Terralaboris asbl

Chômage : conditions d’exercice d’une activité accessoire et/ou d’une activité occasionnelle

Commentaire de C. trav. trav. liège, sect. Namur, 22 novembre 2011, R.G. 2010/AN/224

Mis en ligne le mercredi 11 juillet 2012


Cour du travail de Liège, section de Namur, 22 novembre 2011, R.G. n° 2010/AN/224

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 22 novembre 2011, la Cour du travail de Liège, sect. Namur, rappelle les principes guidant l’exercice d’une activité autorisée pendant une période de chômage (activité accessoire et/ou activité occasionnelle).

Les faits

Un bénéficiaire d’allocations de chômage s’est vu autoriser à exercer une activité accessoire d’indépendant (aide-comptable). Suite à un contrôle, il est amené à décrire l’ampleur de cette activité, qu’il affirme exercer le soir et le dimanche pendant la journée. Le samedi, il suit des cours de formation pour devenir comptable. Il déclare se rendre parfois en journée auprès de la société comptable pour laquelle il preste (essentiellement) aux fins d’aller chercher les dossiers. Il déclare que, dans son esprit, faire ceci en journée pendant les heures d’ouverture des clients n’impliquait pas une prestation mais un simple déplacement. Il fait valoir sa bonne foi. Il déclare également avoir travaillé avant dix-huit heures mais à titre exceptionnel, ainsi que le dimanche (soit 25 dimanches au total) sur un marché régional où il vendait des bijoux. Il déclare que, depuis l’époque des faits, il travaille deux jours par semaine et biffe sa carte de contrôle pour ces journées.

Il s’avère, au cours de l’enquête de l’auditorat, que les stagiaires comptables sont tenus d’effectuer des prestations à raison de 200 jours pendant une période allant de 12 à 36 mois ainsi que de suivre une formation permanente de 40 heures, dans le cadre de séminaires obligatoires qui se tiennent le samedi matin.

Pour l’ONEm cependant, il y a exercice de travail sans que la carte de contrôle n’ait été biffée. L’ONEm retient l’intention frauduleuse et l’exclut pour une période de près de trois années, l’indu étant supérieur à 25.000€. Une sanction de 26 semaines est également décidée.

Décision de la cour du travail

La cour est saisie d’un appel de l’intéressé, qui a vu le tribunal du travail confirmer la décision administrative dans toutes ses dispositions.

Le chômeur soulevant, d’abord, un argument tiré de la non-motivation de la décision, au sens de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, la cour rappelle les principes applicables aux sanctions administratives et constate que, en l’espèce, la décision apparaît suffisamment claire et précise en fait et en droit pour que l’intéressé ait pu en mesurer les termes. La motivation suffisante est dès lors retenue par la cour tant en ce qui concerne la décision elle-même que l’importance de la sanction.

La cour en vient, ainsi, aux conditions d’exercice d’une activité accessoire et d’une activité occasionnelle.

Elle relève à juste titre qu’il faut distinguer les deux situations. L’exercice de l’activité accessoire implique la perception des allocations de chômage en ce compris pour les journées d’activité, de telle sorte qu’il n’y a pas lieu de biffer la carte de contrôle. En cas d’activité occasionnelle, par contre, activité qui ne doit pas être déclarée et faire l’objet d’une autorisation, il y a renonciation au droit aux allocations de chômage pour les journées où un travail est effectué et dans cette hypothèse la carte doit être régulièrement biffée avant le début de l’activité. En cas d’activité déclarée et dûment autorisée, l’on ne peut déduire de l’article 71 de l’arrêté royal que le montant des allocations serait, en sus, susceptible de faire l’objet d’une diminution tenant compte des revenus tirés de l’activité, car il y aurait traitement discriminatoire et au surplus inconciliable avec l’article 48 (notamment) de la réglementation. Le chômeur qui aurait déclaré son activité et en respecterait les conditions de l’autorisation se verrait, ainsi, mis dans la même situation que celui qui ne l’a pas fait et, en sus, il perdrait non seulement le droit à l’allocation journalière pour le jour d’activité concerné mais également verrait les autres allocations réduites eu égard aux revenus perçus.

La cour rappelle ensuite les conditions mises à l’exercice de l’activité accessoire en tant que travailleur indépendant pour compte propre : (i) il faut en faire la déclaration lors de la demande sous peine de perdre le droit aux allocations perçues, (ii) cette activité accessoire doit avoir été exercée avant la première demande d’allocations de chômage, (iii) cette activité doit être exercée principalement entre 18 heures et 7 heures, limitation qui ne s’applique pas aux samedis et dimanches, pendant lesquels l’activité peut être exercée même en-dehors de la plage horaire autorisée (la cour précisant que les termes utilisés, étant que l’activité doit s’exercer principalement pendant la plage horaire, autorisent dès lors l’exercice occasionnel en-dehors de celle-ci, c’est-à-dire à titre exceptionnel) et (iv) la réglementation contient des dispositions spécifiques à certaines d’activité.

Après avoir rappelé les règles en matière de charge de la preuve et de récupération, la cour examine les éléments de l’espèce, étant que l’activité de comptable a été exercée en tant qu’activité accessoire et non occasionnelle. Le fait d’aller chez quelques rares clients prendre des dossiers à traiter en fin de journée, ainsi que de donner quelques coups de téléphone est considéré, pour la cour, comme une activité limitée rendue nécessaire par les heures d’ouverture des bureaux. Le chômeur a dès lors exercé principalement son activité dans la plage horaire autorisée et il n’y a ni fausse déclaration ni contravention à l’autorisation donnée. La décision d’exclusion et de récupération sur cette base n’est dès lors pas correcte et doit être réformée.

En ce qui concerne, par contre, l’activité de vente de bijoux sur un marché le dimanche, il s’agit d’une activité occasionnelle. Celle-ci ne doit pas être déclarée préalablement mais le chômeur qui l’exerce doit préalablement biffer sa carte de contrôle et renoncer de ce fait aux allocations correspondantes. En l’espèce, ceci n’a pas été fait et la cour constate que la récupération doit intervenir mais être limitée aux journées travaillées (article 169, alinéa 3 de l’arrêté royal).

Enfin, en ce qui concerne la sanction administrative la cour retient qu’il s’agit d’une activité qui s’est déroulée sur 26 jours en deux ans et qu’il s’agit d’une première infraction. La sanction est dès lors ramenée à deux semaines.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour du travail de Liège, sect. Namur, rappelle la distinction entre l’activité accessoire et l’activité occasionnelle en faisant un rappel très utile des règles concernant d’une part les obligations du chômeur dans l’un et l’autre cas et d’autre part les sanctions applicables en cas d’infraction.


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