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Taux des allocations de chômage en cas de paiement de pensions alimentaires au SECAL

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 12 juin 2024, R.G. 2023/AB/117

Mis en ligne le mercredi 13 novembre 2024


Cour du travail de Bruxelles, 12 juin 2024, R.G. 2023/AB/117

Terra Laboris

Résumé introductif

Pour ouvrir le droit au taux chef de famille, le paiement d’une pension alimentaire doit être prévu par un jugement ou des conventions de divorce et être effectif.

L’intervention du SECAL implique un mécanisme de subrogation.

Que ces paiements aient pour objet de régler des arriérés n’en modifie pas la qualification juridique de contribution alimentaire.

Exiger qu’il y ait correspondance entre la période couverte et la perception des allocations au taux majoré revient à ajouter à la réglementation une condition qu’elle ne contient pas.

Dispositions légales

  • Arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage – article 110
  • Arrêté royal du 24 janvier 2002 ayant modifié l’article 110 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage – article 1er .

Analyse

Faits de la cause

M. J. a bénéficié des allocations de chômage au taux réservé aux travailleurs ayant charge de famille depuis le 2 novembre 2011, sur la base d’une ordonnance du président du Tribunal de première instance de Bruxelles du 4 juillet 2011 le condamnant au paiement d’une somme de 100 € par mois pour sa fille.

Par courrier du 1er mars 2022, l’ONEm l’a invité à prouver le paiement effectif de cette pension.

Il a transmis des extraits de compte prouvant quelques virements.

Il ne s’est pas présenté à la convocation de l’ONEm qui, par une décision du 24 mai 2022, l’a exclu du droit aux allocations comme travailleur ayant charge de famille depuis le 2 novembre 2011 et a prononcé une sanction administrative de 11 semaines.

M. J. a ensuite transmis à l’ONEm la preuve de virements en faveur du SPF Finances, qui n’ont pas été considérés comme des paiements effectifs, s’agissant d’arriérés en faveur du SECAL.

La procédure

M. J. a introduit un recours recevable contre la décision du 24 mai 2022 devant le Tribunal du travail francophone de Bruxelles. L’ONEm a formé une demande reconventionnelle recevable.

Par jugement du 11 janvier 2023, le tribunal a confirmé la décision sauf pour la sanction, transformée en avertissement, et a dit la demande reconventionnelle recevable et fondée.

Les demandes en appel

M. J. a formé contre ce jugement un appel recevable L’ONEm a introduit une demande reconventionnelle visant à obtenir la condamnation de M. J. au remboursement de l’indu et un appel incident visant au rétablissement de la sanction administrative de 11 semaines.

La décision commentée

L’arrêt rappelle que le paiement d’une pension alimentaire ne peut être pris en considération pour l’’attribution au chômeur de la qualité de chef de famille que s’il est fait sur la base d’un jugement ou d’un acte notarié et s’il est effectif, citant le Rapport au Roi relatif à l’arrêté royal du 24 janvier 2002 ayant modifié l’article 110 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991, qui expose que l’objectif de ce taux majoré est de permettre au débiteur alimentaire de s’acquitter de son obligation.

L’arrêt reprend ensuite les règles de l’intervention du SECAL créé par la loi du 21 février 2003 pour percevoir ou recouvrer les créances alimentaires et les arriérés à charge du débiteur d’aliments.

Lorsque ce service intervient, un mécanisme de subrogation se met en place : le SECAL avertit le débiteur d’aliments de son intervention et à partir de cette date seuls les paiements effectués à cet organisme sont libératoires. Cet organisme est subrogé de plein droit au créancier d’aliments à concurrence de ses avances.

En l’espèce, une décision judiciaire a fixé la contribution alimentaire du chômeur pour sa fille, mineure d’âge durant la période litigieuse, et M. J. s’est acquitté entre les mains du SECAL d’un montant oscillant entre 125,01 et 127,05€.

La créance alimentaire n’a pas changé de nature par le seul fait du paiement à cet organisme et l’article 110 de l’AR ne prévoit pas un paiement personnel et direct de la contribution alimentaire.

D’autre part, le fait que ces paiements aient eu pour objet de régler des arriérés n’en modifie pas la qualification juridique de contribution alimentaire. L’ONEm ajoute à la réglementation une condition qui n’y figure pas en exigeant que les versements au SECAL se rapportent aux mois pour lesquels la pension est due.

L’arrêt annule donc la décision de récupération de l’ONEm, dit l’appel du chômeur fondé et la demande reconventionnelle originaire et l’appel incident de l’ONEm non fondés.

Intérêt de la décision

L’arrêt expose le mécanisme de subrogation de cet organisme, qui a pour conséquence que le chômeur paie sa dette alimentaire au subrogé.

Ainsi que le souligne F. LAMBRECHT (F. LAMBRECHT, « Montant des allocations », in Chômage, R.P.D.B., pp 356 et ss), depuis que la condition du paiement effectif a été instaurée par l’arrêté royal du 24 janvier 2002 modifiant l’article 110 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991, certaines juridictions exigent que le paiement de la pension soit effectué de façon concomitante à la réception des allocations de chômage, adoptant ainsi une interprétation plus stricte que ce qu’exige la réglementation.

L’autre intérêt de la décision est de condamner cette interprétation dans le cas de versements du chômeur au SECAL.


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