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Accident du travail dans le secteur public : rôle du service médical

Commentaire de Cass., 7 mars 2016, n° S.15.0053.N

Mis en ligne le lundi 14 novembre 2016


Cour de cassation, 7 mars 2016, n° S.15.0053.N

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 7 mars 2016, la Cour de cassation rappelle, pour la situation existant avant l’entrée en vigueur de l’A.R. du 8 mai 2014, les compétences du service médical qui doit instruire le dossier de l’accident du travail et transmettre sa décision à l’employeur public.

Les faits

La Cour de cassation est saisie d’un pourvoi contre un arrêt de la Cour du travail de Bruxelles du 21 janvier 2013, relatif au rôle du service médical intervenant dans le cadre du règlement de l’accident du travail dans sa phase administrative.

La question posée porte sur l’arrêté royal du 13 juillet 1970 relatif à la réparation, en faveur de certains membres du personnel des services ou établissements du secteur local, des dommages résultant des accidents du travail et des accidents survenus sur le chemin du travail.

Cet arrêté royal applique, pour les catégories des membres du personnel qu’’il vise, les dispositions de la loi du 3 juillet 1967 sur la prévention ou la réparation des dommages résultant des accidents du travail, des accidents survenus sur le chemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public.

La décision de la Cour

La Cour de cassation commence par rappeler le dispositif de la loi du 3 juillet 1967, qui prévoit que toutes les contestations relatives à son application (y compris celles qui concernent la fixation du pourcentage de l’incapacité de travail permanente) sont déférées à l’autorité judiciaire compétente pour connaître des actions relatives aux indemnités légales (art. 19, alinéa 1er).

La loi dispose par ailleurs dans son article 4, §2, 3e alinéa, qu’il appartient au Roi (sans préjudice de la règle ci-dessus) d’établir les modalités de détermination de l’incapacité de travail. En exécution de cette disposition, divers arrêtés royaux sont intervenus, dont celui examiné par la Cour de cassation.

L’arrêté royal définit le service médical comme étant celui chargé de reconnaître l’inaptitude qui ouvre à l’agent un droit à une pension prématurée définitive ou temporaire (art. 3, 3°).

Les missions du service médical telles qu’applicables à l’époque du règlement de l’accident en cause consistaient à vérifier le lien de causalité entre l’accident et les lésions et à fixer le pourcentage de l’incapacité permanente résultant des lésions physiologiques occasionnées par l’accident. La décision du service médical devait être transmise à l’autorité, à la fois pour ce qui est du lien causal ainsi que pour ce qui touche à la fixation du pourcentage de l’incapacité permanente.

L’autorité était alors tenue de vérifier si les conditions pour l’octroi des indemnités étaient remplies. Elle était également tenue d’examiner les éléments du dommage subi et d’apprécier s’il y avait lieu d’augmenter le pourcentage d’incapacité permanente fixé par le service médical.

Pour la Cour de cassation, il ressort de ces dispositions que la décision du service médical n’est contraignante qu’en ce qui concerne le pourcentage d’incapacité permanente, pourcentage qui peut être augmenté par l’autorité elle-même.

Elle casse dès lors l’arrêt de la Cour du travail de Bruxelles, qui avait admis que le service médical pouvait également fixer la date de consolidation et que celle-ci liait l’employeur.

Intérêt de la décision

Si cet arrêt de la Cour de cassation est récent, il statue sur les compétences du service médical avant l’arrêté royal du 8 mai 2014 (arrêté royal portant détermination de la compétence de l’Administration de l’expertise médicale et modifiant certaines dispositions en matière d’accidents du travail dans le secteur public). Cet arrêté a eu pour objet de rapprocher trois arrêtés d’exécution de la loi du 3 juillet 1967, étant celui du 24 janvier 1969, celui du 13 juillet 1970 (ainsi que celui du 12 juin 1970 par renvoi) et l’arrêté royal P.J. Pol.

Il s’agit des principaux arrêtés contenant des dispositions spécifiques sur les missions du service médical.

Dans une étude particulièrement documentée (S. REMOUCHAMPS, « Le rôle du Medex », Les accidents du travail dans le secteur public, Anthémis, 2015, p. 260 et s.), S. REMOUCHAMPS expose les modifications intervenues dans les compétences du service médical, reprenant à la fois les anciens libellés et le texte actuel.

Depuis l’arrêté royal du 8 mai 2014, le service médical est désigné pour (i) vérifier le lien de causalité entre l’accident du travail et les lésions, (ii) établir le lien de causalité entre cet accident et les périodes d’incapacité de travail, ainsi que (iii) fixer la date de consolidation, le pourcentage d’incapacité permanente et le pourcentage de l’aide de tiers.

Dans son étude ci-dessus, S. REMOUCHAMPS souligne que dans la mesure où le texte donne au service médical la mission d’établir le lien de causalité entre l’accident et les périodes d’incapacité de travail, cette mission ne comprend pas le contrôle des absences.

Elle relève par ailleurs que persistaient des discussions en jurisprudence sur les aspects médicaux réservés, spécialement pour ce qui est de l’incapacité temporaire.

L’arrêt de la Cour de cassation du 7 mars 2016 est venu trancher spécifiquement la question de la date de consolidation. Relevons que dans sa note infrapaginale 38 (p. 262), l’auteure cite les arrêts précédents rendus par la Cour de cassation sur la question, dans lesquels celle-ci a été amenée à intervenir à plusieurs reprises sur l’incapacité temporaire mais également dans un arrêt du 19 décembre 1994 (J.T.T., 1995, p. 238) sur la date de consolidation.

L’arrêt du 7 mars 2016 est dès lors un rappel qui vient très à propos.


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