Terralaboris asbl

Les mesures concrètes reprises au contrat doivent être adéquates et pertinentes par rapport au projet professionnel de l’intéressé

Commentaire de Trib. trav. Charleroi, 16 février 2007, R.G. 66.629/R

Mis en ligne le mercredi 26 mars 2008


Tribunal du travail de Charleroi, 16 février 2007, R.G. 66.629/R

TERRA LABORIS ASBL – Sophie Remouchamps

Dans un jugement du 16 février 2007, le Tribunal du travail de Charleroi rappelle que les actions reprises au contrat conclu suite au premier entretien d’évaluation doivent être efficaces et adaptées au projet professionnel personnel du chômeur, lorsque la pertinence de celui-ci n’est pas remise en question par l’ONEm ou l’organisme de placement.

Les faits

Mme F., cuisinière, est convoquée pour un premier entretien dans le cadre du contrôle de la recherche active d’emploi le 3 février 2006. A cette occasion, elle précise rechercher un travail dans le secteur de la cuisine de collectivité et suivre un stage dans ce cadre.

Ses efforts de recherche d’emploi étant jugés insuffisants par le facilitateur, celui-ci lui impose un contrat, prévoyant 4 engagements stéréotypés, étant de (1) recontacter le FOREM en vue d’examiner son projet professionnel, les possibilités de formation et d’accompagnement, étant entendu qu’un entretien individuel est exigé, (2) apporter son CV et une lettre de motivation, (3) s’inscrire auprès de 3 agences d’intérim et (4) présenter spontanément sa candidature auprès de 10 employeurs potentiels. Pour ce dernier engagement, elle doit mentionner une liste des employeurs contactés avec, si possible, une attestation de l’employeur.

Elle est revue pour un deuxième entretien le 7 juillet 2006. Pendant la période, elle a contacté le FOREM, a fait des démarches auprès des employeurs (et obtenu ainsi 3 journées de travail). Elle ne s’est cependant pas inscrite auprès d’une agence d’intérim, celles-ci ne proposant pas d’emploi dans le secteur d’activité choisi par elle. Elle disposait par ailleurs de preuve de ses démarches et avait dressé la liste des employeurs potentiels qu’elle a contactés.

A l’issue du second entretien, le facilitateur estime qu’elle n’a pas respecté le contrat conclu, étant plus précisément les deux derniers engagements, vu l’absence d’inscription auprès d’une agence d’intérim et une insuffisance de preuve de recherches d’emploi spontanées.

Un nouveau contrat lui est alors imposé, tandis qu’une sanction de suspension pendant 4 semaines des allocations de chômage lui est notifiée en date du 13 juillet 2006.

Mme F. introduit un recours à l’encontre de l’évaluation négative et de la mesure d’exclusion.

La décision du tribunal

Le Tribunal examine le respect du contrat conclu et estime que Mme F. a satisfait aux engagements y contenus.

Il relève en effet que l’action d’inscription auprès d’agences d’intérim était inefficace et inadaptée au projet professionnel de l’intéressée (le refus d’inscription ayant été vérifié par le facilitateur lors du second entretien), ce qui démontre un manque de rigueur dans le chef du facilitateur, qui n’a pas respecté son obligation de proposer des actions concrètes pour aider Mme F. dans sa recherche d’emploi.

Le Tribunal estime par ailleurs qu’il ne peut lui être reproché de ne pas s’être inscrite auprès des agences pour des postes différents de celui faisant partie de son projet professionnel vu d’une part que celui-ci n’a pas été remis en cause par l’ONEm ou le FOREM et d’autre part que le contrat ne prévoyait pas l’obligation d’inscription dans un autre secteur.

Quant à la preuve des candidatures spontanées (4e engagement), le Tribunal relève que le contrat ne lui imposait pas de prouver celles-ci mais de dresser la liste de leurs destinataires. Or, elle prouvait 4 recherches et avait effectivement dressé la liste des employeurs contactés.

La décision administrative est en conséquence annulée et l’évaluation jugée positive.

Intérêt de la décision

Ainsi que l’illustre ce jugement, l’appréciation effectuée par l’ONEm du respect des engagements repris au contrat fait l’objet d’une vérification par le Tribunal, eu égard au projet professionnel de l’intéressé.

Il rappelle par ailleurs au passage le rôle du facilitateur, qui n’est pas sensé prévoir des actions stéréotypées mais bien des actions concrètes, susceptibles d’aider le chômeur dans la recherche d’emploi, en fonction de son projet personnel (non remis en cause lors de la première évaluation). Il confirme ainsi que le projet professionnel est au centre de la recherche d’emploi elle-même.

NB : Cette jurisprudence risque d’être mise à mal par l’arrêt de la Cour de cassation prononcé le 9 juin 2008 (R.G. S.07.0082. F), qui estime qu’une fois le contrat signé, le chômeur (et le Tribunal à sa suite) ne peut affirmer que les engagements repris au contrat seraient inadéquats ou inadaptés.


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