Terralaboris asbl

Indu d’indemnités d’incapacité de travail après l’âge normal de la pension de retraite

Commentaire de C. trav. Liège, sect. Namur, 6 décembre 2012, R.G. 2012/AN/39

Mis en ligne le lundi 18 mars 2013


Cour du travail de Liège, section de Namur, 6 décembre 2012, R.G. n° 2012/AN/39

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 6 décembre 2012, la Cour du travail de Liège (section de Namur) rappelle les conditions dans lesquelles une décision rectifiant une erreur dans le chef d’un organisme de paiement peut rétroagir, et ce à propos d’indemnités d’incapacité de travail payées indûment à une travailleuse continuant son activité professionnelle après l’âge normal de la pension légale.

Les faits

Une employée introduit une déclaration d’incapacité de travail auprès de son organisme assureur en octobre 2009. Elle a, à ce moment, 65 ans et 1 mois. Elle est reconnue incapable de travailler et bénéficie des indemnités de mutuelle, après la période couverte par le salaire garanti, à charge de son employeur. Le 1er novembre, l’organisme assureur arrête les paiements et l’intéressée en demande la raison. Il lui est alors signalé que, vu un problème informatique, il n’est pas possible de calculer exactement les indemnités auxquelles elle aurait droit et un à-valoir de 1.400 € lui est avancé.

Fin décembre, l’organisme assureur constate que l’intéressée avait atteint l’âge de 65 ans en septembre 2009 et que, en vertu de l’article 108 de la loi coordonnée le 14 juin 1994, elle ne peut percevoir les indemnités d’incapacité.

Le remboursement de l’avance de 1.400 € lui est demandé, étant un indu.

Vu le refus, une procédure s’engage devant le Tribunal du travail de Namur, qui va condamner au remboursement.

La décision de la cour du travail

Suite à l’appel interjeté par l’employée, la cour rappelle les normes applicables.

L’article 164, alinéa 1er de la loi coordonnée le 14 juillet 1994 impose le remboursement à la mutuelle de l’indu (en soins de santé, indemnités ou maternité) en cas d’erreur ou de fraude.

Les dispositions de la Charte viennent tempérer les conditions de remboursement, en ses articles 17 et 18, relatifs à la revision. En cas d’erreur de droit ou matérielle, l’institution de sécurité sociale doit d’initiative prendre une nouvelle décision et celle-ci produit ses effets à la date à laquelle la décision rectifiée aurait dû prendre effet. Si l’erreur est due à l’Institution de sécurité sociale, la prise d’effet est située au premier jour du mois qui suit la notification, si le droit à la prestation est inférieur à celui qui avait été reconnu initialement. Constitue un cas particulier l’hypothèse où l’assuré social savait ou devait savoir qu’il n’avait pas ou qu’il n’avait plus droit à l’intégralité de la prestation. Le critère de référence est ici l’arrêté-royal du 31 mai 1933 concernant les déclarations à faire en matière de subventions, indemnités et allocations.

A partir de ces principes, la cour va d’abord examiner les termes de l’arrêté royal du 31 mai 1933. Celui-ci dispose que toute déclaration doit être sincère et complète et que la personne qui savait ou devait savoir n’avoir plus droit à une prestation sociale est tenue d’en faire la déclaration. Des sanctions pénales sont prévues en cas d’absence de celle-ci.

Par ailleurs, l’article 108 de la loi coordonnée le 14 juillet 1994 prévoit le refus des prestations (indemnités) à partir du premier jour du mois qui suit celui où l’assuré social atteint l’âge normal de la pension légale. S’il a continué à travailler après cet âge, les indemnités sont refusées à partir du premier jour du deuxième mois qui suit celui au cours duquel l’incapacité de travail a débuté.

En l’occurrence, l’intéressée a continué à travailler après ses 65 ans et, lors de l’interruption du paiement, l’organisme assureur a signalé ne pas pouvoir être en mesure de lui donner des explications quant à sa situation exacte, vu le problème informatique ci-dessus. La cour relève cependant que, vu la date de naissance de l’intéressée, la mutuelle était pleinement en mesure de savoir que l’âge de la pension était atteint et il n’y avait pas lieu de verser un à-valoir de 1.400 €, décision que la cour qualifie de « prise mal à propos ».

En conséquence, s’agissant d’une erreur de l’Institution de sécurité sociale, celle-ci ne peut rétroagir, l’organisme assureur ne pouvant prétendre que l’intéressée aurait dû connaître la teneur de l’article 108 de la loi coordonnée. La cour souligne qu’elle ne percevait aucun montant au titre de pension lorsque, après la période couverte par le salaire garanti, elle a bénéficié des indemnités d’incapacité. Il n’était dans son chef pas question de cumul avec d’autres prestations de sécurité sociale et la cour conclut qu’elle a agi avec sincérité. Elle ne devait pas ou n’aurait pas dû savoir, au sens de l’article 17 de la Charte, qu’elle ne pouvait plus percevoir les indemnités d’incapacité.

La cour réforme dès lors le jugement.

Intérêt de la décision

Dans ce cas d’espèce un peu particulier, dans lequel l’incapacité de travail intervient quasi-concomitamment à l’âge normal de la pension légale et où il y a poursuite de l’activité salariée, la Cour du travail de Liège fait une très juste application de la Charte, concluant à la sincérité de l’assuré social eu égard à la situation de fait.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be