Terralaboris asbl

Etendue des droits des coopérants aux allocations de chômage

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 20 février 2008, R.G. 45.197

Mis en ligne le lundi 14 juillet 2014


Cour du travail de Bruxelles, 20 février 2008, R.G. n° 45.197

TERRA LABORIS ASBL

Dans un arrêt du 20 février 2008, la Cour du travail de Bruxelles a considéré que n’est pas discriminatoire le fait que les coopérants voient leurs allocations de chômage calculées sur le salaire brut de référence minimum et non sur leur rémunération réelle.

La position du litige

La Cour a rendu, en la cause, un premier arrêt en date du 25 octobre 2006. Elle y avait considéré que la loi du 20 juillet 1991 (loi portant des dispositions sociales et diverses) se superpose, le cas échéant, aux systèmes existants destinés à adoucir les conséquences sociales de la rupture, dès l’instant où les coopérants ont droit aux allocations de chômage. Pour la Cour, le problème posé est celui de l’égalité des Belges devant la loi, question qui l’a amenée à vouloir vérifier si, concrètement, les agents de la coopération bénéficient automatiquement d’allocations de chômage à un taux moins élevé.

L’arrêt annoté est rendu dans le cadre de la réouverture des débats.

La positon des parties dans le cadre de la réouverture des débats

L’ONSS fait valoir que les agents de la coopération pour lesquels il demande les cotisations sociales ont perçu des allocations de chômage calculées sur un salaire brut de référence minimum, mais non sur leurs rémunérations réelles, comme s’il n’y avait pas eu de retenues ONSS pour le secteur chômage sur la rémunération payée aux agents pendant les six mois précédant celui-ci.

L’Etat belge fait, quant à lui, valoir la situation spécifique des coopérants, étant que l’agent qui demande sa réaffectation dans un service public peut demander à l’administration de garder cette demande en suspens de manière à rester le plus longtemps possible dans la position de maintien à disposition (position rémunérée mais sans prestations de travail). Il ajoute qu’il s’agit d’une pratique administrative sans base légale et que celle-ci augmente le risque de chômage si l’agent est réaffecté dans l’administration après l’expiration de la période de maintien à disposition.

La position de la Cour

La Cour reprend le mécanisme mis sur pied par l’arrêté royal du 10 avril 1967 portant statut du personnel de la coopération avec les pays en voie de développement. En vertu de celui-ci, les agents de la coopération ne sont pas assujettis, pendant leur période de service à l’étranger, à la sécurité sociale des travailleurs salariés, et ce parce qu’ils ne travaillent pas en Belgique. Ils sont cependant assujettis à la sécurité sociale d’Outre-Mer. Par contre, pendant leur période d’occupation sur le territoire national, ils sont soumis à la sécurité sociale des travailleurs salariés. Ils sont donc susceptibles de bénéficier d’allocations de chômage, et ce, dans certaines hypothèses, si à la fin de la période de maintien à disposition (position rémunérée intervenant à l’issue de chaque période de service), ils ne sont ni désignés pour une nouvelle période de service ni nommés dans une administration en Belgique.

Le travail fourni à l’étranger est pris en considération, parce qu’il l’a été dans un emploi qui donne lieu en Belgique à des retenues pour la sécurité sociale, en ce compris pour le secteur chômage.

Répondant aux arguments des deux parties, la Cour va conclure que le régime des agents de la coopération forme un système complet, non comparable à celui mis sur pied par la loi du 20 juillet 1991, qui a organisé l’assujettissement de certains agents du secteur public et de l’enseignement subventionné libre à l’assurance contre le chômage, à l’assurance maladie (secteur des indemnités) et à l’assurance maternité.

La Cour considère ainsi que si les cotisations sociales sont calculées sur le salaire brut de référence minimum et non sur la rémunération réelle, il n’y a pas de discrimination au niveau de la protection sociale en l’absence de service (puisqu’il y a maintien à disposition, allocations de chômage et faculté d’être nommé dans l’administration sans épreuve de recrutement). La cour voit ici un système complet non comparable au régime général. Elle ajoute que, même si les deux régimes étaient comparables, il n’y aurait pas de différence de traitement injustifiée et défavorable aux agents de la coopération.

Elle ajoutera encore que l’ONSS n’établit pas que dans les faits les agents ont bénéficié d’allocations de chômage calculées sur le salaire brut de référence minimum ; cette question, qui s’était posée précédemment, est ainsi évacuée dès lors que la Cour a pu procéder à la comparaison des deux régimes (A.R. du 10 avril 1967 et loi du 20 juillet 1991) et a abouti à la conclusion de l’absence de rupture d’égalité.

Intérêt de la décision

La question posée en cette affaire était classique : égalité des Belges devant une prestation de sécurité sociale. En comparant les deux régimes, la Cour dégage une solution d’absence de discrimination vu les autres avantages dont bénéficient les coopérants à cet égard.

La Cour du travail doit répondre ici à une question d’égalité entre travailleurs du service public, étant la catégorie particulière du personnel de la coopération dont le statut a été organisé par l’arrêté royal du 10 avril 1967. Pour la Cour, ce statut doit rester indépendant des dispositions mises sur pied par la loi du 20 juillet 1991 qui a étendu l’application des dispositions de certains secteurs de la sécurité sociale des travailleurs salariés à diverses catégories d’agents du service public et l’enseignement libre subventionné, vu sa spécificité : avantages particuliers et régime constituant un ensemble équilibré.


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