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Congé parental : calcul de la rémunération de base pour l’incapacité temporaire en cas d’accident du travail

Commentaire de C. trav. Liège (div. Namur), 23 mai 2017, R.G. 2011/AN/132

Mis en ligne le lundi 16 octobre 2017


Cour du travail de Liège, division Namur, 23 mai 2017, R.G. 2011/AN/132

Terra Laboris

Par arrêt du 23 mai 2017, la Cour du travail de Liège (division Namur) reprend les règles en la matière : la loi du 3 juillet 1967 renvoie à celle du 10 avril 1971 (hors régime particulier plus favorable) et il y a lieu, en cas d’engagement à temps plein, de tenir compte du principe de l’article 34 et non de l’existence d’un temps partiel.

Les faits

Une fonctionnaire a été victime d’un accident du travail le 17 janvier 2003.

Une procédure a été initiée devant le Tribunal du travail de Charleroi, qui, après avoir désigné un médecin-expert, a fixé les séquelles par jugement du 7 décembre 2010, admettant une période d’incapacité temporaire totale de 2 ans, une incapacité temporaire partielle de plus de 3 ans et une incapacité permanente de 25% à partir de la consolidation.

Le tribunal a fixé les rémunérations de base, tenant compte d’un montant de l’ordre de 16.200 euros pour les périodes d’incapacité temporaire et de 24.300 euros pour l’incapacité permanente.

La travailleuse interjette appel, sur les rémunérations de base essentiellement (outre une question d’indemnité de procédure).

La décision de la cour

Après avoir rappelé les éléments de fait (violente agression), la cour en vient à la question litigieuse, étant la rémunération de base à prendre en compte, eu égard au fait que l’intéressée était en congé parental au moment de l’accident du travail.

Pour l’appelante, il faut tenir compte de la rémunération à temps plein de l’année précédant l’accident et non de la réduction due au fait qu’elle était occupée à mi-temps dans le cadre d’un congé parental à ce moment depuis moins d’un mois.

Le texte applicable est l’article 3bis de la loi du 3 juillet 1967. Celui-ci (ainsi que le règlement particulier applicable aux contractuels occupés par la Ville) renvoient au secteur privé et, en l’espèce, à l’article 34 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail.

Pour la Ville, il faut uniquement se référer à la loi du 3 juillet 1967 et non à celle du 10 avril 1971. La rémunération de base est dès lors celle en vigueur à la date de l’accident, à savoir la rémunération à mi-temps.

Devant départager ces deux thèses, la cour rappelle les dispositions applicables. Pour le secteur public, il s’agit de la loi du 3 juillet 1967 et de l’arrêté royal du 13 juillet 1970 (s’agissant de personnel d’une administration locale). Le droit à la rente en cas d’incapacité permanente est prévu par l’article 3, alinéa 1er, 1°, a), de la loi et, pour ce qui est de l’incapacité temporaire, il est renvoyé par l’article 3bis, alinéa 1er, au régime applicable dans le secteur privé, ceci étant une garantie minimale prévue, sauf régime particulier plus favorable. La cour rappelle la jurisprudence sur la question ainsi que la doctrine récente, soulignant que l’existence d’un tel régime particulier plus favorable est fréquente (renvoyant notamment à l’arrêté royal du 24 janvier 1969, selon lequel, pendant la période de l’incapacité temporaire, la rémunération due en raison du contrat ou du statut est maintenu).

Le texte vaut pour tous les travailleurs en incapacité de travail temporaire, que celle-ci soit totale ou partielle. C’est la jurisprudence de la Cour de cassation (la cour renvoyant à Cass., 8 octobre 2001, n° S.99.0187.F).

Dans la mesure où il n’y a pas de dérogation à la règle dans le règlement concernant les agents contractuels de la Ville, il faut se tourner vers la loi du 10 avril 1971, qui reprend en ses articles 34 et suivants la question de la détermination de la rémunération de base. La règle fixée par l’article 34 est la rémunération à laquelle le travailleur a droit pour l’année qui a précédé l’accident, et ce en raison de la fonction exercée au moment de celui-ci. La rémunération traduit la capacité économique de la victime et la perte de cette capacité doit être indemnisée conformément à ce critère.

En cas de période de référence incomplète ou si la rémunération du travailleur a été inférieure à la rémunération qu’il gagne normalement, il faut, en vertu de l’article 36, § 1er, retenir une rémunération hypothétique (égale à la multiplication du nombre de jours ou d’heures non prestés pendant la période de référence par la rémunération à laquelle le travailleur a droit divisée par le nombre de jours ou d’heures prestés).

Pour les travailleurs à temps partiel, c’est l’article 37bis qui règle la question : la rémunération de base est fixée uniquement en fonction du salaire dû aux termes du contrat de travail. S’il y a plusieurs contrats à temps partiel, il faut tenir compte des salaires dus aux termes de l’ensemble de ces contrats. C’est un régime dérogatoire à celui de l’article 36 et, par ailleurs, la cour relève qu’il ne vise que l’hypothèse d’un travailleur qui a conclu un contrat de travail à temps partiel et non celui qui, engagé à temps plein, travaille à temps partiel d’une manière temporaire ou occasionnelle (la cour renvoyant à l’hypothèse d’un mi-temps médical, ou encore à un crédit-temps – situations déjà rencontrées en jurisprudence).

En l’occurrence, l’occupation temporaire et occasionnelle à temps partiel s’est inscrite dans le cadre d’un engagement à temps plein, de telle sorte qu’il faut retenir l’article 34 de la loi et compléter par une rémunération hypothétique calculée conformément à l’article 36, § 1er.

La cour décide dès lors, après avoir retenu ces principes, de rouvrir les débats sur les chiffres (et le plafonnement éventuel).

Intérêt de la décision

Renvoyant à deux autres décisions rendues dans des hypothèses similaires (C. trav. Bruxelles, 18 février 2008, R.G. 43.738 et C. trav. Liège, 29 janvier 2016, R.G. 2015/AL/212), la cour du travail rappelle le principe gouvernant le montant de la rémunération de base à prendre en compte pour l’incapacité temporaire en cas d’accident du travail : si le contrat a été conclu à temps plein, il n’y a pas lieu d’appliquer l’article 37bis, mais la règle générale de l’article 34 avec celle (éventuellement) de l’article 36, § 1er, en cas de période de référence incomplète ou de rémunération inférieure à la normale vu des circonstances exceptionnelles.

Ce régime est applicable totalement aux travailleurs du secteur public, sauf régime particulier plus favorable, la cour rappelant à cet égard que tel est le cas pour les membres du personnel à qui s’applique l’arrêté royal du 24 janvier 1969.


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