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Congé parental et protection contre le licenciement : petit rappel des règles

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 20 novembre 2012, R.G. 2011/AB/583

Mis en ligne le mardi 23 avril 2013


Cour du travail de Bruxelles, 20 novembre 2012, R.G. n° 2011/AB/583

TERRA LABORIS ASBL

Dans un arrêt du 20 novembre 2012, la Cour du travail de Bruxelles conclut qu’est un motif suffisant autorisant le licenciement d’une travailleuse (bénéficiant de la protection liée à un congé parental) fondé sur un niveau insuffisant de compétences ainsi que sur des réticences à s’adapter à l’évolution de sa fonction.

Les faits

Une secrétaire est occupée au sein d’une institution professionnelle depuis 2004. Celle-ci fusionne en 2008 et reprend du personnel néerlandophone.

L’année suivante, l’intéressée tombe enceinte et après son congé de maternité elle bénéficie d’un congé parental de trois mois, à partir du 4 mai 2009.

Pendant celui-ci, un courrier lui est adressé, lui signalant que vu le bilinguisme indispensable depuis la fusion, il lui est demandé, ainsi que le fait sa collègue, de s’adapter aux nouvelles exigences, lors de sa reprise du travail. Elle est également invitée, à cette occasion, à être plus « positive » qu’auparavant.

Celle-ci répond que, à sa reprise elle compte exécuter les tâches pour lesquelles elle était engagée et qu’elle continuerait à « bien faire son travail » comme auparavant.

La réponse de l’employeur, assez longue, est de lui rappeler l’évolution du travail dans les mois précédents, ainsi que sa méconnaissance quasi-totale du néerlandais, le directeur signalant que ceci constituait un handicap permanent, accentué vu la situation nouvelle.

Lors de la reprise du travail, elle fait l’objet d’un licenciement immédiat, licenciement motivé par les mêmes explications : évolution du cadre professionnel, ainsi que des tâches à effectuer et des compétences requises. Il est considéré que ses compétences n’ont pas le niveau suffisant pour permettre une évolution favorable dans l’environnement nouveau. Est également pointé le fait qu’il lui a été demandé de s’adapter progressivement à l’évolution et d’acquérir, notamment, une connaissance suffisante du néerlandais pour travailler dans un environnement bilingue.

L’intéressée introduit un recours devant le tribunal du travail demandant un complément d’indemnité compensatoire de préavis, quatre mois ayant été versés, ainsi qu’une indemnité de protection.

Décision du tribunal

Par jugement du 12 avril 2011, l’employeur est condamné à payer l’indemnité de protection.

Il interjette appel.

Décision de la Cour

La cour statue sur les deux chefs de demande qui lui sont présentés, étant celui relatif au complément d’indemnité compensatoire de préavis (fixant à cet égard la durée du préavis raisonnable à six mois au lieu de quatre) et sur la demande d’indemnité de protection. Cette question est davantage développée dans l’arrêt, qui d’abord rappelle les principes. Il est interdit, en vertu de l’article 101 de la loi de redressement du 22 janvier 1985 contenant des dispositions sociales, de faire un acte tendant à mettre fin unilatéralement à la relation de travail d’un travailleur bénéficiant d’un congé parental sauf en cas de motif grave ou de motif suffisant.

Pour la cour, est suffisant le motif dont la nature et l’origine sont étrangères au congé parental. Rappelant en outre les règles en matière de charge de la preuve, la cour pointe, comme motif la connaissance insuffisante du néerlandais pour travailler dans un environnement bilingue ainsi qu’un manque de volonté d’évolution dans le travail malgré les changements intervenus.

Sur le premier de ceux-ci, la cour se réfère à des évaluations de fonction ainsi qu’à l’existence d’une brève formation suivie pour une mise à nouveau en langue néerlandaise. Elle relève cependant que les exigences de l’employeur sur cette question se sont accentuées au cours de contrat et qu’il s’agit d’une exigence légitime sans rapport avec le congé parental. Elle considère, examinant les éléments soumis quant à l’étendue de la connaissance, que si l’employeur n’a pas licencié immédiatement, ceci ne peut lui être reproché, l’intéressée ayant en réalité eu l’occasion de se mettre à niveau.

En outre, la cour retient d’autres éléments, liés également à l’évolution de l’entreprise, étant les changements intervenus au sein de l’organisation, une publication purement francophone à laquelle l’intéressée travaillait ayant été externalisée.

Mettant encore en parallèle la réalité de l’évolution de l’entreprise et la position de l’intéressée, qui avait précisé qu’elle continuerait à exécuter les tâches pour lesquelles elle avait été engagée, la cour admet qu’il y a là un motif qui a pu justifier la décision de licenciement et ce sans aucun rapport avec le congé parental.

Intérêt de la décision

Ce cas d’espèce aborde l’examen d’un « motif suffisant » justifiant le licenciement d’un travailleur bénéficiant d’un congé parental dans le cadre de la loi du 22 janvier 1985 contenant des dispositions sociales. Le motif retenu en l’espèce est double, même si ses deux composantes sont liées. Il y a d’une part des nécessités de fonctionnement de l’entreprise dûment avérées du fait de l’exigence d’un affinement légitime des connaissances de l’employée, ainsi que la disparition d’une partie importante des fonctions auxquelles elle était précédemment affectée. La cour a égard de relever que l’employeur a, dès la survenance de ce nouveau contexte de travail, eu à cœur de permettre à la travailleuse de suivre des formations aux fins de parfaire ses compétences (formations rémunérées par l’employeur). Ces formations sont une exécution en l’espèce de l’article 1134 du Code civil, impliquant la collaboration de bonne foi des parties à la convention.


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