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Cumul d’indemnités AMI et d’une indemnité compensatoire de préavis pour un temps partiel

Commentaire de C. trav. Bruxelles, le 16 novembre 2016, R.G. n° 2011/AB/806

Mis en ligne le vendredi 30 juin 2017


Cour du travail de Bruxelles, le 16 novembre 2016, R.G. n° 2011/AB/806

Terra Laboris

Par arrêt du 16 novembre 2016, la Cour du travail de Bruxelles clôt le débat sur les conditions de cumul entre des indemnités AMI et une indemnité compensatoire de préavis perçue pour un contrat mi-temps, s’agissant en l’espèce d’une travailleuse ayant cumulé deux temps partiels.

Les faits

Une travailleuse était occupée dans le cadre de deux contrats de travail de remplacement, chacun étant à temps partiel et couvrant un mi-temps. Elle est tombée en incapacité en janvier 2013 et a bénéficié d’indemnités de sa mutuelle. Les indemnités ont été calculées sur la base du « double mi-temps ». Elle a ainsi bénéficié d’un montant de l’ordre de 40€ par jour.

Un des deux contrats a alors pris fin, en cours d’incapacité de travail et entre-temps, le deuxième est devenu à durée indéterminée. Celui-ci s’est également terminé quatre mois plus tard moyennant paiement d’une indemnité compensatoire de préavis de huit semaines.

A l’issue de la période couverte par cette indemnité, la mutuelle signale à l’intéressée qu’elle ne peut bénéficier des indemnités pour la période couverte par l’indemnité compensatoire et qu’il y a un indu.

Un recours est introduit devant le Tribunal du travail de Bruxelles et celle-ci y conteste la récupération, qui ne peut concerner pour elle que la moitié de l’indemnité versée pendant la période concernée, puisque l’indemnité compensatoire n’a elle-même été payée qu’en fonction du second contrat à mi-temps.

Décision du tribunal du travail

Le tribunal rend son jugement le 5 octobre 2004 et il déboute la demanderesse. Il conclut que la somme réclamée par la mutuelle correspond à une période couverte par une indemnité de rupture et que de ce fait il y a un indu dont le remboursement est fondé.

L’arrêt de la cour du travail du 27 novembre 2013

La cour rappelle l’interdiction de cumul visée à l’article 103, § 1er, 1° de la loi coordonnée le 14 juillet 1994, étant que le droit aux indemnités ne peut être cumulé avec la perception d’une rémunération. Or, l’indemnité compensatoire de préavis a ce caractère. En l’occurrence, il y a eu paiement d’indemnités AMI eu égard à la rémunération perçue dans les deux contrats et paiement de l’indemnité compensatoire de préavis pour l’un des deux seulement.

La cour y constate que l’article 103, § 1er, 1° pose question, confronté aux principes d’égalité et de non-discrimination. Renvoyant à un arrêt de la Cour constitutionnelle du 28 mars 2013 (C. const., 28 mars 2013, n° 51/2013) à propos de l’augmentation des situations de travail à temps partiel, la cour relève également que la Directive 97/81/CE du Conseil du 15 décembre 1997 concernant l’accord-cadre sur le travail à temps partiel pose le principe du prorata temporis, et ce notamment afin d’éviter que le temps partiel ne soit découragé.

La cour du travail interroge dès lors la Cour constitutionnelle sur la question de la violation par l’article 103, § 1er, 1° de la loi coordonnée le 14 juillet 1994 des articles 10 et 11 de la Constitution, isolément ou en combinaison avec les dispositions de droit européen ci-dessus, dans la mesure où il y a suspension complète des indemnités sans distinguer que l’indemnité compensatoire a été calculée en fonction d’une rémunération à temps plein ou à temps partiel.

L’arrêt de la Cour constitutionnelle

La Cour constitutionnelle a rendu son arrêt le 25 septembre 2014 (n° 141/2014). Elle conclut à la violation des articles 10 et 11 de la Constitution combinés ou non avec la clause 4 de l’accord-cadre s’il est interprété comme entraînant la suspension complète des indemnités. Il y a cependant absence de violation s’il est interprété comme entraînant la suspension de la partie des indemnités d’incapacité de travail correspondant à l’occupation à laquelle il a été mis fin.

L’arrêt de la cour du travail du 16 novembre 2016

La cour du travail reprend la discussion, eu égard à la décision de la Cour constitutionnelle et en déduit que pendant la période couverte par l’indemnité compensatoire de préavis, l’intéressée conservait le droit à la moitié de ses indemnités d’incapacité de travail sur la base du contrat mi-temps ayant pris fin précédemment.

Intérêt de la décision

Cet arrêt clôture ce litige et de manière plus générale le débat sur l’interdiction de cumul prévue à l’article 103, § 1er, 1° de la loi coordonnée le 14 juillet 1994 dans une telle hypothèse, qui aboutissait à une solution pour le moins inique.

Si la solution dégagée par la Cour constitutionnelle et confirmée par la cour du travail semble logique, le texte de la loi ne fait en effet pas la distinction, entre une rémunération à temps partiel ou à temps plein.

Le seul renvoi figurant dans la disposition est celui à la notion de rémunération elle-même, qui est celle de l’article 2 de la loi du 12 avril 1965 concernant la protection de la rémunération des travailleurs.


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