprudence de la Cour de cassation, selon laquelle, pour une même période, l’on ne peut obtenir une rémunération et une indemnité compensatoire de préavis. A défaut de preuve de la renonciation au congé ou de la conclusion d’un nouveau contrat de travail, des prestations effectuées après la date d’effet du congé ne peuvent être rémunérées si elles sont couvertes par l’indemnité compensatoire de préavis.

Les faits

Une employée entre au service d’une A.S.B.L. en 2000. Elle va exercer des fonctions de coordinatrice générale. Plus de deux ans plus tard, en 2003, une lettre lui est remise par le responsable de l’A.S.B.L., de la main à la main, contenant une décision de rupture du contrat de travail à la fin du mois en cours, avec paiement d’une indemnité compensatoire de préavis de trois mois. A l’issue de la période couverte par l’indemnité, l’intéressée réclame, en sus, la rémunération du premier de ces trois mois, au motif qu’elle a effectué des prestations pendant celui-ci.

Vu le refus de l’A.S.B.L., elle introduit une procédure devant le tribunal du travail, qui la déboute (sauf sur un autre chef de demande, étant la prime de fin d’année).

Appel est dès lors interjeté par l’intéressée, qui formule, devant la cour du travail, la même demande relative à la rémunération du premier mois couvert par l’indemnité compensatoire de préavis (et payée comme telle).

La décision de la cour

La cour constate que la lettre de licenciement fixait la fin des relations de travail à une date déterminée avec annonce du paiement d’une indemnité compensatoire. Le mode de rupture n’est donc pas celui visé à l’article 37, § 1er de la loi du 3 juillet 1978 et ne doit dès lors pas respecter les règles de notification qui y sont prévues, aucun délai de préavis n’étant notifié.

Dans la mesure où l’intéressée considère avoir effectué des prestations de travail après la fin annoncée du contrat, la cour précise que, pour que son argumentation soit suivie, il conviendrait que soit démontrée l’existence d’un accord entre les parties aux fins de postposer la date d’effet du licenciement à la fin du mois en cause ou que soit établi qu’un nouveau contrat avait été conclu (le cas échéant, pour un mois). La preuve de ce report ou encore celle de la conclusion d’un nouveau contrat (pouvant être verbal) incombe à l’employée, comme le précise la cour du travail.

Si l’A.S.B.L. ne conteste pas que l’intéressée s’est présentée à diverses reprises pendant le mois en cause aux fins de clôturer des projets qu’elle avait suivis, ainsi que de préparer des rapports financiers, elle conteste qu’il y ait eu un nouveau contrat de travail ou renonciation aux effets du licenciement sans préavis.

La cour va dès lors constater la réalité de certaines prestations durant le mois en cause (même si l’importance de celles-ci est discutée par les parties). Elle constate cependant qu’aucune preuve n’est apportée de l’existence d’un nouveau contrat ou d’un accord des parties aux fins de postposer la date d’effet du licenciement. Elle relève en outre que les prestations effectuées par l’intéressée n’ont pas été exécutées à la demande de l’A.S.B.L., celle-ci ayant certes accepté que l’intéressée finalise certains projets, mais sans plus. Elle rappelle ici, sur le plan des principes, que l’indemnité compensatoire de préavis ne peut pas être cumulée avec une rémunération. La cour renvoie à l’arrêt de la Cour de cassation du 3 décembre 1979 (Cass., 3 décembre 1979, Pas., 1980, I, p. 409).

En conséquence, le droit à une rémunération, qui trouverait son fondement dans la prolongation du contrat ou dans la conclusion d’un nouveau, n’est pas établi par l’employée. Celle-ci réclamant en outre des chèques-repas, un défraiement ainsi qu’un complément de pécule de départ, la cour la déboute de l’ensemble de ces chefs de demande. Elle fait de même pour le prorata de la prime de fin d’année pour les prestations en discussion.

Il faut cependant relever qu’elle va allouer un mois d’indemnité compensatoire de préavis en sus, vu les éléments de l’espèce (âge : 38 ans ; ancienneté : 2 ans et 9 mois ; fonction exercée : coordinatrice générale).

Intérêt de la décision

L’hypothèse d’une poursuite des prestations de travail après la fin prévue d’un contrat n’est pas rare. Se pose, dans ce cas, la question de préciser la volonté des parties quant à ces prestations : renonciation au congé avec poursuite du contrat ? Conclusion d’un nouveau contrat de travail ?

Comme le précise la cour, c’est à la partie qui invoque les prestations en cause d’établir dans quel cadre elles sont intervenues. A défaut d’un accord sur la renonciation au congé ou sur la conclusion d’un nouveau contrat, la cour conclut à l’effectivité du congé donné et à l’interdiction de cumul entre l’indemnité compensatoire de préavis et une rémunération couvrant d’éventuelles prestations.


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