Terralaboris asbl

La rente de veuve peut-elle être accordée dans le cas d’une cohabitation légale conclue en droit étranger ?

Commentaire de C. trav. Mons, 26 novembre 2012, R.G. 2009/AM/21.615

Mis en ligne le mardi 22 janvier 2013


Cour du travail de Mons, 26 novembre 2012, R.G. n° 2009/AM/21.615

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 26 novembre 2012, la Cour du travail de Mons conclut que, à défaut pour un état étranger d’avoir institué un régime de cohabitation légale superposable à celui existant en droit belge, la rente de veuve due en application de l’article 33 des lois coordonnées ne peut être postulée.

Les faits

Une personne de nationalité polonaise sollicite auprès du Fonds des maladies professionnelles l’octroi d’une rente de veuve. Elle s’est mariée le 10 mai 2005 avec un citoyen polonais. Celui-ci est décédé le 10 décembre 2005.

La rente est demandée par application de l’article 33 des lois coordonnées le 3 juin 1970.

Elle va bénéficier, suite à une décision de l’Office national des pensions, d’une pension de survie temporaire pour une année (2006).

Un recours est introduit contre les deux décisions.

Décision du tribunal du travail

Par jugement du 4 juin 2008, le Tribunal du travail de Mons déboute l’intéressée de son recours en matière de rente de veuve, au motif du non respect de la condition d’un an de mariage à la date du décès. Le recours contre l’ONP est renvoyé au rôle.

L’intéressée interjette appel, essentiellement sur la question de la rente de veuve.

Moyens des parties devant la cour

L’appelante considère que l’article 33 des lois coordonnées le 3 juin 1970 renvoyant à la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail, elle est en droit de bénéficier de ladite rente. Elle rappelle que cette allocation annuelle, de 30% de la rémunération de base, est accordée au conjoint non divorcé ni séparé de corps au moment de l’accident ou à la personne qui cohabite légalement avec la victime au moment de son décès. Ce droit est soumis à la condition que le mariage ou le contrat de cohabitation légale ait été conclu au moins un an avant le décès de la victime. Le mariage n’ayant pas eu la durée d’un an, elle se fonde sur la situation du cohabitant légal. Elle verse au dossier un contrat datant de janvier 2003, contrat qui remplit ainsi la condition de durée.

Quant au FMP, il conteste que le contrat déposé réponde aux conditions légales. S’il admet que les articles 28 et 29 du Code de droit international privé sont respectés, il y a cependant non respect de l’article 33, 5° des lois coordonnées le 3 juin 1979, étant que l’acte en cause ne contient aucune obligation en matière de devoir de secours entre parties. La loi belge prévoit, en effet, que par cohabitation légale, il faut entendre la cohabitation de deux partenaires qui ont établi un contrat, conformément à l’article 1478 du Code civil et qui contient un devoir de secours, devoir qui peut avoir des conséquences financières même après la rupture du contrat. La définition du contrat de cohabitation légale reprend les mêmes exigences.

Décision de la cour du travail

Dans une très brève motivation, la cour renvoie à l’information de l’auditorat général. Celui-ci a en effet investigué d’initiative dans le droit polonais et l’information instruite conclut que l’institution de la cohabitation légale n’existe pas dans ce système juridique. Pour la cour, il n’y a pas, dès lors, d’effets juridiques superposables à ceux des articles 1475 à 1479 du code civil.

En conséquence, le critère de la cohabitation légale n’étant pas envisageable, seul celui du mariage devait intervenir et, dans celui-ci, il n’est pas contesté que la condition d’un an n’est pas remplie.

La cour confirme dès lors le jugement.

Intérêt de la décision

Cette décision rappelle d’une part que la rente de veuve prévue par l’article 33 des lois coordonnées en matière de maladie professionnelle permet l’octroi de la rente non seulement au conjoint non divorcé ou non séparé de corps au moment de l’accident, mais encore au cohabitant légal, à la condition que celui-ci cohabite avec la victime au moment du décès. Dans l’hypothèse où la victime, incapable de travailler, était déjà admise au bénéfice de la réparation légale en matière de maladie professionnelle, une exigence est posée quant au mariage ou au contrat de cohabitation légale, étant qu’ils doivent être contracté ou intervenu au moins un an avant le décès de la victime.

La matière étant d’ordre public, la cour vérifie en l’espèce si, dans l’hypothèse où est présenté un contrat de cohabitation intervenu dans le cadre d’un droit étranger, celui-ci est conforme aux dispositions équivalentes en droit belge. En l’occurrence, la cour conclut à l’absence d’institution juridique similaire et donc d’effets juridiques superposables et rejette la demande.


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