Terralaboris asbl

Reconnaissance de dettes

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 9 janvier 2009, R.G. 50.728W

Mis en ligne le vendredi 17 avril 2009


Cour du travail de Bruxelles, 9 janvier 2009, R.G. n° 50.728W

TERRA LABORIS ASBL – Sandra Cala

Dans un arrêt du 9 janvier 2009, la Cour du travail de Bruxelles, statuant sur des cotisations d’indépendant pour les années 1978 et 1979 confirme sa jurisprudence relative à l’inertie du demandeur en justice : s’il reste en défaut de diligenter la procédure, il y a faute dans son chef, constitutive d’un abus de droit.

L’objet du litige

Une Caisse d’assurances sociales pour travailleurs indépendants obtient en 1990 un jugement concernant des cotisations dues pour les années 1978 à 1986 dans le chef d’un travailleur indépendant. Il s’agit d’un montant de l’ordre de 1.850 €. La Caisse a exposé que les cotisations pour les années 1978 et 1979 étaient prescrites dans une note déposée devant le premier juge.

La position des parties en appel

La Caisse interjette, cependant, appel en 1998, indiquant que, contrairement à ce qu’elle a exposé au tribunal, les deux années en cause ne sont pas prescrites. Elle sollicite dès lors condamnation du travailleur indépendant à un complément.

La position de la Cour

La Cour constate tout d’abord que l’appel est recevable, dans le temps, au motif que le jugement n’a jamais été signifié et que le délai d’appel d’un mois, à partir de la signification (art. 792 du Code judiciaire), n’a ainsi pas commencé à courir et que, par ailleurs, en ce qui concerne l’intérêt, celui-ci est présent, la matière étant d’ordre public : la Caisse peut ainsi contredire ce qu’elle avait affirmé devant le premier juge.

En ce qui concerne le fond, la Cour retient que l’appel est fondé, l’intéressé ayant signé une reconnaissance de dette interruptive de la prescription (art. 1244 du Code civil). Le recouvrement des cotisations se prescrivant par cinq ans à compter du 1er janvier suivant l’année au cours de laquelle celles-ci sont dues, il y a interruption du fait de la reconnaissance de dette et, dans ce nouveau délai de cinq ans, la Caisse a lancé citation, interrompant ainsi une nouvelle fois la prescription. Cette interruption vaut pour la durée de l’instance, de telle sorte que la prescription n’est toujours pas acquise en 2009, moment où la Cour statue.

La Cour considère, dès lors, que les cotisations en cause ne sont pas prescrites et que le travailleur indépendant est tenu de les acquitter.

Cependant, elle relève que tant l’appel que le retard de paiement depuis le jugement du 2 août 1990 sont entièrement dus à la Caisse. Celle-ci a en effet exposé au premier juge qu’il y avait prescription, alors qu’il s’avère que tel n’est pas le cas. Il en découle, pour la Cour, que les dépens d’appel doivent être mis à charge de la Caisse.

Par ailleurs, elle relève que la Caisse a mis sept ans à faire appel (acte d’appel datant du 28 janvier 1998) et ensuite dix ans pour demander une date d’audience en appel. L’intéressé a payé la totalité des montants faisant l’objet de la condamnation prononcée par le jugement, soit plus de dix-sept ans auparavant. Il ne se déclare plus travailleur indépendant et comprend mal l’objet de l’appel de la Caisse. Si le paiement des cotisations se justifie aux motifs ci-dessus, la Cour rappelle que le créancier qui s’abstient de faire progresser la procédure commet une faute, et ce notamment lorsqu’il s’abstient de faire progresser une procédure d’appel due à sa propre attitude, alors que le débiteur, pour sa part, a payé l’entièreté de la condamnation prononcée contre lui par le premier juge. Tel ne serait pas le cas du débiteur qui s’abstiendrait de faire progresser la procédure : celui-ci ne commet en effet pas de faute, la Cour relevant qu’il peut choisir la défense qui lui paraît le mieux convenir à ses intérêts et notamment espérer que le créancier abandonne son action.

En conséquence, demander la condamnation du débiteur à des intérêts de retard est un abus de droit et la Cour limite le paiement de ceux-ci à la période écoulée entre la citation originaire et le jugement du tribunal, les intérêts reprenant à la date de réinscription de la cause au rôle et des conclusions déposées par la Caisse.

En ce qui concerne les majorations, la Cour condamne au paiement de celles-ci, constatant qu’elles sont dues du seul fait du non paiement des cotisations dans les délais légaux. Elle rappelle cependant la possibilité de renonciation par l’INASTI, dans les conditions de l’article 48 de l’arrêté royal du 19 décembre 1967 d’exécution de l’arrêté royal n° 38.

Intérêt de la décision

Après un bref rappel des règles d’interruption de la prescription, à l’occasion d’un cas pratique après une reconnaissance de dette, la Cour du travail de Bruxelles confirme sa jurisprudence en ce qui concerne l’inertie procédurale du demandeur : l’abus du droit constitué par celle-ci emporte la non débition des intérêts de retard pendant la période correspondante.

La Cour rappelle également que tel n’est pas le cas pour le défendeur qui s’abstient de diligenter la procédure.


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