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Séjour à l’étranger et octroi de la GRAPA : rappel des conditions

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 17 octobre 2012, R.G. 2011/AB/209

Mis en ligne le jeudi 14 mars 2013


Cour du travail de Bruxelles, 17 octobre 2012, R.G. n° 2011/AB/209

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 17 octobre 2012, la Cour du travail de Bruxelles rappelle les règles strictes en matière d’octroi de la GRAPA, au cas où le bénéficiaire se trouve à l’étranger. Elle souligne en outre que, si la condition de résidence n’est plus remplie en cours de mois, la récupération du montant payé jusqu’à la date du départ annoncée est autorisée.

Les faits

Un bénéficiaire de pensions de retraite (régime des travailleurs salariés et indépendants) perçoit en sus une garantie de revenus aux personnes âgées. Les pensions perçues dans les régimes contributifs sont peu élevés.

En avril 2008, il informe l’O.N.P. de son souhait de s’établir en France, et ce pour une durée indéterminée. Il invoque des raisons médicales. Il est radié des registres de la population à dater de septembre 2008, ce dont la Banque-Carrefour de la sécurité sociale informe l’O.N.P.

Tout en maintenant une adresse de référence en Belgique, l’intéressé quitte effectivement le territoire à la mi-octobre, ce qu’il confirmera encore à l’O.N.P. Le paiement de la GRAPA est en conséquence suspendu.

L’intéressé va prendre contact avec le Comité de Gestion de l’O.N.P. aux fins de faire admettre que, même s’il est à l’étranger pour une durée indéterminée, ce séjour est justifié par des circonstances exceptionnelles.

Il fait valoir des motifs liés à son état de santé et également des motifs professionnels.

Pour les premiers, il se réfère à des documents médicaux transmis au SPF Sécurité sociale (étant une hospitalisation en Belgique pendant plus d’un mois en septembre-octobre 2008 – soit juste avant son départ). Pour ce qui est des motifs professionnels, il invoque qu’il s’est inscrit au Tableau du Conseil départemental de l’Ordre des Médecins du lieu de résidence, ses activités étant cependant limitées à des actes médicaux de nature entièrement bénévole.

Le Comité de Gestion rejette sa demande.

L’intéressé introduit dès lors un recours devant le tribunal du travail contre la décision de suspension de la GRAPA – et contre une autre, lui notifiant un indu de l’ordre de 400 € pour octobre.

Un jugement par défaut est rendu, dont les termes sont cependant confirmés suite à une opposition formée par l’intéressé. Celui-ci introduit ensuite un recours devant la cour du travail, demandant que des circonstances exceptionnelles soient retenues.

La décision de la cour

La cour du travail est ici appelée à examiner la question des circonstances exceptionnelles justifiant le versement de la GRAPA, malgré l’absence de résidence principale en Belgique. Or, cette condition est requise par la loi du 22 mars 2001 (article 4) et la notion de résidence principale est définie dans un arrêté royal du 23 mai 2001 (article 42 : il faut avoir sur le territoire belge sa résidence réelle, c’est-à-dire sa résidence principale où l’on séjourne en permanence et effectivement).

Des situations sont assimilées au séjour permanent et effectif en Belgique, étant (i) le séjour à l’étranger pendant moins de 30 jours consécutifs ou non sur un an, (ii) le séjour à l’étranger pendant 30 jours ou plus consécutifs ou non sur un an suite à l’admission occasionnelle et temporaire dans un hôpital ou un établissement de soins et (iii) ce même séjour, pour autant qu’il soit justifié par des circonstances exceptionnelles et que le Comité de Gestion de l’O.N.P. ait donné son autorisation.

La cour précise encore que, selon la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass., 22 février 2010, S.09.0033.F), la période de 29 jours maximum (étant la première hypothèse ci-dessus) pendant laquelle le bénéficiaire de la GRAPA peut séjourner à l’étranger, peut être prolongée en cas de survenance en cours de séjour non seulement d’une hospitalisation temporaire, mais également d’un événement de force majeure. Il s’agit de la notion de force majeure au sens général, étant un événement indépendant de la volonté humaine et que l’homme prudent n’a pu prévoir ou prévenir.

Cette exigence ne figure pas dans les autres hypothèses, la troisième situation visée par le texte réglementaire ne demandant que l’existence de conditions exceptionnelles.

La cour constate cependant que celles-ci doivent exister avant le départ, puisqu’une autorisation de l’O.N.P. est en principe requise et que l’on ne peut entendre par là tout événement généralement quelconque : elles doivent être de nature à permettre d’assimiler le séjour à l’étranger à un séjour permanent et effectif en Belgique.

La cour va dès lors examiner les éléments qui lui sont soumis et constater que, s’il y a eu une hospitalisation, celle-ci a eu lieu en Belgique et qu’elle ne permet pas de conclure à la nécessité de suivre un traitement en France, traitement qui n’eut pas pu être assuré sur le territoire belge.

Quant aux conditions professionnelles, la même conclusion est rapidement acquise.

La cour considère dès lors qu’il s’agit en réalité de motifs de convenance personnelle.

Enfin, en ce qui concerne le remboursement d’indu, la cour le considère fondé, puisque la réglementation exige, pour le paiement de la GRAPA, que l’intéressé ait sa résidence principale en Belgique pendant tout le mois. Dès lors qu’un séjour de plus de 30 jours ne peut être assimilé à celui-ci, il est prévu de suspendre le paiement de la GRAPA pour chaque mois calendrier au cours duquel la condition de séjour ininterrompu n’est pas remplie.

En conséquence, le départ à la mi-octobre implique la récupération du montant versé pour ce mois.

Intérêt de la décision

Dans cet arrêt, tout en ne niant nullement les difficultés personnelles de l’intéressé, la cour a dû faire une application stricte des conditions légales et réglementaires. Elle rappelle que les circonstances exceptionnelles requises n’impliquent pas une force majeure et elle souligne qu’en principe, celles-ci doivent exister avant le départ, dans la mesure où il faut une autorisation de l’O.N.P.

Enfin la GRAPA étant allouée pour un mois calendrier, la cour relève également qu’une demande de remboursement est justifiée pour le mois en cause, dès lors que les conditions à son octroi (départ à l’étranger) ne seraient plus réunies en cours de celui-ci.


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