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Utilisation en justice de « badges » internes à l’entreprise : un arrêt de la Cour du travail de Bruxelles

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 6 juillet 2021, R.G. 2018/AB/319

Mis en ligne le mardi 14 décembre 2021


Cour du travail de Bruxelles, 6 juillet 2021, R.G. 2018/AB/319

Terra Laboris

Dans un arrêt du 6 juillet 2021, la Cour du travail de Bruxelles examine au regard de la loi du 8 décembre 1992 et de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme la question de la licéité de la collecte d’informations via ‘badges’ internes à l’entreprise

Pour la cour, s’il est nécessaire pour un employeur de limiter l’accès de ses locaux au personnel autorisé afin de garantir sa sécurité et l’intégrité de ses ressources, le système mis en place peut s’avérer excessif au regard de la finalité avancée, ainsi la collecte des informations relatives à chaque passage du personnel de portes externes et internes et ce pour chaque journée de travail.

Le contrôle des accès à l’entreprise et du temps de travail constitue incontestablement un traitement de données à caractère personnel au sens de l’article 1er de la loi du 8 décembre 1992. S’agissant en l’espèce, selon le règlement de travail, d’une mesure de contrôle du temps de travail, la cour constate que le système d’accès par badge a deux fonctions, étant d’améliorer la sécurité en canalisant l’accès du public (s’agissant d’un organisme public) et de disposer d’un système d’enregistrement du temps de travail du personnel.

Ce contrôle du temps de travail par enregistrement (entrées et sorties) se fait, en l’espèce, deux fois par jour, mais existe également un contrôle en cas de « simple passage » par porte d’accès à un plateau, celui-ci pouvant d’ailleurs s’effectuer à plusieurs sans utilisation individuelle du badge personnel. La cour s’interroge sur l’intérêt d’un tel système ainsi que sur la conservation illimitée des données, renvoyant également à l’article 5 de la loi sur le traitement de données à caractère personnel, qui soumet ce traitement notamment au consentement du travailleur et au caractère nécessaire de celui-ci à l’exécution du contrat.

Pour la cour, la signature de l’accusé de réception du règlement de travail ne vaut pas consentement au sens de la disposition ci-dessus, dans la mesure où elle ne peut être considérée comme la manifestation d’une volonté spécifique et informée portant sur l’acceptation du traitement des données. La seule mention dans le règlement de travail de l’existence de l’enregistrement des passages n’est pas suffisante, aucune information sur la portée de ces enregistrements, leur finalité, ainsi que sur le responsable du traitement n’étant donnée.

La cour conclut à l’absence de respect de l’obligation d’information du travailleur, dont il découle que l’employeur ne peut utiliser les données à caractère personnel issues des « passages de portes », quand bien même celles-ci auraient été nécessaires à l’exécution du contrat. L’employeur ne doit en effet pas se borner à établir le caractère nécessaire de ces données à l’exécution contractuelle mais est tenu de prouver que les dispositions de la loi du 8 décembre 1992 ont été respectées. A défaut, en l’espèce, la pièce relative à ces relevés doit être écartée des débats.


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