Terralaboris asbl

Accident du travail et indemnisation ultérieure en soins de santé et indemnités

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 23 février 2012, R.G. 2010/AB/1.008

Mis en ligne le vendredi 29 juin 2012


Cour du travail de Bruxelles, 23 février 2012, R.G. n° 2010/AB/1.008

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 23 février 2012, la Cour du travail de Bruxelles rappelle les règles applicables à l’indemnisation d’une incapacité du travail lorsque l’intéressé bénéficie déjà d’une rente en accident du travail.

Les faits

Suite à un accident du travail, une ouvrière bénéficie d’une rente annuelle de 10% dans le cadre d’une incapacité permanente partielle reconnue à partir de 2001. À l’époque, l’intéressée est reconnue en incapacité de travail depuis plusieurs mois et le sera encore pendant deux ans. Après une interruption de quelques mois, elle sera de nouveau admise pendant six mois.

L’intéressée conteste les décisions prises par son organisme assureur, d’une part, en ce qui concerne l’interruption de la reconnaissance en incapacité entre les deux périodes et d’autre part, en ce qui concerne la notification de fin d’incapacité.

Décision du tribunal du travail

Le tribunal désigne un expert. Celui-ci conclut à la réduction d’une capacité de gain au sens de l’article 100 de la loi coordonnée le 14 juillet 1994 et précise que ce taux (66%) tient compte de la lésion indemnisée dans le cadre de l’accident du travail. Suite à la contestation par l’organisme assureur selon laquelle il fallait apprécier le degré d’incapacité sans tenir compte du pourcentage de 10% reconnu en suite de l’accident du travail, une mission complémentaire est confiée au même expert, aux fins de préciser si le taux de plus de 66% en législation AMI est atteint indépendamment du taux reconnu en accident du travail.

Position de parties en appel

La travailleuse interjette appel, considérant que le premier juge a ajouté une condition à l’article 100, qu’il ne contient pas, à savoir que le taux de 66% doit s’apprécier indépendamment du taux admis en accident du travail.

L’intéressée reprend le texte de l’article 100, qui définit l’incapacité de travail et selon lequel celle-ci doit donc être évaluée uniquement à partir de la perte de capacité de gain. Il faut dès lors, pour elle, procéder en deux temps, étant d’abord de déterminer l’évaluation de l’incapacité (c’est-à-dire déterminer si celle-ci atteint 66% ou non) et, ensuite, sur le plan de l’indemnisation, tenir compte des limitations ou interdictions de cumul, selon la règle contenue à l’article 136, § 2 de la loi cordonnée.

Décision de la cour du travail

La cour suit la position d’appelante. Elle rappelle la méthode à suivre, étant qu’il faut apprécier l’incapacité de travail de 66% en tenant compte de l’ensemble des lésions et des troubles fonctionnels présentés, et ce quelle que soit leur origine. Sur le plan de l’indemnisation, si le pourcentage est atteint eu égard à l’existence d’autres pathologies, le cumul entre les rentes et les indemnités est autorisé. Par contre, si le taux n’est atteint qu’en tenant compte des séquelles de l’accident du travail, la rente due en accident du travail doit être déduite des indemnités AMI. La cour fait ici état d’un arrêt de la Cour de cassation du 5 octobre 1992 (Cass., 5 octobre 1992, RG 7911). Pour la cour, telle est la lecture qu’il convient de donner à l’article 136, §2 de la loi coordonnée. Celui-ci refuse les prestations lorsque le dommage (découlant d’une maladie, de lésions, de troubles fonctionnels ou du décès) est effectivement réparé en vertu d’une autre législation, qu’elle soit belge ou étrangère, le droit commun étant inclus. Si ladite réparation est inférieure aux prestations dues en soins de santé et indemnités, le bénéficiaire a droit à la différence à charge de l’assurance.

La cour considère que tel est le cas en l’espèce, puisqu’il y a octroi d’une rente de 10% en accident du travail. Le montant des indemnités AMI doit dès lors être diminué de celui perçu en réparation de l’accident. En conséquence, la cour du travail fait droit à l’appel et conclut au droit pour l’intéressée de percevoir les indemnités de l’assurance indemnités sous déduction de la rente en accident du travail.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour du travail de Bruxelles rappelle les règles d’indemnisation dans l’hypothèse où existent plusieurs pathologies, dont l’une, en l’occurrence, consécutive à un accident du travail.

Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, le cumul des prestations prévues en AMI et de celles dues en vertu d’une autre législation ne s’applique que si les prestations et indemnités couvrent le même dommage ou la même partie du dommage. Dans l’arrêt du 5 octobre 1992 cité (ainsi que dans celui du 18 mai 1992, R.G. n° 7812), la Cour de cassation a considéré que les indemnités d’incapacité de travail allouées dans le cadre de la législation AMI et les indemnités perçues en vertu de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail couvrent le même dommage.


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