Terralaboris asbl

Caractère imposable de l’indemnité

Commentaire de Trib. trav. Bruxelles, 3 février 2014, R.G. 11/7.701/A

Mis en ligne le mercredi 4 juin 2014


Tribunal du travail de Bruxelles, 3 février 2014, R.G. n° 11/7.701/A

Terra Laboris asbl

Dans un jugement du 3 février 2014, le Tribunal du travail de Bruxelles applique, au contrat d’occupation d’étudiant, les règles en matière de contrats à durée déterminée successifs et examine leur conformité aux articles 10 et 10bis de la loi du 3 juillet 1978.

Les faits

Une société exploitant une moyenne surface engage une caissière dans le cadre d’un contrat de travail d’étudiant à durée déterminée. Un second contrat du même type est conclu ultérieurement. Il s’agit de prestations à temps partiel. Le contrat prévoit également dans une annexe une clause de reconduction tacite de six mois en six mois.

En 2010, la travailleuse adresse divers plis recommandé à son employeur dans lesquels elle expliquera qu’ils contiennent, pour le premier, un certificat de grossesse et pour les suivants, des certificats d’incapacité de travail liés à celle-ci. La suspension du contrat se prolonge jusqu’à la date de la rupture, qui intervient en septembre 2010, se fondant sur la fin de l’occupation dans le cadre du contrat de travail d’étudiant, celui-ci étant, pour la société, renouvelable tous les six mois.

À l’issue de son congé de maternité, l’intéressée introduit une demande d’allocations de chômage et reçoit notification d’une décision de refus, au motif d’une durée du travail hebdomadaire insuffisante. Elle va, dès lors, s’adresser au CPAS de sa commune et, ensuite, retrouver un temps partiel dans lequel elle ne peut, cependant, bénéficier d’un complément d’allocations de chômage.

Elle introduit alors une procédure devant le tribunal du travail, demandant diverses sommes, dont une indemnité compensatoire de préavis et une indemnité de protection de la maternité.

Décision du tribunal du travail

Le tribunal conclut, en ce qui concerne la nature du contrat, qu’il est à durée indéterminée. Il relève qu’à supposer la clause de tacite reconduction licite encore conviendrait-il d’examiner la justification à la succession des contrats de travail successifs, dont le tribunal relève qu’il n’y a eu entre eux aucune interruption attribuable au travailleur. La situation n’est dès lors conforme ni à l’article 10 de la loi du 3 juillet 1978 qui n’autorise pas la succession des contrats à durée déterminée ni à l’article 10bis qui prévoit certaines dérogations, à la condition de respecter des critères de durée et de nombre des contrats en cause.

Le tribunal se penche également sur le respect de l’article 124, 2° de la loi du 3 juillet 1978, qui règle le contrat d’occupation d’étudiant. Il constate que les conditions qui y sont reprises n’ont pas été respectées, rappelant un arrêt de la Cour du travail de Gand (C. trav. Gand, 23 novembre 1998, AJT, 1998-1999, p. 880) selon lequel aucune disposition de la loi du 3 juillet 1978 ne prévoit la possibilité de prolonger tacitement un contrat d’étudiant.

Le tribunal fait dès lors droit à la demande d’indemnité compensatoire de préavis.

En ce qui concerne l’indemnité de protection de la maternité, visée à l’article 40 de la loi du 16 mars 1971, il retient en premier lieu que la société a dûment été informée de l’état de grossesse, ayant admis la suspension du contrat et ayant dès lors nécessairement pris connaissance des certificats adressés, qui y faisaient référence.

L’employeur reste dès lors en défaut d’établir qu’il était autorisé à licencier et il a, par sa lettre de rupture, fait un acte tendant à mettre fin unilatéralement à la relation de travail. A défaut d’explications pertinentes, l’absence de la poursuite de la relation de travail ne se justifiait pas, la situation de renouvellement tacite du contrat à durée déterminée initial ayant été considéré comme irrégulière. S’agissant d’une travailleuse en contrat de travail à durée indéterminée, l’indemnité de protection est due à défaut pour l’employeur de respecter les obligations légales relatives à l’existence d’un motif étranger à l’état de grossesse.

En ce qui concerne cette indemnité, le tribunal la considère comme imposable, s’agissant d’une indemnité obtenue en raison et ou à l’occasion de la cessation du travail ou de la rupture du contrat de travail, indemnité ainsi visée par l’article 31, 3° du Code des impôts sur les revenus (le tribunal renvoyant ici à W. van EECKHOUTE et V. NEUPREZ, Compendium social 2013-2014, Droit du travail – tome 2, p. 1245 ainsi qu’à la doctrine et la jurisprudence citée). En ce qui concerne les cotisations de sécurité sociale, elle n’y est pas soumise, le tribunal renvoyant, pour ce à l’article 19, § 2, 2° de l’arrêté royal du 28 novembre 1969 (modifié par les arrêtés royaux des 24 septembre 2013 et 21 décembre 2013, le tribunal se référant particulièrement au préambule de ce dernier arrêté royal).

Intérêt de la décision

Ce jugement du Tribunal du travail de Bruxelles fait une application très claire des principes en matière de contrats de travail à durée déterminée successifs, la situation étant appliquée à des contrats d’occupation d’étudiants. Il rappelle également le mécanisme de la protection contre le licenciement de la travailleuse en cas de grossesse, ainsi que la nature de l’indemnité légale.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be