Terralaboris asbl

Chômage : mesures en cas de non présentation à une convocation

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 12 février 2014, R.G. 2010/AB/1.100

Mis en ligne le jeudi 15 mai 2014


Cour du travail de Bruxelles, 12 février 2014, R.G. n° 2010/AB/1.100

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 12 février 2014, la Cour du travail de Bruxelles rappelle la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle les mesures d’exclusion pour chômage volontaire ne constituent pas des sanctions et ne peuvent se voir appliquer l’article 6 de la Convention de sauvegarde.

Les faits

Un assuré social ne se présente pas à une convocation du service de l’emploi ACTIRIS. Il s’avère qu’il a changé de domicile mais n’en a pas avisé le service du chômage. Il est dès lors exclu des allocations de chômage pour une durée indéterminée. L’ONEm l’exclut également pour défaut d’inscription comme demandeur d’emploi et décide de récupérer les allocations perçues pour la période correspondante. Il s’agit, pour l’Office, d’un cas de récidive, pour lequel, en application de l’article 52bis, § 2, alinéa 2 de l’arrêté royal, il ne dispose d’aucun pouvoir d’appréciation, ne pouvant modaliser l’exclusion à durée indéterminée ni prendre une sanction plus douce (durée déterminée, avertissement ou sursis).

Un recours est introduit, et par jugement du 29 octobre 2010, le tribunal du travail le déclare non fondé.

Appel est interjeté.

Décision de la cour du travail

La cour statue en premier lieu sur les obligations du chômeur en cas de changement de résidence. L’article 134 de l’arrêté royal impose en effet de faire une déclaration de la situation personnelle et familiale et la cour constate que – même si le changement de domicile est repris dans les registres de la population – l’intéressé n’établit pas en avoir averti l’ONEm.

Il en découle que la convocation est régulière.

L’intéressé étant par ailleurs en litige avec son organisme assureur, qui avait conclu à une fin d’incapacité de travail, la cour rappelle que dans une telle situation, l’assuré social peut bénéficier des allocations à titre provisoire et qu’il est considéré comme apte aussi longtemps qu’une décision judiciaire en sens contraire ne sera pas intervenue.

Quant à la réinscription comme demandeur d’emploi intervenue, celle-ci est sans effet sur l’exclusion pour une durée indéterminée, prise en exécution de l’article 52bis, §2, alinéas 2 et 4, qui dispose que, en cas de récidive l’exclusion ne prend fin que si le travailleur répond à nouveau aux conditions d’admissibilité prévues aux articles 30 à 34.

La cour constate que le juge est sans pouvoir pour modaliser les conséquences de la mesure appliquée et, les conditions de la récidive étant remplies en l’espèce, la réinscription ne peut faire échec à la décision d’exclusion prise sur cette base.

La cour constate cependant qu’il y a lieu de s’interroger sur le manque de proportion entre le manquement du chômeur et la sanction, qui consiste en la privation des allocations à durée indéterminée. Elle relève que, dans un arrêt du 9 janvier 2013 (C. trav. Bruxelles, 9 janvier 2013, R.G. n° 2010/AB/975), la cour a longuement exposé les règles en la matière, la privant de tout pouvoir de modulation.

Cet arrêt du 9 janvier 2013 renvoie également à la jurisprudence de la Cour de cassation qui, dans un arrêt du 5 novembre 2012 (Cass., 5 novembre 2012, S.10.0097.F), a rappelé que les mesures d’exclusion prises sur la base des articles 51 et 53bis de l’arrêté royal ne sont pas des sanctions mais des mesures prises à l’égard de travailleurs qui ne remplissent pas les conditions d’octroi des allocations de chômage. Il ressort, selon l’arrêt cité par la cour dans la présente espèce, que les seules sanctions administratives en vigueur dans la réglementation de chômage sont celles figurant aux articles 153 et suivants, ainsi lorsque le chômeur a omis de faire une déclaration à laquelle il était tenu ou s’il a fait usage de faux documents.

Cette jurisprudence est constante et il est également renvoyé aux conclusions du Procureur-général LENAERTS, précédant des arrêts anciens de la Cour suprême, arrêts rendus les 26 septembre 1977 et 18 juin 1984. Même si la base du raisonnement suivi dans ces arrêts est contestée en doctrine au motif notamment que la différence entre une condition d’octroi et un manquement ne devrait pas dépendre de la norme en cause mais de la question de savoir si la situation découle d’un comportement personnellement fautif dans le chef du chômeur, la jurisprudence de la Cour suprême s’est maintenue, l’arrêt du 5 novembre 2012, relatif à une autre condition d’octroi (à savoir l’exclusion d’un jeune travailleur qui n’a pas respecté l’engagement souscrit dans le cadre d’un contrat d’activation – article 59quinquies, §§ 5, alinéa 5, et 6) étant venu confirmer la chose. En conséquence, l’article 6, § 3 de la Convention de sauvegarde ne s’applique pas à une telle mesure.

La cour déclare, dès lors, l’appel non fondé.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour du travail de Bruxelles rappelle la position constante de la Cour de cassation dans la problématique des exclusions visées aux articles 51 et suivants de l’arrêté royal du 25 novembre 1991. Ne s’agissant pas de sanctions mais de mesures comprises comme relevant des conditions d’octroi, celles-ci ne sont pas modulables par le juge.


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