Terralaboris asbl

Condition de répétition de l’indu en cas d’octroi d’un avantage accordé par un pays étranger

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 25 octobre 2007, R.G. 49.382

Mis en ligne le mercredi 26 mars 2008


Cour du travail de Bruxelles, 25 octobre 2007, R.G. n° 49.382

Asbl TERRA LABORIS – Sophie Remouchamps

Statuant après cassation, la Cour du travail de Bruxelles a rappelé comment est fixé le point de départ du délai de prescription de répétition d’un indu de pension dans l’hypothèse où un avantage étranger est accordé.

Les faits

Monsieur B. bénéficie d’une pension de retraite depuis le 1er janvier 1993, au taux ménage, pension allouée dans le régime salarié. Il bénéficie également d’une autre pension en régime indépendant, également au taux ménage.

Le 7 janvier 2000, son épouse introduit auprès du bourgmestre de sa commune une demande de pension de retraite à charge des Pays-Bas. Cette demande est transmise à l’organisme hollandais par les services de l’O.N.P.

Le 10 novembre 2000, l’Office informe Mme V. que sa demande de pension fait l’objet d’un examen dans le cadre des règlements européens et que les documents nécessaires ont été transmis.

Le 2 février 2001, l’institution hollandaise informe Mme V. qu’elle est en droit de bénéficier d’une pension à charge des Pays-Bas à partir de novembre 2001. L’organisme hollandais signale avoir transmis à cette même date sa décision à l’O.N.P.

Le 15 juin 2001, l’office transmet à Mme V. la décision prise par les autorités hollandaises.

Le 26 novembre 2001, l’O.N.P. réduit la pension de retraite de Monsieur B. vu la perception par l’épouse d’une pension néerlandaise. Il entend récupérer l’indu pour la période du 1er novembre 2000 au 31 octobre 2001.

L’intéressé forme recours contre la décision et contre la notification de la récupération de l’indu.

Décisions intervenues précédemment

Le tribunal du travail de Liège confirme la décision de l’O.N.P. par jugement du 17 février 2002 et, dans un second jugement, considère ensuite qu’il n’y a pas de prescription, au motif que celle-ci court à partir de la notification de la décision étrangère à l’intéressée (soit l’épouse), c’est-à-dire en l’espèce le 15 juin 2001.

Monsieur B. interjette appel et la Cour du travail va considérer, dans un arrêt du 19 avril 2005, que, lorsque l’indu de pension trouve sa source dans l’octroi d’un avantage étranger accordé au conjoint, le délai de prescription n’est pas celui prévu par l’article 21 § 3 al. 2 de la loi du 13 juin 1966 relative à la pension de retraite et de survie des ouvriers, des employés, des marins navigant sous pavillon belge, des ouvriers mineurs et des assurés libres. Pour la Cour, l’organisme payeur, en l’espèce l’O.N.P., qui doit opérer la récupération, n’est pas nécessairement averti de l’octroi étranger. La prescription de 6 mois doit débuter à compter de la date à laquelle le paiement indu a été effectué et non pas de celle de la notification de la décision étrangère à la personne intéressée par cet octroi et / ou à l’organisme payeur de cette personne.

Sur pourvoi de Monsieur B., la Cour de cassation va casser l’arrêt de la Cour du travail de Liège.

Dans un arrêt du 8 mai 2006 (S050092F), elle énonce que, lorsqu’un montant indu au titre de pension de retraite trouve son origine dans un avantage étranger, l’action en répétition de l’indu dans le chef de l’organisme de paiement, qui est le seul compétent pour exiger le remboursement, se prescrit par 6 mois à compter de la notification à celui-ci de la décision par laquelle l’avantage étranger est accordé. Pour la Cour, au sens de l’article 21 § 3 al. 2, pour que prenne cours le délai de prescription visé, l’organisme auquel doit avoir été notifiée la décision qui octroie l’avantage étranger d’où résulte un indu est l’organisme qui a procédé au paiement qui a acquis ce caractère indu, en raison de cet octroi et non l’organisme qui paie l’avantage étranger. La disposition légale prévoit, en effet, que, lorsque le paiement indu trouve son origine dans l’octroi ou la majoration d’un avantage accordé par un pays étranger ou d’un avantage dans un autre régime que ceux visés par la loi du 13 juin 1966, l’action en répétition se prescrit par 6 mois à compter de la date de la décision octroyant ou majorant les avantages précités.

Statuant, après renvoi, la Cour du travail de Bruxelles va, en conséquence, déclarer l’action de l’O.N.P. prescrite, ce qu’admettait, en fin de compte, l’Office vu la décision de la Cour suprême.

Les montants ayant été retenus d’office, la Cour prend acte de l’accord de l’Office de restituer le montant majoré des intérêts au taux légal depuis la date de la retenue.

Intérêt de la décision

L’intérêt de la décision réside dans la solution donnée par la Cour de cassation – et que la Cour reprend – sur l’article 21 § 3 al. 2. Rappelons que la Cour du travail de Liège avait considéré que la prescription prévue par celui-ci ne vise pas le cas où l’organisme payeur devant effectuer la récupération n’est pas celui qui doit être informé de l’octroi ou de la majoration de l’avantage étranger et/ou le bénéficiaire de l’indu n’est pas la personne intéressée par cet avantage ou octroi étranger. La Cour du travail de Liège avait ainsi écarté l’application de cette disposition, estimant que l’hypothèse visée n’était pas rencontrée en l’espèce. La Cour du travail de Liège avait dès lors envisagé les conditions d’application de l’alinéa 3 et avait ordonné sur cette question une réouverture des débats. La Cour de cassation a confirmé l’application de l’alinéa 2, ainsi que le fait qui fait courir le délai de prescription : il s’agit de la notification de la décision octroyant l’avantage étranger d’où résulte l’indu à l’organisme qui a procédé au paiement qui a acquis ce caractère indu.


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