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Effets de la révocation d’un commun accord du congé donné par l’employeur

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 19 février 2013, R.G. 2011/AB/800

Mis en ligne le mardi 1er octobre 2013


Cour du travail de Bruxelles, 19 février 2013, R.G. n° 2011/AB/800

TERRA LABORIS ASBL

Dans un arrêt du 19 février 2013, la Cour du travail de Bruxelles rappelle que, si le congé est un acte unilatéral irrévocable, il peut être révoqué d’un commun accord des parties et peut être ensuite rompu par tout autre mode de rupture.

Les faits

Un employé, engagé dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée, se voit licencié avec paiement d’une indemnité compensatoire de préavis. L’employeur lui en annonce le paiement dans la notification de rupture de contrat. Cette notification étant intervenue par lettre remise à l’employé, les parties se concertent et le même jour signent ensuite une convention de rupture d’un commun accord.

Celle-ci acte la fin du contrat à la même date et précise que la rupture ne sera accompagnée ni d’un préavis à prester ni du paiement de l’indemnité correspondante. La convention contient également une renonciation des parties à se prévaloir de tout droit né ou à naître en raison ou à l’occasion des relations de travail.

Plusieurs mois plus tard, l’intéressé réclame, via son organisation syndicale, l’indemnité compensatoire de préavis correspondante. Vu le refus de la société, il introduit un recours devant le Tribunal du travail de Nivelles, recours auquel celui-ci fait droit.

Appel est interjeté par la société.

Décision de la cour

Dans un bref arrêt, la cour du travail rappelle la jurisprudence de la Cour de cassation en la matière. Il est exact que le congé est un acte unilatéral irrévocable, étant que la notification de la décision de mettre fin au contrat de travail emporte aussitôt rupture et que celle-ci ne peut être révoquée sans l’accord du contractant (la cour renvoyant à l’arrêt de la Cour de cassation du 12 septembre 1988, R.G. 6230). Quant aux règles en matière de préavis, si celles-ci ne sont pas respectées, la rupture intervient avec effet immédiat et une indemnité compensatoire est due.

Cependant, comme le rappelle la cour, en vertu du principe de l’autonomie des volontés, il peut être décidé par les parties de révoquer ce congé. Cette révocation doit cependant intervenir d’un commun accord. Le contrat de travail se poursuit dès lors et les parties peuvent ensuite convenir d’un autre mode de rupture. La cour renvoie ici à un arrêt de la Cour de cassation du 28 janvier 2002 (Cass., 28 janvier 2002, R.G. S.00.0014.F).

La cour examine les circonstances de l’espèce et constate que, après la notification du congé donné par la société, une convention a été conclue, étant un accord des parties sur d’autres conditions de rupture. Pour la cour, il y a expression claire de la volonté des parties de mettre fin au contrat sans indemnité. Cette révocation du congé, intervenue d’un commun accord, est dès lors valable et les parties étaient libres, ensuite, de rompre le contrat de travail d’un commun accord et sans indemnité.

La cour conclut que, vu la révocation du congé, l’employé ne peut pas prétendre à une indemnité compensatoire de préavis qui découlerait de celui-ci.

Elle réforme dès lors le jugement du tribunal du travail.

La société ayant, pour sa part, introduit une demande reconventionnelle en abus de droit, la cour la déboute, cependant, de celle-ci au motif que chacun a le droit de saisir la justice. Elle reprend ici également la jurisprudence de la Cour de cassation en matière d’abus de droit (Cass., 31 octobre 2003, R.G. C.02.0602.F), selon laquelle il y a abus de droit d’agir en justice si le demandeur a exercé son droit d’une manière qui excède manifestement les limites de l’exercice normal de ce droit par une personne prudente et diligente. En l’occurrence, cet abus de droit n’existe pas.

Intérêt de la décision

Cet arrêt est l’occasion de rappeler le cas de figure tranché par la Cour de cassation dans son arrêt du 28 janvier 2002 auquel la cour du travail se réfère, étant que dès lors qu’un congé est donné, même s’il a un caractère irréversible, il peut être révoqué d’un commun accord par les parties et celles-ci peuvent ensuite soit reprendre normalement l’exécution du contrat de travail soit décider d’un autre mode de rupture.

En l’occurrence est dès lors valable, au vu des principes ci-dessus, la convention de rupture du contrat d’un commun accord sans paiement d’une indemnité compensatoire de préavis.

Les éléments de fait sont manquants, dans ce cas d’espèce, pour déterminer s’il n’y aurait pas eu un vice de consentement. En tout cas, celui-ci n’a pas été plaidé. Rappelons que la violence morale exercée sur le travailleur pour qu’il renonce à certains droits, précisément dans l’hypothèse de la rupture du contrat, peut être invoquée au titre d’élément susceptible de vicier le consentement du travailler et, dès lors, d’écarter l’engagement qui aurait été pris suite à celle-ci.


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