Terralaboris asbl

Aide sociale et adresse de référence : droit pour le sans abri

Commentaire de Trib. trav. Bruxelles, 13 juillet 2012, R.G. 11/16.738/A

Mis en ligne le mardi 1er juillet 2014


Tribunal du travail de Bruxelles, 13 juillet 2012, R.G. n° 11/16.738/A

Terra Laboris asbl

Dans un jugement du 13 juillet 2012, le tribunal du travail de Bruxelles rappelle qu’un sans abri, bénéficiaire de prestations sociales, doit, s’il est résidence, bénéficier d’une adresse de référence.

Les faits

Une personne bénéficie d’une adresse de référence auprès CPAS d’une commune bruxelloise depuis 2002, ayant sollicité celle-ci suite à sa radiation des registres. Il est bénéficiaire d’allocations de chômage et motive sa demande par le fait qu’il doit être inscrit pour maintenir ses droits.

En 2011, le CPAS décide de la suppression de cette adresse, suite à un rapport d’enquête sociale. Il communique sa décision à l’administration communale en vue de la radiation à celle-ci.

Dans la décision notifiée, le CPAS rappelle que deux conditions légales sont requises pour l’octroi de celle-ci, étant que la personne ne doit pas (ou plus) avoir de résidence en raison d’un manque de ressources suffisantes et qu’elle doit solliciter une aide sociale telle que visée à l’article 57 de la loi du 8 juillet 1976 organique des CPAS, l’aide sociale pouvant être matérielle, sociale, médicale, médico-sociale ou psychologique.

L’intéressé introduit un recours, demandant l’octroi de l’aide sociale sous forme d’adresse de référence. Il demande la condamnation du Centre à la lui octroyer.

La décision du tribunal

Le tribunal examine les conditions mises par la loi à l’octroi d’une adresse de référence. Il rappelle que les personnes qui en font la demande peuvent être inscrites à une telle adresse, dans la commune où elles sont habituellement présentes, et ce lorsqu’elles séjournent dans une demeure mobile ou qu’elles n’ont pas (ou plus) de résidence pour des raisons professionnelles ou par manque de ressources suffisantes. L’hypothèse de l’absence de ressources suffisantes est rencontrée lorsque les personnes (sans résidence) sollicitent l’aide sociale prévue à l’article 57 de la loi du 8 juillet 1976. Le Centre leur délivre dans ce cas un document attestant que les conditions d’inscription à l’adresse du Centre sont remplies, et ce en vue de leur inscription dans les registres de la population. Une fois l’inscription faite, les intéressés sont tenus de se présenter au moins une fois par trimestre au CPAS.

Celui-ci est, par ailleurs, tenu de signaler au Collège des Bourgmestre et Echevins les personnes qui ne réunissent plus les conditions nécessaires pour le maintien de cette situation et ce dernier procède alors à la radiation (termes de l’article 20, § 3 de l’arrêté royal du 16 juillet 1992 relatif aux registres de la population et au registre des étrangers).

Le tribunal examine ensuite la circulaire du Secrétaire d’Etat à l’intégration sociale du 27 juillet 1998 sur la question de l’absence de ressources suffisantes. Celle-ci considère que sont visés par la mesure les sans-abri qui sollicitent l’aide du CPAS en vue d’obtenir ou de continuer à bénéficier (du minimex) ou de droits sociaux autres que celui-ci : allocations de chômage, allocations pour personnes handicapées, pensions, etc. De même, pour ceux qui ont la possibilité de faire valoir ces droits à nouveau.

Le texte précise qu’il serait absurde, par exemple, qu’un chômeur devenu sans abri et qui n’est plus inscrit dans les registres doive d’abord perdre son droit aux allocations de chômage avant de pouvoir prétendre à une adresse de référence et à l’intervention du CPAS, afin de pouvoir, ensuite, être réintégré dans le circuit du chômage lorsque les conditions pour ce faire se trouveraient à nouveau remplies. Aussi, la demande d’adresse de référence doit-elle être considérée comme une forme d’aide sociale qu’il peut demander.

Le tribunal va ensuite relever l’absence de toute motivation de la décision prise, ainsi que l’absence d’audition de l’intéressé. Il souligne également qu’aucun examen n’a été fait de la situation concrète et que les conséquences de la décision n’avaient pas davantage été pesées. Pour le tribunal, il y a violation flagrante des dispositions législatives et réglementaires applicables. L’intéressé bénéficiant en 2011 d’une pension, il relève encore que la décision litigieuse serait même susceptible de lui faire perdre le bénéfice de celle-ci.

Il condamne dès lors le CPAS à réinscrire le demandeur en adresse de référence à dater de la radiation dans les registres de la population.

Intérêt de la décision

La situation examinée par le tribunal du travail de Bruxelles dans ce jugement est très adéquatement appréciée. Le tribunal rappelle l’importance de l’adresse de référence et son rôle dans l’articulation de l’octroi de ressources. Comme le souligne à juste titre la circulaire ministérielle citée, celle-ci a pour mérite d’éviter les effets absurdes qu’entraînerait l’obligation d’abandonner des avantages sociaux contributifs (chômage ou pension) en vue d’être inscrit comme demandeur d’aide au CPAS …. ce qui permettrait de récupérer lesdits avantages par la suite.

Peut donc bénéficier de cette mesure tout sans abri bénéficiaire de telles allocations ou d’une pension.


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