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Cumul de revenus professionnels et d’une pension de retraite de travailleur indépendant : gare aux plus-values !

Commentaire de C. trav. Mons, 8 février 2008, R.G. 20.244

Mis en ligne le mardi 11 juin 2013


Cour du travail de Mons, 8 février 2008, R.G. n° 20.244

TERRA LABORIS Asbl

Dans un arrêt du 8 février 2008, la Cour du travail de Mons a repris les règles applicables en cas de cumul avec une pension de travailleur indépendant de revenus professionnels produits par une activité autorisée et applique la jurisprudence de la Cour de cassation en matière de cotisations.

Les faits

Le 18 avril 2000, Monsieur D. introduit une demande de pension dans le régime des travailleurs indépendants, à partir du 1er mai 2001. Il déclare maintenir une activité professionnelle en qualité de travailleur indépendant, et ce dans les limites autorisées.

Il perçoit ladite pension à partir du 1er mai 2001, et ce pour un montant de l’ordre de 4.600 € par an.

Quatre ans plus tard, en mars 2005, suite à une enquête auprès de l’administration des contributions, l’INASTI notifie une décision selon laquelle, les revenus pour l’année 2002 ayant dépassé les limites autorisées, la pension de retraite n’est pas payable pour cet exercice.

L’intéressé introduit un recours devant le tribunal du travail.

La position du tribunal

Le tribunal confirme la décision administrative et considère que l’intéressé n’apporte pas la preuve de ses allégations, étant que l’essentiel des revenus est constitué d’une plus-value réalisée à l’occasion de la cessation de son activité et non de revenus professionnels propres à l’exercice.

La position de la Cour

La Cour rappelle les règles en matière de cumul, telles que contenues dans l’article 30bis de l’arrêté royal n° 72 du 10 novembre 1967 : les prestations de retraite et de survie des travailleurs indépendants ne sont payables que si le bénéficiaire n’exerce pas d’activité professionnelle, sauf dérogation contenue dans l’article 107 de l’arrêté royal du 22 décembre 1967 portant règlement général relatif à la pension de retraite et de survie des travailleurs indépendants.

Cette exception prévoit l’autorisation de paiement d’une pension, moyennant déclaration préalable d’exercice d’une activité de travailleur indépendant ou d’aidant entraînant l’assujettissement à l’arrêté royal n° 38, et ce pour autant que les revenus professionnels produits par cette activité ne dépassent pas un plafond déterminé. Il s’agit de toute activité susceptible de produire des revenus tels que visés à l’article 23, § 1er, 1° et 2° ou 4° du Code des impôts sur les revenus. Par revenus professionnels, il faut entendre les revenus professionnels bruts diminués des dépenses ou charges professionnelles ainsi, le cas échéant, que des pertes professionnelles, tels que retenus par l’administration des contributions directes lors de l’établissement de l’impôt relatif à l’exercice en cause.

La Cour va examiner l’avertissement extrait de rôle de l’exercice fiscal 2003, relatif, ainsi, aux revenus de 2002, tel que communiqué par l’administration des contributions directes à l’INASTI.

Les revenus professionnels déclarés par Monsieur D. pour cette année, sur la base desquels la taxation a été fixée, s’élèvent à plus de 170.000 €, étant près de 22.000 € de bénéfices bruts et environ 165.000 € de plus-values. Les frais professionnels sont repris à concurrence de 14.000 € environ. Il s’agit dès lors d’un montant nettement supérieur à la limite autorisée, dont la Cour rappelle qu’elle était à l’époque de 8.676,27 €.

Confirmation est donnée par le Contrôle des contributions du domicile de l’intéressé que la plus-value est une plus-value réalisée en cours d’activité au sens de l’article 24 du Code des impôts sur les revenus et que son taux d’imposition est fixé à l’article 171, 4° du même Code et non une plus-value de cessation d’activité au sens de l’article 28 comme le prétend l’intéressé.

La Cour constate encore que la taxation concernant cette période litigieuse est consolidée et définitive, en l’absence de recours fiscal abouti et qu’elle est de ce fait couverte par l’autorité de la chose décidée.

Elle rappelle que les taxations définitives s’imposent à la fois à l’Administration, à l’assujetti social et également aux juridictions du travail, auxquelles il n’appartient pas de modifier une imposition des revenus même en cas d’erreur dans la déclaration. Par application du principe de la séparation des pouvoirs à l’égard de l’Administration fiscale, la juridiction n’est pas autorisée à rectifier l’erreur éventuelle dans les revenus de l’année. La Cour rappelle de la jurisprudence de fond ainsi que l’arrêt de la Cour de cassation du 14 janvier 2002 (S.01.0009.F/4), selon lequel les revenus à prendre en considération pour le calcul des cotisations sont ceux fixés par l’administration des contributions directes ou, en cas de contestation, ceux reconnus à la fin du litige par l’autorité ou la juridiction saisie du recours fiscal et que la juridiction du travail, statuant sur la contestation relative aux obligations résultant des lois et règlements en matière de statut social, ne peut remettre en question le montant de ces revenus professionnels bruts (diminués des frais professionnels et le cas échéant des pertes).

La Cour relève qu’il s’agit certes d’un arrêt rendu en matière de cotisations sociales mais qu’il lui paraît que son enseignement est applicable à la matière concernée, étant la problématique du cumul du bénéfice des prestations sociales avec des revenus professionnels, dès lors qu’en cette matière aussi, il a expressément été spécifié par le législateur que les revenus professionnels sont les mêmes. La Cour conclut qu’elle doit donc retenir qu’il s’agit d’une plus-value réalisée en cours d’activité et qu’elle doit dès lors être prise en compte dans la fixation du dépassement éventuel des revenus complémentaires à la pension autorisés.

Intérêt de la décision

L’arrêt statue en matière de plus-value réalisée par le travailleur indépendant et applique les règles de cumul de la jurisprudence de la Cour de cassation relatives aux cotisations à la matière du calcul des revenus autorisés, cumulables avec une pension de retraite.


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