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Les titres-repas sont-ils passibles de cotisations de sécurité sociale ?

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 6 mars 2013, R.G. 2011/AB/219

Mis en ligne le mercredi 4 septembre 2013


Cour du travail de Bruxelles, 6 mars 2013, R.G. 2011/AB/219

TERRA LABORIS ASBL

Dans un arrêt du 6 mars 2013, la Cour du travail de Bruxelles rappelle les conditions dans lesquelles les titres-repas peuvent être exonérés des cotisations à la sécurité sociale.

Les faits

La Province de Namur a, depuis une dizaine d’années, décidé d’accorder des titres-repas à son personnel, et ce à titre expérimental, initiative intervenant dans le contexte d’une nouvelle politique de gestion de celui-ci.

Les titres-repas ont dès lors été payés à partir du 1er janvier 2002. La même année, l’allocation de programmation sociale n’a pas été accordée, situation restant inchangée jusqu’en 2009.

En 2008, le Service d’Inspection de l’O.N.S.S.A.P.L., vérifiant les données des années 2004 à 2007, relève la question des titres-repas. Il est constaté que c’est sur la base de procès-verbaux du Comité particulier de négociation que la prime de fin d’année a été suspendue à l’époque au profit des titres-repas. Pour l’O.N.S.S.A.P.L., il y a dès lors lieu de soumettre ceux-ci aux cotisations de sécurité sociale. Il invite dès lors la Province à régulariser la situation. Celle-ci s’y oppose et une rectification intervient d’office.

Une procédure est dès lors introduite devant le Tribunal du travail de Bruxelles, procédure dans laquelle les parties comparaissent volontairement.

Pour la Province, les titres-repas n’ont pas été octroyés en remplacement ou en conversion d’une rémunération, l’O.N.S.S.A.P.L. soutenant la thèse inverse, considérant qu’il s’agit de sommes couvertes par l’article 19bis, § 1er, alinéa 2 de l’arrêté royal du 28 novembre 1969 pris en exécution de la loi du 27 juin 1969.

Le tribunal du travail déboute l’O.N.S.S.A.P.L. par jugement du 17 novembre 2010 et celui-ci interjette appel.

Position des parties devant la cour

Si, comme il se doit, la Province demande la confirmation du jugement, l’O.N.S.S.A.P.L. sollicite qu’il soit fait droit à sa demande aux motifs que (i) les titres-repas concernant le personnel contractuel ont été octroyés en remplacement ou en conversion de rémunération ou de sommes visées à l’article 19bis, § 1er, alinéa 2 et (ii) la Province est dès lors tenue de déclarer l’ensemble de ces titres et doit être condamnée à verser les cotisations de sécurité sociale correspondantes.

La décision de la cour

La cour constate que le débat porte sur l’article 14 de la loi du 27 juin 1969, qui renvoie à la notion de rémunération existant dans la loi du 12 avril 1965 (article 2). Le Roi ayant le pouvoir d’élargir ou de restreindre la notion légale, la cour renvoie à l’arrêté royal du 28 novembre 1969 en son article 19bis (applicable dans sa version en vigueur avant une modification par arrêté royal du 13 février 2009). Cette disposition énonce que l’avantage accordé sous forme de titres-repas est considéré comme rémunération sauf à remplir les conditions cumulatives prévues au paragraphe 2. Il est expressément prévu que, si ceux-ci ont été octroyés en remplacement ou en conversion de la rémunération, de primes, d’avantages en nature ou d’un quelconque autre avantage ou complément, passible(s) ou non de cotisations de sécurité sociale, ils sont considérés comme rémunération. Le principe est dès lors qu’ils ont un caractère rémunératoire sauf si les conditions fixées par la réglementation sont remplies.

La cour rappelle encore l’arrêt de la Cour de cassation du 6 mai 2002 (Cass., 6 mai 2002, S.01.0174.N), selon lequel, lorsque des titres-repas sont considérés comme rémunératoires, ils le sont en totalité et non uniquement pour le montant excédant le maximum autorisé, la prime ou l’avantage ou encore le complément remplacé ou converti.

Il y a dès lors lieu d’examiner les conditions dans lesquelles ces titres ont été accordés. La cour reprend les discussions intervenues à l’époque. Se pose ainsi la question de savoir si la prime était acquise ou non. Sur le plan des principes, la cour retient que, si une prime n’est pas acquise et qu’elle est accordée en contrepartie du travail, elle constitue une rémunération.

Reste à savoir s’il y a eu remplacement. La concordance chronologique ne suffit pas en l’espèce (d’autant que les titres ont été accordés en début d’année et la décision de ne pas octroyer la prime de programmation sociale est ultérieure).

Il n’en résulte dès lors pas, pour la cour, qu’il y a eu remplacement. Elle relève encore que la mesure a été prise dans un contexte plus général, dans lequel étaient formées diverses demandes légitimes. Elle confirme dès lors le jugement intervenu.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour du travail de Bruxelles rappelle que le principe en matière de titres-repas est qu’ils ont un caractère rémunératoire. Ce n’est que s’ils remplissent cumulativement les conditions fixées au paragraphe 2 de l’article 19bis de l’arrêté royal du 28 novembre 1969 qu’ils ne sont pas passibles de cotisations de sécurité sociale.

Il rappelle également que, s’ils sont considérés comme de la rémunération, les cotisations de sécurité sociale couvrent l’ensemble de la valeur du titre et non la partie qui dépasse le montant autorisé (soit actuellement 7 euros).


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