Terralaboris asbl

Taux d’intérêt applicable au remboursement des cotisations sociales

Commentaire de Cass., 6 janvier 2014, n° S.12.0067.F

Mis en ligne le jeudi 12 juin 2014


Cour de cassation, 6 janvier 2014, n° S.12.0067.F

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 6 janvier 2014, la Cour de cassation a rejeté un pourvoi contre un arrêt du 4 mai 2011 de la Cour du travail de Bruxelles qui avait tranché la question du taux d’intérêt applicable aux dettes de cotisations sociales, rappelant l’objectif de la loi-programme du 8 juin 2008.

Rétroactes

En cette affaire, l’O.N.S.S. avait entrepris de poursuivre en paiement de cotisations à l’égard d’une société, vu le paiement d’indemnités de non-concurrence ainsi que d’autres montants (primes). Une procédure fut introduite par la société, qui fit cependant un paiement important dès la réclamation de l’Office, et ce afin de ne pas alourdir sa dette.

En degré d’appel, la Cour du travail de Bruxelles rendit deux arrêts, le premier portant sur la non-débition de cotisations de sécurité sociale sur les indemnités de non-concurrence (arrêt du 9 juin 2010). Dans un second arrêt du 4 mai 2011, la cour tranche la question du taux applicable au montant remboursé à la société.

La question débattue est de savoir s’il faut appliquer le taux de 7% à partir du 1er janvier 2007 (les parties marquant accord sur l’application de ce taux pour la période antérieure) ou s’il faut se référer au taux de l’intérêt légal en vigueur en matière civile et commerciale.

En effet, la loi-programme du 27 décembre 2006 (qui a modifié la loi du 5 mai 1865) avait prévu une période de deux ans (correspondant aux années 2007 et 2008), pour lesquelles le taux d’intérêt était maintenu à 7%. Ultérieurement, cependant, de nouvelles mesures ont été prises et figurent dans la loi-programme du 8 juin 2008, qui a voulu mettre fin à la discussion concernant la notion d’intérêt légal. Le texte considère que le terme « intérêt légal » figurant dans la loi du 27 juin 1969 (article 28, § 1er, alinéa 2) a la même signification que dans la loi du 5 mai 1865 (article 2, § 2).

Dans l’arrêt du 4 mai 2011, la Cour du travail de Bruxelles avait considéré qu’il n’était pas anormal que le taux d’intérêt à appliquer aux dettes de cotisations soit plus élevé que celui du remboursement des cotisations payées indûment, au motif que les débiteurs de cotisations sociales sont nombreux et que le recouvrement touche aux intérêts essentiels du financement de la sécurité sociale.

La cour relève cependant qu’à partir du 1er janvier 2009, le taux d’intérêt légal en matière sociale est fixé à 7%, la nouvelle disposition introduite étant plus large que la disposition précédente, en ce qu’elle vise l’ensemble des matières sociales et non plus uniquement les dettes de cotisations sociales. Dès lors, ce taux doit trouver à s’appliquer au remboursement des cotisations payées indûment. La cour fixe dès lors les taux d’intérêt comme suit : (i) 7% jusqu’au 31 décembre 2006, (ii) 6% en 2007 et 7% en 2008 (article 2, § 1er de la loi du 5 mai 1865) et (iii) 7% à partir du 1er janvier 2009 (article 2, § 3 de la loi du 5 mai 1865).

L’arrêt de la Cour de cassation

L’O.N.S.S. s’est pourvu en cassation contre cet arrêt. Il considère essentiellement, dans son pourvoi, que le taux d’intérêt légal en matière sociale n’est applicable qu’aux cotisations qui ne sont pas versées à l’Office dans les délais et qu’il ne se conçoit pas, pour les remboursements dus par lui, que l’on applique un taux d’intérêt prévu pour assurer l’encaissement régulier des cotisations sociales, le remboursement de ces cotisations indues n’ayant par ailleurs pas la nature d’un paiement en matière sociale, mais s‘apparentant à une répétition de l’indu au sens de l’article 1235 du Code civil. L’Office demande dès lors que soit appliqué le taux d’intérêt en matière civile fixé par l’article 2, § 1er de la loi du 5 mai 1865.

La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle considère en effet que le texte actuel de l’article 2 de la loi du 5 mai 1865 relative au prêt à intérêt dispose (article 2, § 3, alinéa 1er) que le taux d’intérêt légal en matière sociale est fixé à 7% même si les dispositions sociales renvoient au taux d’intérêt légal en matière civile et pour autant qu’il n’y soit pas explicitement dérogé dans les dispositions sociales notamment dans la loi du 27 juin 1969. Le texte prévoit également que ce taux peut être modifié par arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres (alinéa 2). Il y a, dans cette loi, une dérogation expresse pour ce qui est des dettes de cotisations de sécurité sociale. Elle vise l’employeur qui ne verse pas les cotisations dans les délais fixés par le Roi (prévoyant d’ailleurs un taux de 7% pour l’intérêt de retard). La Cour constate qu’il n’y a pas d’autres dérogations expresses dans les dispositions sociales, de telle sorte qu’il faut appliquer l’article 2, § 3 de la loi du 5 mai 1865 au remboursement des cotisations indues, et ce quel que soit le fondement de l’action en répétition.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour de cassation met un terme définitif à la question qu’avait tranchée la Cour du travail de Bruxelles. Le remboursement des cotisations versées indûment est dès lors soumis au taux d’intérêt applicable dans les matières sociales et non en matière civile et commerciale.


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