Terralaboris asbl

Caractère involontaire du chômage et justification suffisante du défaut de présentation aux services de l’emploi

Commentaire de Trib. trav. Bruxelles, 27 juillet 2009, R.G. 1.977/08

Mis en ligne le vendredi 2 octobre 2009


Tribunal du travail de Bruxelles, 27 juillet 2009, R.G. n° 1.977/08

TERRA LABORIS ASBL - Sophie Remouchamps

Dans un jugement du 27 juillet 2009, le tribunal du travail de Bruxelles a repris les critères à retenir pour qu’il y ait justification suffisante, dans le chef d’un chômeur, de non présentation au service de l’emploi au sens de l’article 51 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991.

Les faits

Monsieur M. est invité par ACTIRIS en vu d’assurer le suivi de l’évolution de son projet professionnel. Un premier rappel infructueux lui est adressé, ainsi qu’un second rappel, celui-ci par voie recommandé. Il n’est pas réclamé.

Monsieur M. se voit alors exclure du bénéfice des allocations de chômage pour une période de treize semaines, au motif de non présentation auprès du service régional de l’emploi. La même décision du bureau de chômage l’exclut du bénéfice des allocations de chômage parce qu’il n’est plus inscrit comme demandeur d’emploi.

Pour l’ONEm, la sanction est justifiée, d’une part au motif qu’il s’agit d’une première infraction mais d’autre part vu que l’intéressé, admis sur la base de ses études, a déjà bénéficié de 1.200 allocations de chômage.

L’intéressé conteste la hauteur de la sanction et fait valoir, comme justification suffisante, des problèmes de réception de courrier.

L’avis de l’auditorat

L’auditeur du travail considère que les raisons invoquées, étant les problèmes de courrier, ne peuvent constituer une justification suffisante, le chômeur devant faire le nécessaire pour être en mesure de recevoir celui-ci. Cependant, vu qu’il y a évaluation positive de son comportement de recherche d’emploi et que les mesures nécessaires ont été prises (recours au service « muta-poste »), la sanction peut être ramenée à quatre semaines dont deux avec sursis.

La position du tribunal

Le tribunal rappelle les articles 44 et 51 § 1er de l’arrêté royal du 25 novembre 1991. Le second vise la possibilité d’exclure le chômeur du bénéfice des allocations s’il est ou devient chômeur par suite de circonstances dépendantes de sa volonté et, dans l’énumération de celles-ci l’arrêté royal vise le défaut de présentation sans justification suffisante au service de l’emploi et/ou de la formation professionnelle si le chômeur a été invité à s’y rendre.

Les sanctions sont reprises aux articles 52bis et 53bis du même arrêté, étant une sanction allant de 4 à 26 semaines avec possibilité pour le Directeur, sauf récidive, de se limiter à un avertissement ou de prévoir un sursis.

Pour le tribunal, dès lors que le chômeur méconnait son obligation de répondre à une convocation d’ACTIRIS, il peut et même doit être sanctionné, même si la sanction peut être limitée à un avertissement. L’article 51, § 1er de l’arrêté royal est en effet simple et, pour le tribunal, son application est pratiquement mécanique.

Il en va autrement si le chômeur établit l’existence d’une justification suffisante.

Le problème de courrier ne peut être retenu, au motif qu’il ne semble se poser que pour les correspondances émanant d’ACTIRIS ou de l’ONEm et non des autres expéditeurs institutionnels réguliers. Pour le tribunal par justification suffisante, il faut que rien – et en particulier aucun défaut d’attention – ne puisse être reproché au chômeur.

Cependant, l’ONEm ne peut faire valoir, dans l’appréciation de la sanction, des critères tels que la longueur du chômage et une admission sur la base des études.

Pour le tribunal la hauteur de la sanction doit être appréciée en tenant compte de tous les éléments de fait du contexte dans lequel elle a été prise et la durée du chômage ne peut être en elle-même une circonstance aggravante : elle ne peut impliquer une plus grande conscience de la part du chômeur de ses obligations. Tel n’aurait pas été le cas s’il s’était agi d’une obligation continue dans le chef du chômeur et que cette obligation aurait, du fait de la durée elle-même, été amenée à être gravée dans son esprit, son respect étant un réflexe. Dans cette hypothèse l’oubli éventuel ou le manquement pourrait être sanctionné plus lourdement.

Par ailleurs, l’admission sur la base des études n’est pas un critère permettant de déterminer la hauteur de la sanction, les dispositions en cause s’appliquant indistinctement à tous les chômeurs quelle que soit la base de leur admissibilité.

En revanche, doivent être pris en considération les appréciations d’ACTIRIS, puisqu’elles portent sur l’habilité particulière du chômeur à rechercher un emploi. En l’espèce, le comportement a été évalué de manière positive, et ce même en dehors d’une structure d’accompagnement.

Le tribunal en conclut que la sanction est trop lourde et est disproportionnée par rapport aux faits. La légèreté du comportement du chômeur ne permet cependant pas de limiter la sanction au minimum. Il conclut donc à l’application d’une sanction de 4 semaines.

Intérêt de la décision

Ce jugement du tribunal du travail de Bruxelles retient, parmi les critères adéquats pour la fixation d’une sanction suite à une non réponse à une convocation des services de l’emploi, celui qui est en fin de compte le plus approprié : le profil du chômeur dans sa recherche active d’emploi.

Le tribunal distingue encore parmi les comportements pouvant faire l’objet de sanctions la faute isolée et le comportement continu.


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