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Assujettissement à l’ONSS des travailleurs de plus de 30 ans visés par l’arrêté royal n° 499 du 31 décembre 1986 portant réglementation de la sécurité sociale de certains jeunes défavorisés

Commentaire de C. trav. Liège, 17 avril 2007, R.G. 33.045/05

Mis en ligne le vendredi 21 mars 2008


Cour du travail de Liège, 17 avril 2007, R.G. 33.045/05

TERRA LABORIS ASBL – Pascal Hubain

Dans un arrêt du 17 avril 2007, la Cour du travail de Liège a considéré que les travailleurs de plus de 30 ans, engagés dans le cadre de cette réglementation, sont soumis à la loi du 27 juin 1969, à savoir qu’il y a lieu de payer, pour eux, les cotisations à la sécurité sociale.

Les faits

Une ASBL, entreprise de formation par le travail (E.F.T.) avec pour objet l’insertion socioprofessionnelle des personnes éprouvant des difficultés pour participer au monde du travail, et ce pour raisons sociales et culturelles, organise des formations, pour lesquelles elle accueille des stagiaires qui reçoivent une indemnité de formation d’un euro l’heure.

Une protection sociale minimum a en effet été organisée pour permettre à des jeunes défavorisés occupés par des ASBL avec objet social de promouvoir l’accès à l’emploi, visant notamment une dispense des cotisations sociales. L’ONSS réclame toutefois les cotisations pour ceux des intéressés qui ont dépassé l’âge de 30 ans. Il s’agit d’un montant supérieur à 26.000 euros pour une période allant du 1er trimestre 1995 au 4e trimestre 2000.

La position des parties

Pour l’ONSS, la dispense concerne uniquement les travailleurs de moins de 25 ou 30 ans (selon les cas) mais nullement ceux plus âgés que 30 ans. Passé l’âge de 30 ans, la relation de travail est un contrat d’apprentissage, étant un contrat qui assure une formation dans un domaine particulier.

Pour l’ASBL, le contrat d’apprentissage et la formation dispensée par les E.F.T. ont des objets différents et, en outre, les différences entre le contrat d’apprentissage et la formation sont nombreuses.

La position de la Cour

Dans un premier arrêt du 17 octobre 2006, la Cour du travail considère que seuls les jeunes de 18 à 30 ans sont, expressément, du moins, visés par l’arrêté royal n° 499 du 31 décembre 1986 portant réglementation de la sécurité sociale de certains jeunes défavorisés. Cet arrêt demande néanmoins à l’ONSS de préciser la base des critères retenus et les dispositions légales concernant les travailleurs défavorisés de plus de 30 ans.

Dans ce second arrêt du 17 avril 2007, la Cour va alors trancher, entre les deux thèses, donnant raison à l’ONSS, mais la motivation de l’arrêt est cependant nuancée.

Il est admis en l’espèce par les parties qu’il ne s’agit pas de contrats de travail, vu que le but et l’objet du contrat sont une formation, certes notamment par le travail, mais ce contrat ne tend pas à l’exercice d’une activité professionnelle dans le but de pourvoir à l’entretien de l’apprenti (distinction faite déjà par la Cour de cassation dans un arrêt du 29 octobre 1990 – Pas., 1991, p. 228). La notion de rémunération est par contre la contrepartie du travail destinée à assurer la subsistance de l’employé ou de l’ouvrier.

Dès lors que l’ONSS considère les travailleurs de plus de 30 ans sont des apprentis et que la loi du 27 juin 1999 doit recevoir application, la Cour examine ce qu’il y a lieu d’entendre par contrat d’apprentissage. Elle relève, à cet égard, qu’aucune loi ne définit celui-ci de manière générale même si divers aspects sont décrits de ci delà et, au demeurant, sans que les définitions visées ne soient identiques. Elle analyse le contrat d’apprentissage, qui a pour objet la formation professionnelle de l’apprenti, étant l’obligation de donner ou de faire donner à celui-ci une formation professionnelle. Pour l’apprenti, il y a corrélativement obligation d’apprendre sous l’autorité d’une personne la pratique de la profession et de suivre l’enseignement jugé nécessaire à sa formation. Pour la Cour, dès que ces critères sont rencontrés, il y a contrat d’apprentissage, quelles que soient les autres dispositions pouvant régler et organiser les contrats de formation et les titres délivrés.

Vient ensuite l’examen de l’arrêté du Gouvernement wallon relatif à l’agrément des entreprises de formation par le travail (E.F.T.), arrêté qui prévoit que l’E.F.T. a pour objet d’assurer la formation de stagiaires en recourant à une pédagogie spécifique, qui repose sur l’accomplissement d’un travail productif, une formation théorique, ainsi que l’accompagnement psychosocial. Selon cet arrêté, la formation a pour but l’insertion socioprofessionnelle des demandeurs d’emplois qui rencontrent des difficultés d’insertion sur le marché du travail et elle vise à l’acquisition ou au renforcement de compétences suffisantes pour permettre ensuite la conclusion d’un contrat de travail ou l’accès à une formation qualifiante. Telle est en l’espèce la formation dispensée par l’ASBL, selon la définition qu’elle donne elle-même de son activité (entretien de jardins, rénovation de bâtiments, …). Il y a dès lors formation dispensée en vue de l’acquisition d’un savoir dans certains métiers, ou formation professionnelle dispensée par l’apprentissage pratique d’un métier et par une formation théorique et technique. Obligation est également faite aux stagiaires de suivre le règlement d’ordre intérieur (suivi des formations sous peine de rupture du contrat pour faute grave).

Il résulte de tout ceci que la définition du contrat d’apprentissage est rencontrée et que, au sens de la loi du 27 juin 1969, les travailleurs de plus de 30 ans doivent être considérés comme des apprentis.

Sont indifférents le fait que la pédagogie soit adaptée aux stagiaires, qu’une formation socioculturelle soit dispensée et qu’un suivi psychosocial soit mis en place.

Intérêt de la décision

La Cour doit mettre ensemble divers éléments de la définition du contrat d’apprentissage, dont elle a relevé qu’il n’y a pas de définition générale, mais des éclairages parcellaires donnés dans divers textes, qui ne se recoupent d’ailleurs pas.

Au sens de la loi du 27 juin 1969, elle décide que les éléments de fait font apparaître que les E.F.T. distribuant des formations dans le cadre de l’arrêté du Gouvernement wallon concluent bel et bien avec les travailleurs qui ne sont pas visés par la dispense de cotisations des contrats d’apprentissage. Elles sont dès lors soumises à la sécurité sociale des travailleurs salariés.

Pour la décision définitive, voir la rubrique « Droits fondamentaux - Egalité et non-discrimination - Sécurité sociale - Assujettissement »


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