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Décision d’aptitude au travail : droit aux allocations de chômage provisoires en cas de tardivité du recours contre la décision de la mutuelle ou de l’INAMI

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 5 décembre 2007, R.G. 48.665

Mis en ligne le mercredi 26 mars 2008


Cour du travail de Bruxelles, 5 décembre 2007, R.G. 48.665

TERRA LABORIS ASBL – Sandra Cala

Dans un arrêt du 5 décembre 2007, la Cour du travail de Bruxelles estime que les allocations de chômage provisoires, versées en raison d’une contestation d’une décision d’aptitude, ne peuvent être conservées dès lors que le recours judiciaire à l’encontre de la décision d’aptitude est déclaré tardif.

Les faits

Mme B. est serveuse. Elle est victime d’un accident de la vie privée en juillet 1996 et est reconnue en incapacité par sa mutuelle jusqu’en juillet 1999.

A ce moment, l’INAMI prend en effet une décision d’aptitude au sens de l’article 100 des lois coordonnées.

Contestant cette décision, Mme B. obtient des allocations de chômage, à titre provisoire, dans l’attente de l’issue du litige l’opposant à l’INAMI. Il faut souligner que le contrat de travail la liant au dernier employeur est toujours en cours, mais suspendu.

Le 6 février 2001, le Tribunal du travail déclare le recours dirigé contre la décision de l’INAMI irrecevable, parce que tardif. Ce jugement est transmis en janvier 2003 à l’ONEm, suite à l’envoi d’une demande de renseignements de cet organisme.

Par décision du 25 avril 2003, l’ONEm exclut alors l’intéressée à dater du 6 février 2001 et sollicite le remboursement des sommes perçues à partir de cette date.

Contestant cette décision, Mme B. introduit un recours devant le Tribunal du travail, qui la déboute et refuse de limiter la récupération aux 150 derniers jours d’indemnisation.

Position des parties en appel

Mme B. fait valoir que l’article 62 de l’A.R. du 25 novembre 1991 ne vise pas l’hypothèse où le Tribunal déclare le recours irrecevable. Elle en déduit qu’elle doit être considérée comme apte et qu’il n’y a pas d’obstacle aux allocations de chômage. Elle fait par ailleurs valoir que la décision de l’INAMI, qui statue sur son aptitude eu égard au marché général du travail, ne prouve pas une aptitude au travail contractuellement convenu. Elle estime ne pas être capable de reprendre le travail convenu et s’appuie d’ailleurs sur la reconnaissance d’une incapacité suite à la décision d’exclusion de l’ONEm. Enfin, alléguant de sa bonne foi, elle demande, à titre subsidiaire, la limitation de la récupération aux 150 derniers jours.

L’ONEm fait quant à lui valoir que, dès lors qu’un jugement avait été prononcé, l’intéressée ne pouvait plus bénéficier des allocations provisoires mais aurait dû reprendre le travail auprès de son employeur ou déclarer une nouvelle incapacité ou encore signaler son inaptitude à l’ONEm, qui aurait pu effectuer un contrôle médical. L’ONEm évoque encore la possibilité pour la travailleuse, s’il y avait inaptitude à exercer l’emploi convenu, de solliciter des allocations de chômage temporaire pour force majeure, dès lors qu’aucun travail de remplacement ne pouvait lui être confié.

Vu le défaut d’information quant au jugement prononcé, ces possibilités n’ont pu être mises en œuvre et l’ONEm n’a pu vérifier l’aptitude au travail. Sur le défaut lui-même, l’ONEm rappelle qu’il ne suffit pas de répondre aux demandes de renseignement, l’obligation d’information imposant à Mme B. de communiquer spontanément la décision.

Quant à la limitation de la récupération, l’ONEm conteste la bonne foi dès lors que l’intéressée a omis de communiquer le jugement déclarant le recours irrecevable. Il estime par ailleurs que la limitation aux 150 derniers jours ne peut trouver à s’appliquer, s’agissant d’allocations provisoires.

La décision de la Cour

La Cour statue dans le cadre de l’article 62, § 2, de l’arrêté royal du 25 novembre 1991.

Sur la portée de cette disposition, elle estime que l’ONEm est en droit d’exclure le chômeur dès lors que son recours est déclaré irrecevable.

Elle rappelle par ailleurs que, à la suite du jugement rendu, soit l’intéressée s’estimait apte et aurait dû reprendre le travail soit, si elle s’estimait inapte, elle aurait dû déclarer cette inaptitude, sollicitant alors des allocations de chômage temporaire pour force majeure.

La Cour constate cependant que l’intéressée n’a fait ni l’un, ni l’autre et, alors qu’elle s’était engagée à communiquer toute décision rendue sur son recours contre la décision d’aptitude, elle s’est abstenue et a préféré rester sur le régime dérogatoire des allocations de chômage provisoires.

La Cour confirme ainsi la décision administrative (et le jugement) sur l’exclusion.

Quant à la période de récupération, elle refuse de reconnaître la bonne foi, se fondant sur l’absence d’information de Mme B. et le fait que, par cette inertie, elle ait pu bénéficier d’un régime auquel elle n’avait plus droit. La Cour retient également que le silence de l’intéressée sur l’issue du litige AMI a empêché l’ONEm de contrôler l’aptitude.

Intérêt de la décision

L’arrêt commenté apporte une solution à un problème précis : le cas du recours contre la décision d’aptitude déclaré irrecevable alors que le contrat de travail est toujours en cours, mais suspendu.

La solution dégagée par la Cour (se fondant d’ailleurs sur la position de l’ONEm) est que soit l’intéressé reprend le travail, soit il demande à bénéficier des allocations de chômage temporaire (demande fondée sur une force majeure pour raisons médicales, étant l’impossibilité temporaire d’exercer le travail convenu).


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