Terralaboris asbl

Conséquence d’une irrégularité dans la mise à la cause des parties intéressées et identification de celles-ci dans le cadre d’une action en rectification des résultats

Commentaire de Trib. trav. Nivelles, sect. Wavre, 26 juin 2008, R.G. 08/1267/A

Mis en ligne le mercredi 5 novembre 2008


Tribunal du travail de Nivelles, Section Wavre, 26 juin 2008, R.G. n° 08/1267/A

TERRA LABORIS ASBL – Sophie Remouchamps

Dans un jugement du 26 juin 2008, le Tribunal du travail de Nivelles, section de Wavre, rappelle quelques règles importantes de la procédure en matière d’élections sociales, et particulièrement celles relatives à la mise à la cause des parties intéressées et à l’identification de celles-ci.

Les faits

Une organisation représentative de travailleurs représentée au Conseil National du Travail, ainsi qu’une de ses sections régionales, contestent le résultat des élections sociales. Elles déposent une requête contre l’entreprise où les élections ont été organisées mais omettent d’identifier les parties intéressées.

Elles font par ailleurs défaut à l’audience d’introduction et l’affaire est remise par défaut à une prochaine audience, préalablement à laquelle les demanderesses identifient deux parties intéressées, étant, d’une part, une autre organisation représentative siégeant au CNT et, en ce qui concerne la troisième, une organisation affiliée à celle représentée au niveau national.

En ce qui concerne le fond du litige, celui-ci porte sur une contestation des résultats en vue de l’instauration d’un CPPT dans l’entreprise, la société considérant que les votes exprimés à la fois nominativement et en tête de liste sont nuls.

La position du Tribunal

Le Tribunal tranche, dans son jugement du 26 juin 2008, à la fois la question de la recevabilité et celle de la régularisation de la mise en état.

Sur la recevabilité, contestée par la partie défenderesse (la société), il constate que les demanderesses n’ont pas communiqué l’identité et l’adresse complète des parties intéressées au greffe.

La société, pour sa part, identifie d’autres parties intéressées que les organisations syndicales étant d’une part les candidats effectifs et suppléants élus au terme du scrutin querellé et, d’autre part, le Directeur Général de la Direction générale relations individuelles du travail du SPF Emploi, travail et concertation sociale chargé des organes de participation. La société objecte que l’identification de ces parties intéressées n’est pas intervenue dans le délai de 13 jours suivant l’affichage du résultat des élections et qu’elle ne peut, de ce fait, plus utilement intervenir.

Pour les parties demanderesses, par contre, cette irrégularité concernant l’identification et l’adresse complète de l’ensemble des parties intéressées ne touche pas à la recevabilité de recours mais est une question de mise en état.

Le Tribunal va trancher, rappelant la jurisprudence de la Cour de cassation, et particulièrement son arrêt du 26 octobre 1992 (Cass., 26 octobre 1992, J.T.T. 1993, 123), arrêt rendu sous l’empire des dispositions antérieures à la loi du 4 août 1996 mais reprises comme telles dans celle-ci. Pour la Cour suprême, il ne ressort d’aucune disposition légale que l’omission du dépôt in limine litis de l’identification et de l’adresse complète des parties intéressées entraîne à elle seule l’irrecevabilité de la demande à l’égard des parties intéressées qui sont, elles, régulièrement appelées à la cause. Les contestations à cet égard doivent être tranchées par le juge et il appartient à celui-ci d’ordonner le cas échéant la régularisation de la procédure afin que les parties qu’il estime intéressées puissent être dûment appelées. Il ne s’agit dès lors pas d’une question d’irrecevabilité. Le Tribunal relève en outre que pour le surplus il est satisfait aux conditions légales et réglementaires de recevabilité, la requête ayant été adressée par voie recommandée 13 jours après le scrutin et, ainsi, à fortiori avant le 13e jour suivant la date de l’affichage du résultat des élections.

Examinant la mise en état, le Tribunal relève encore un problème, étant qu’une des parties intéressées visées par les demanderesses est une organisation affiliée à une organisation représentative siégeant au CNT et que, si elle a présenté des candidatures, c’est en vertu d’un mandat qui lui a été donné par son organisation « mère ». Ce mandat n’implique pas le pouvoir de représenter la mandante en justice, à supposer, d’ailleurs, ainsi que le relève le tribunal, qu’un tel mandat puisse être délivré. Il y a dès lors lieu d’identifier comme partie intéressée l’organisation représentative « nationale ».

Enfin, le Tribunal va suivre la partie défenderesse en ce qu’elle a identifié comme autres parties intéressées d’une part les candidats effectifs et suppléants élus, dans la mesure où la rectification des résultats peut avoir pour conséquence de remettre en cause leur mandat et d’autre part le Directeur général de la Direction générale relations individuelles du travail du SPF Emploi, travail et concertation sociale, chargé des organes de participation. Ce dernier a également la qualité de partie intéressée dès lors qu’il doit être avisé des contestations des résultats communiqués. Le Tribunal relève encore que, en vertu de la loi du 4 décembre 2007 réglant les recours judiciaires introduits dans la cadre de la procédure relative aux élections sociales de l’année 2008 (art. 6), les jugements statuant sur les recours introduits contre les résultats des élections doivent lui être notifiés, ce qui confirme encore son intérêt à la cause.

En conséquence, le Tribunal va ordonner une réouverture générale des débats aux fins de mise en état sur les bases qui précèdent.

Intérêt de la décision

Cette décision règle deux questions délicates : la non identification de l’ensemble des parties intéressées lors du dépôt de la requête, ainsi que (et il s’agit là d’une erreur assez fréquente), l’obligation de mettre à la cause non pas une organisation affiliée à une organisation représentative au niveau national mais bien cette dernière, et ce même si c’est l’organisation membre qui a présenté les candidatures. Relevons encore l’admission, en qualité de parties intéressées, des candidats effectifs et suppléants élus ainsi que celle de la Direction générale relations individuelles du travail du SPF Emploi, travail et concertation sociale.


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