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Suspension des intérêts judiciaires : exigence d’une justification

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 8 février 2013, R.G. 2010/AB/250

Mis en ligne le vendredi 7 juin 2013


Cour du travail de Bruxelles, 8 février 2013, R.G. n° 2010/AB/250

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 8 février 2013, la Cour du travail de Bruxelles rappelle les conditions dans lesquelles le cours des intérêts judiciaires peut être suspendu, renvoyant à la jurisprudence habituelle en matière de cotisations et autres sommes dues aux régimes de sécurité sociale.

Les faits

Une travailleuse indépendante est citée devant le Tribunal du travail en paiement de cotisations en juin 2004. Il s’agit de sommes relatives à la période 1991-2003. La société pour laquelle l’activité commerciale est exercée est également citée en tant que débiteur solidaire.

Le Tribunal du travail de Bruxelles statue en février 2010, condamnant l’intéressée à des arriérés, limités cependant à environ la moitié de la somme réclamée. L’I.N.A.S.T.I. a en effet réduit sa demande, vu la levée partielle de la responsabilité solidaire, ainsi qu’une demande de remise de majoration à laquelle il a été fait droit.

Appel est interjeté par celui-ci, les intérêts judiciaires ayant été suspendus pendant une période de 4 ans. L’appel porte essentiellement sur la suspension du cours des intérêts et l’octroi de termes et délais (de même que le montant de l’indemnité de procédure).

La cour va reprendre l’abondante jurisprudence en matière de suspension du cours des intérêts judiciaires. Elle rappelle que, de manière constante, elle a jugé que l’institution de sécurité sociale qui poursuit le recouvrement de sommes dues dans le cadre de la sécurité sociale doit faire preuve de diligence. Est dès lors considéré comme abusif le fait de rester en défaut de diligenter une procédure et de solliciter pour la période correspondante les intérêts judiciaires.

La suspension du cours des intérêts n’est cependant pas automatique.

En l’espèce, elle examine les raisons qui ont conduit le tribunal à statuer près de 6 ans après les faits et elle constate que, au moment où elle statue, plus de 8 ans se sont écoulés.

Pendant cette période, des événements sont intervenus, retardant (normalement) le cours de la procédure. La cour retient comme tels (i) une demande de dispense des cotisations sociales introduite par l’intéressée elle-même, (ii) une demande de levée de responsabilité solidaire introduite par la société, (iii) une demande de remise des majorations et (iv) la radiation de la défenderesse du Registre national.

Tous ces événements ne peuvent, pour la cour, autoriser la suspension du cours des intérêts pour une période de 4 ans (sur les 6 ans de la procédure en première instance), et ce d’autant que cette suspension a été accordée d’office.

La cour va encore brièvement envisager la question des termes et délais, étant que, condamnée à plus de 14.000 €, à majorer des intérêts judiciaires, l’intéressée est autorisée à s’acquitter de remboursements mensuels de 100 €.

Sa situation financière étant considérée très difficile, elle a une deuxième conséquence, étant de fixer au minimum l’indemnité de procédure.

Intérêt de la décision

Ce cas d’espèce rappelle très utilement la jurisprudence constante de la Cour du travail de Bruxelles en ce qui concerne la suspension du cours des intérêts judiciaires dus dans le cadre de procédures de recouvrement de sommes au bénéfice des régimes de sécurité sociale. La cour rappelle en effet régulièrement, par le recours à la théorie de l’abus de droit, que le demandeur qui s’abstient de diligenter sa procédure ne peut réclamer, pour la période correspondante, la condamnation du débiteur aux intérêts judiciaires.


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