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Personne handicapée : prise de cours d’une décision de revision d’office

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 4 novembre 2013, R.G. 2013/AB/44

Mis en ligne le vendredi 6 juin 2014


Cour du travail de Bruxelles, 4 novembre 2013, R.G. n° 2013/AB/44

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 2 novembre 2013, la Cour du travail de Bruxelles rappelle ce qu’il faut entendre, en matière de prestations aux personnes handicapées, par revision administrative ou médicale ainsi que par revision d’office et précise la date de prise de cours de la nouvelle décision prise par le Service.

Les faits

Madame L. bénéficie des allocations familiales majorées jusqu’à l’âge de ses 21 ans, étant atteinte de diverses pathologies. La réduction de sa capacité de gain à moins d’un tiers est reconnue, lorsqu’elle a 21 ans, ainsi qu’une réduction d’autonomie de 12 points. Elle bénéficie dès lors d’une allocation de remplacement de revenus et d’une allocation d’intégration.

En octobre 2009, elle travaille dans une entreprise de travail adapté et perd l’allocation de remplacement de revenus. Peu de temps après (février 2010), elle quitte le domicile familial est s’installe seule. Elle demande alors qu’il soit procédé à une revision administrative de son dossier, les formalités étant faites par son frère auprès de l’administration communale le 16 du mois. Elle est alors convoquée à un examen médical. Fin 2011, deux décisions sont prises, l’une étant une revision d’office vu la modification de la composition de ménage (refus ARR de catégorie B vu les revenus perçus et octroi d’une AI de catégorie 1 vu une réduction d’autonomie de 8 points) et, à partir du mois suivant, une nouvelle décision, faisant suite à la demande introduite par le frère (même contenu).

Est alors notifié un indu de près de 8.900€.

Plusieurs mois plus tard, le résultat de l’expertise est notifié à l’intéressée, lui communiquant les conclusions relatives à sa situation médicale (réduction de la capacité de gain à un tiers ou moins ainsi que réduction d’autonomie de 8 points).

Un recours est introduit devant le Tribunal du travail de Bruxelles. Il porte sur la décision de diminuer le montant de l’allocation d’intégration ainsi que sur l’évaluation du handicap.

Par jugement du 5 décembre 2012, le tribunal du travail admet le droit à une ARR ainsi qu’à une allocation d’intégration de niveau 3 à dater du 1er février 2010 (point de départ de la première des deux décisions). L’Etat belge est condamné aux arriérés.

Appel est interjeté par celui-ci.

Décision de la cour du travail

La cour se prononce successivement sur le droit à l’allocation de remplacement de revenus et à l’allocation d’intégration.

Sur la première, elle considère qu’elle ne peut être octroyée, vu la condition de revenus. Elle réforme dès lors le jugement qui a condamné l’Etat belge au paiement de celle-ci.

La question de l’allocation d’intégration est cependant plus délicate, s’agissant de la diminution de l’allocation d’intégration de la catégorie 3 à la catégorie 1 à partir du 1er février 2010. La cour constate en effet que, pour l’intéressée, elle a introduit une demande de revision administrative justifiée par la modification de sa situation familiale consécutive à son déménagement. L’Etat belge estime, quant à lui, qu’il s’agit de réexaminer la situation médicale eu égard à la demande introduite le 16 février 2010, qu’il considère être une nouvelle demande d’allocations.

La cour va ainsi rappeler les principes en ce qui concerne la revision de la demande ainsi que l’introduction d’une nouvelle demande.

En vertu de l’arrêté royal du 22 mai 2003 relatif à la procédure concernant le traitement des dossiers en matière des allocations aux personnes handicapées, une nouvelle demande peut être introduite lorsque selon le demandeur des modifications justifient l’octroi ou l’augmentation des allocations. Une nouvelle demande peut tendre à une revision de la situation médicale – s’agissant alors d’une demande de revision médicale – soit des autres conditions – s’agissant alors d’une demande de revision administrative. Dans la mesure où la nouvelle demande n’est pas une demande de revision médicale, il n’est pas procédé à un nouvel examen médical. En outre, en cas de nouvelle demande, la décision produit ses effets le premier jour du mois qui suit celui au cours duquel la demande nouvelle a été introduite.

Quant à la revision d’office de la situation médicale, il peut y être procédé par l’administration si le bénéficiaire ne répond plus aux conditions de capacité de gain ou au degré d’autonomie exigé. Dans ce cas, la nouvelle décision produit ses effets le premier jour du mois qui suit la date de la notification.

La cour va dès lors appliquer ces règles au cas d’espèce, étant que la nouvelle demande introduite l’a été eu égard à la modification de la situation familiale et cette demande se justifiait dans la mesure où, devenant isolée, l’intéressée était classée en catégorie B, plus favorable que la catégorie C. Reprenant l’ensemble des éléments de la demande elle-même la cour y voit la confirmation du caractère purement administratif de la revision. Il n’y avait dès lors pas lieu de procéder à un nouvel examen médical avant de statuer sur celle-ci.

Une revision d’office de la situation médicale pouvait cependant intervenir et l’on peut considérer que l’examen médical se situe dans ce cadre. Dans ce cas, la revision d’office ne peut produire ses effets qu’à partir du premier jour du mois qui suit sa notification, c’est-à-dire en l’occurrence en décembre 2011. Il n’y a dès lors pas d’effet rétroactif. La cour conclut que l’intéressée doit être rétablie dans son droit, c’est-à-dire qu’elle doit bénéficier de l’allocation en catégorie 3 jusqu’à la date de la notification. Pour la période ultérieure, elle relève encore qu’il y a une contestation médicale sérieuse et elle désigne un expert afin de donner un avis sur la question. Dans l’intervalle, pour cette seconde période, la cour dit que l’Etat belge continuera à allouer à titre provisionnel l’allocation d’intégration de catégorie 1.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour du travail de Bruxelles rappelle les effets d’une demande de revision administrative, à distinguer de l’hypothèse de la revision d’office d’une situation médicale. Si, en l’occurrence, le caractère purement administratif de la nouvelle demande ne peut être contesté, la cour voit, dans l’instruction à laquelle a procédé le Service qu’a été mise en route une revision d’office, conforme aux dispositions de l’arrêté royal du 22 mai 2003. Les conclusions de la décision médicale ne valent donc que pour l’avenir. Etant, par ailleurs, constatée en l’espèce une contestation de cette décision, la cour désigne très logiquement un expert judiciaire pour cette seconde période.


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