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Calcul de l’allocation pour l’aide aux personnes âgées : prise en compte des revenus de cession de biens immeubles

Commentaire de C. trav. Liège, sect. Liège, 9 décembre 2013, R.G. 2013/AL/404

Mis en ligne le jeudi 12 juin 2014


Cour du travail de Liège, 9 décembre 2013, R.G. n° 2013/AL/404

TERRA LABORIS ASBL

Dans un arrêt du 9 décembre 2013, la Cour du travail de Liège reprend les conditions dans lesquelles les dettes peuvent être considérées comme déductibles en cas de cession de biens immobiliers précédant une demande d’octroi d’allocations aux personnes handicapées.

Les faits

Un couple divorce dans un climat de conflit. Dans le cadre de celui-ci, diverses opérations financières interviennent (achats et ventes de biens) dont la répartition est effectuée entre eux en 2008. Quatre ans plus tard, une allocation d’intégration est accordée à l’ex-épouse et, un mois plus tard, une allocation pour l’aide aux personnes âgées de 2e catégorie. L’octroi est partiel, tenant compte des ressources déductibles et notamment du produit de la cession d’un bien immobilier.

Une procédure oppose l’intéressée au Service. Le Tribunal du travail de Verviers rend un jugement le 7 juin 2013, dans lequel il considère que les dettes que l’intéressée veut imputer sur le produit de la cession sont des dettes du conjoint et des dettes personnelles.

Appel est interjeté.

Décision de la Cour

La cour est amenée à reprendre les règles relatives au calcul de l’allocation pour l’aide aux personnes âgées, et ce à partir de l’article 7, § 1er de la loi du 27 février 1987, fixant les règles en matière de revenus. Un arrêté royal du 5 mars 1990 prévoit que tous les revenus, quelles qu’en soit la nature ou l’origine, dont dispose la personne handicapée et le cas échéant la personne avec laquelle elle forme un ménage sont pris en considération. En ce qui concerne les capitaux mobiliers (placés ou non), il est porté en compte une somme égale à 6% de ceux-ci. Un revenu forfaitaire est par ailleurs retenu en cas de cession des biens eu égard à la valeur vénale de ceux-ci. Ceci vise les cessions intervenues au cours des dix années qui précèdent soit la date de prise d’effet de la demande d’allocations, soit le mois qui suit le fait donnant lieu à la revision d’office (article 23, § 1er à § 1ter de l’arrêté royal du 22 mai 2003).

La cour énonce ensuite le principe selon lequel contrairement au calcul de l’octroi en matière d’allocation d’intégration il est, pour l’aide aux personnes âgées, tenu compte des revenus réels à la date de l’octroi et non des revenus taxés par l’administration compétente les années précédentes.

S’il y a eu cession de biens immeubles, il faut tenir compte de ceux cédés tant par la personne handicapée que par la personne avec laquelle elle forme un ménage. Pour ce qui est de la valeur vénale de ceux-ci, il faut multiplier cette valeur par la fraction exprimant l’importance des droits.

La cour reprend ensuite l’arrêt de la Cour de cassation du 22 février 1999 (Cass., 22 février 1999, n° S.98.0049.N), selon lequel s’il y a eu donation par les deux conjoints dans les 10 ans qui précèdent l’octroi s’agissant d’un bien immobilier indivis et que le conjoint décède avant la demande d’octroi, ce n’est pas l’intégralité de la valeur du bien qui doit être prise en compte mais la moitié. La fraction qui va exprimer l’importance des droits est de 50% de cette valeur.

S’il y a décès et que le bien avait été cédé à titre gratuit, s’agissant d’un bien dont l’intéressé était seul propriétaire, il n’y a par contre pas lieu de tenir compte du produit de la cession.

En ce qui concerne les dettes, l’on déduit tant les dettes personnelles que celles de la personne avec laquelle il y a ménage et qui sont à la fois antérieures de la cession et éteintes à l’aide du produit de celle-ci. Elles viennent ainsi en déduction de la valeur vénale des biens cédés.

La cour revient ensuite sur d’autres conditions : pour être considérée comme antérieure à la cession, il n’est pas requis que la dette ait été exigible à la date de celle-ci, dans la mesure où elle a été contractée avant elle.

En ce qui concerne les dettes en cause, il peut s’agit de frais de notaire, d’une commission d’agence, de frais de mesurage, de transfert d’hypothèque, ou encore de la facture de l’agent immobilier.

En l’espèce, la cour examine les dettes visées et, la fille du couple étant intervenue aux fins de prendre certains montants en charge, la cour retient que la somme qui a été versée par celle-ci pour acquérir lesdits biens au profit de ses parents constitue une dette de l’appelante, dette commune aux deux ex-époux.

Elle effectue dès lors le calcul sur la base de l’ensemble des éléments produits et accueille l’appel en ce qui concerne le montant de l’allocation, un octroi subsistant à raison de 1.500€.

La cour va, dans un second temps, examiner un autre point, étant de savoir si, dans la mesure où l’attestation générale ne se prononce pas sur la capacité de gain, et donc sur les avantages sociaux et fiscaux y liés, la personne handicapée peut étendre sa demande à ceux-ci, non octroyés par la décision en cause.

Pour la cour, une perte d’autonomie de 9 points a été admise et elle peut ouvrir le droit aux avantages en cause. Il y a dès lors lieu d’examiner la demande. La réduction d’impôts sur les revenus et sur le précompte immobilier nécessite, en effet, la reconnaissance de 66% de réduction de capacité ou une réduction d’autonomie d’au moins 9 points. Ceux qui en justifient peuvent, même si la demande n’a pas été introduite avant l’âge de 65 ans, se prévaloir du droit à l’obtention des avantages fiscaux, ce qui n’est pas le cas de ceux dont le seuil atteint les 66% ou les 9 points après l’âge de 65 ans à la suite, exclusivement ou pour partie, de faits survenus postérieurement à cet âge.

La cour va, sur cette question, ordonner une expertise, dans la mesure où l’intéressée doit établir que, si le seuil des 66% ou des 9 points est atteint, c’est une conséquence de faits antérieurs à la date de ses 65 ans.

Or, elle se fonde sur un accident survenu auparavant et les documents médicaux déposés permettent de retenir que l’aggravation constatée pourrait être liée à l’accident. La cour considère dès lors devoir être éclairée davantage sur les suites directes de celui-ci.

Intérêt de la décision

Cet arrêt rappelle, en des termes clairs, le mode de prise en compte des revenus de cessions dans le calcul de l’allocation pour l’aide aux personnes âgées. Il renvoie à de nombreuses décisions de jurisprudence sur la notion de dettes à prendre en cause, dettes ayant pu être apurées avec le produit des cessions.


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