Terralaboris asbl

Incompatibilité entre les allocations de chômage et une convention de stage rémunéré

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 9 octobre 2014, R.G. 2013/AB/133

Mis en ligne le jeudi 22 janvier 2015


Cour du travail de Bruxelles, 9 octobre 2014, R.G. n° 2013/AB/133

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 9 octobre 2014, la Cour du travail de Bruxelles, statuant à propos d’un stage effectué dans le cadre de la formation permanente pour les classes moyennes et PME (stage rémunéré), rappelle les conditions dans lesquelles une formation professionnelle est considérée comme compatible avec la perception d’allocations de chômage.

Les faits

Un assuré social fait l’objet d’une décision de l’ONEm, l’excluant du bénéfice des allocations pour un nombre important de journées (articles 44, 45, 71 et 55 de l’arrêté royal) et ordonnant la récupération (article 169 de l’arrêté royal) d’allocations indues. La décision contient également une exclusion de 4 semaines au titre de sanction (article 154 de l’arrêté royal).

L’ONEm se fonde, pour les journées d’exclusion, sur l’exercice d’un travail salarié et la perception d’une rémunération.

Un recours est introduit par l’intéressé, qui, en outre, fait état d’une faute (défaut d’information et de conseil) de la part de son organisme de paiement.

Par jugement du 15 janvier 2013, le tribunal du travail confirme la décision de l’ONEm et déboute l’intéressé de sa demande.

Celui-ci interjette appel.

La décision de la cour

La cour se prononce essentiellement sur la question du cumul des allocations de chômage avec un stage rémunéré.

L’intéressé a effectué celui-ci dans une herboristerie.

La cour examine dès lors si celui-ci était autorisé, dans le cadre de la réglementation chômage.

Elle reprend, en premier lieu, les conditions fixées à l’article 92, § 1er de l’arrêté royal (et à l’article 19 de l’arrêté ministériel). Ce mécanisme prévoit que le chômeur complet peut être dispensé, à sa demande, de ses obligations pendant une période durant laquelle il suit une formation prévue par la législation relative à la formation à une profession indépendante. Une réserve figure dans l’article 92, § 1er de l’arrêté royal, étant que la dispense ne peut être accordée que pour une formation qui n’est pas donnée principalement le samedi ou après 17h00. Est exigée, en sus, l’introduction d’une demande de dispense préalablement à l’entame de cette formation.

Si le chômeur suit, dès lors, une formation professionnelle, les avantages qu’il perçoit dans le cours de celle-ci ne sont pas considérés comme une rémunération au sens de l’article 46, § 1er de l’arrêté royal. Il est également précisé dans l’arrêté ministériel que, pour satisfaire à cette condition, le chômeur doit préalablement avoir obtenu la dispense ci-dessus.

La cour constate qu’en l’espèce, l’intéressé a entamé les démarches requises dans le cadre de la formation elle-même (celle-ci étant d’ailleurs approuvée par la COCOF) et qu’une convention de stage a été signée, le stage étant effectué et rémunéré.

Il s’agit dès lors, manifestement, d’une formation visée par les dispositions ci-dessus. La cour ne peut dès lors que constater que le cumul n’aurait pu être autorisé que si une dispense avait été sollicitée préalablement, et que l’intéressé n’a pas effectué cette démarche. Dès lors que l’avantage accordé au travailleur dans le cadre de cette formation figure par ailleurs à l’article 46, § 1er, 6° de l’arrêté royal, il y a rémunération et celle-ci est incompatible avec les allocations.

La cour examine également si l’organisme de paiement a commis une faute, celle-ci étant double, pour l’intéressé, étant une absence d’information sur l’interdiction de cumul et l’autre consistant à avoir payé rétroactivement des allocations alors qu’il savait que l’intéressé n’y avait plus droit.

La première de ces fautes, vantée par l’assuré social, amène la cour à rappeler le principe selon lequel la responsabilité d’un organisme de paiement peut être mise en cause en cas de défaut d’information et même en cas de paiement indu. Pour que ceci puisse intervenir, l’organisme de paiement doit cependant avoir été mis en possession des éléments de fait lui permettant d’apprécier la situation en cause. La cour précise que cette information peut provenir du chômeur lui-même ou de tout tiers, dont l’ONEm, ce qui n’est pas établi en l’espèce.

Enfin, en ce qui concerne l’indu, la cour ne retient pas la bonne foi de l’intéressé, celui-ci ayant été au courant, ainsi qu’il ressort du dossier, de l’obligation de demander une dispense. Ceci écarte dès lors sa bonne foi et la cour confirme que la totalité de l’indu réclamé doit être remboursée.

Enfin, sur la sanction d’exclusion, elle rappelle que la fourchette est de 1 à 26 semaines et que la sanction appliquée est particulièrement modérée.

Intérêt de la décision

La règle rappelée par l’arrêt est claire : si une formation est envisagée, formation qui serait autorisée parce qu’abordée dans les hypothèses prévues dans la réglementation, l’obligation d’informer l’ONEm et d’obtenir une dispense est un préalable. Dès lors que cette dispense est admise, des avantages qui seraient perçus dans le cadre du stage effectué pour cette formation ne se voient pas considérés comme rémunération non cumulable avec l’octroi d’allocations. A défaut d’une telle dispense, la conclusion est évidente : il y a rémunération et les allocations doivent être récupérées.

L’on peut également rappeler, dans le cadre des situations prévues à l’article 46, § 1er, alinéa 1er, 6° de l’arrêté royal, que les hypothèses réglementaires concernent les avantages accordés dans le cadre d’une formation, d’études ou d’un apprentissage. Dans un arrêt du 22 septembre 2011 (C. trav. Brux., 22 septembre 2011, R.G. 2010/AB/152), la Cour du travail de Bruxelles avait rappelé que les juridictions n’ont pas de pouvoir d’appréciation quant à cette disposition et que, notamment, la modicité de l’avantage en cause ne peut intervenir. Aussi minime que soit l’indemnité, elle doit être considérée comme une rémunération au sens de l’article 44 de l’arrêté royal.

En outre, dans cette espèce tranchée par la cour du travail le 22 septembre 2011, non seulement l’intéressé n’avait pas bénéficié d’une dispense pour suivre la formation, mais celle-ci ne correspondait pas aux formations admises, étant qu’il ne s’agissait pas d’une formation organisée ou subventionnée par le service régional de l’emploi et de la formation professionnelle, d’une formation professionnelle individuelle en entreprise ou dans un établissement d’enseignement reconnu par ce service régional et agréé.


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