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Accident du travail survenu dans le secteur public : l’action introduite après accord sur la proposition de règlement est une action en revision

Commentaire de C. trav. Liège, div. Namur, 5 février 2015, R.G. 2014/AN/61

Mis en ligne le lundi 4 mai 2015


Cour du travail de Liège, division Namur, 5 février 2015, R.G. n° 2014/AN/61

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Dans un arrêt du 5 février 2015, la Cour du travail de Liège (div. Namur), a rappelé qu’une contestation surgie après l’accord marqué sur une proposition de règlement suite à un accident du travail réglé dans le cadre de la loi du 3 juillet 1967 est une action en revision.

Les faits

Un ouvrier d’un établissement hospitalier dépendant du secteur public a un accident du travail, pour lequel le MEDEX propose une IPP de 7%, avec une date de consolidation au 26 août 2011. Cette proposition est acceptée par la victime, qui marque accord sur l’offre de règlement.

Il subit, cependant, une nouvelle intervention chirurgicale quelques semaines après cet accord. Cette nouvelle période d’incapacité n’est pas prise en charge, l’absence étant considérée comme non imputable à l’accident du travail.

L’intéressé introduit une procédure devant le tribunal du Travail de Liège, div. Namur, qui, par jugement du 7 janvier 2014, désigne un expert.

L’institution hospitalière interjette appel, faisant valoir que, vu la signature par l’intéressé de la proposition de règlement, celui-ci ne peut ultérieurement introduire une procédure judiciaire aux fins de faire fixer les séquelles de l’accident.

Décision de la cour du travail

La cour examine le litige en deux temps, se posant en premier lieu une question relative à la recevabilité de l’appel.

Les parties ont en effet marqué accord sur la désignation de l’expert. La cour rappelle que, même en cas d’accord, vu le caractère d’ordre public de la matière, appel peut être interjeté contre un jugement d’accord, celui-ci ne portant en l’espèce que sur une demande d’expertise.

Sur le fond de la demande, la cour rappelle la procédure dans le secteur public, étant que la proposition de règlement, signée par la victime (et dont la cour fait grief aux parties de ne pas avoir déposé cette pièce importante) a réglé la question de l’indemnisation des séquelles suite à l’accident du travail.

Elle constate que la demande qui a été introduite a été mal libellée, puisqu’elle visait à obtenir du tribunal le paiement des indemnités elles-mêmes.

La cour décide, dès lors, qu’elle doit requalifier l’action initiale, s’agissant d’une action en revision. Elle se fonde sur la théorie factuelle de l’objet et de la cause développée par la Cour de cassation (citant notamment Cass., 20 avril 2009, RG n° S.08.0015.N). La Cour suprême y a en effet décidé que le juge est tenu de statuer sur la contestation conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Cet examen doit être fait quelle que soit la qualification juridique que les parties ont donnée et il doit suppléer d’office aux motifs proposés. Les limites tracées par la Cour de cassation sont de ne pas soulever une contestation dont les parties ont exclu l’existence dans leurs conclusions, de se fonder uniquement sur des éléments régulièrement soumis à son appréciation et de ne pas modifier l’objet de la demande ni violer les droits de défense des parties (l’extrait de la décision étant repris in extenso dans l’arrêt).

La cour considère dès lors être en présence d’une action en revision, celle-ci étant par ailleurs introduite dans le délai légal.

En conséquence, elle modifie la mission de l’expert, aux fins de correspondre aux règles de ce type d’action.

Intérêt de la décision

Cette décision de la Cour du travail de Liège, div. Namur, applique très adéquatement à la matière la théorie factuelle de l’objet et de la cause de la demande, et ce eu égard à la jurisprudence développée par la Cour de cassation dans la dernière décennie.

La cour renvoie plus particulièrement à l’arrêt du 20 avril 2009 (S.08.0015.N). L’affaire visait une extension de demande au paiement d’arriérés de rémunération introduite au stade de l’appel, demande rejetée au motif qu’elle était issue de l’article 15 de la loi du 3 juillet 1978. La Cour de cassation avait censuré l’arrêt qui avait décidé cette demande prescrite, dans la mesure où il n’avait pas examiné les règles de prescription visées à l’article 26 du titre préliminaire du Code de procédure pénale. La Cour y avait expressément rappelé que le seul fait que les parties n’ont pas invoqué l’application d’une disposition légale déterminée ne signifie pas qu’elles ont exclu cette possibilité dans leurs conclusions.

L’on notera que dans la présente espèce, la cour a, tout en rappelant le caractère d’ordre public de la matière, considéré pouvoir requalifier l’action elle-même. Il s’agit dès lors d’une conception extensive de la jurisprudence ci-dessus.


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