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Prestations aux personnes handicapées : compétences actuelles en matière d’allocations pour l’aide aux personnes âgées et évaluation de la perte d’autonomie

Commentaire de Trib. trav. Hainaut (div. Charleroi), 27 février 2024, R.G. 22/1689/A

Mis en ligne le mercredi 19 mars 2025


Trib. trav. Hainaut (div. Charleroi), 27 février 2024, R.G. 22/1689/A

(Décision commentée)

Un jugement du 27 février 2024 rendu par le Tribunal du travail du Hainaut, division de Charleroi, rappelle que ce secteur a été transféré aux entités fédérées dans le cadre de la Sixième réforme de l’Etat et que l’évaluation de la perte d’autonomie s’évalue conformément au Guide d’évaluation pour la perte d’autonomie.
Les faits

Une personne âgée de 76 ans, présentant des problèmes de dos, a introduit une action en responsabilité médicale suite à une intervention (hernie discale) en 2014.

Dans le cadre de celle-ci, un expert a été désigné par jugement du 4 septembre 2018.

Une demande d’allocation pour l’aide aux personnes âgées a par ailleurs été introduite le 29 juillet 2021 auprès de la mutuelle, qui a évalué la perte d’autonomie à trois points.

La demande a dès lors été rejetée, ne pouvant donner lieu à une allocation.

Un recours judiciaire a été introduit contre la décision rendue.

La décision du tribunal

Le tribunal du travail relève, en premier lieu, la modification intervenue en matière d’aide aux personnes âgées, à partir du 1er janvier 2021. Le régime a été transféré aux entités fédérées par la loi du 6 janvier 2014 relative à la Sixième Réforme de l’État. L’État fédéral, précédemment compétent (DG Personnes handicapées du SPF Sécurité sociale) a continué à gérer les dossiers au nom et pour compte de la Région wallonne.

Depuis le 1er janvier 2021 cependant, ce sont les organismes assureurs wallons qui ont pris le relais, l’AVIQ chapeautant le régime et étant compétente sur le plan du financement et du contrôle qualité.

Les textes applicables sont le décret du 1er octobre 2020 relatif à l’allocation pour l’aide aux personnes âgées et portant modification du Code wallon de l’action sociale et de la santé, ainsi que l’arrêté du Gouvernement wallon du 10 décembre 2020 relatif à l’allocation pour l’aide aux personnes âgées portant modification du Code réglementaire wallon de l’action sociale et de la santé.

Dès lors, actuellement, ce sont les organismes assureurs wallons qui (i) traitent la demande d’allocation, (ii) prennent les décisions et (iii) paient l’allocation pour le compte de la Région.

Quant au fond, le tribunal se penche d’abord sur la question médicale et ensuite sur la condition de revenus.

La perte d’autonomie doit être de 7 points minimum pour l’ensemble des six items.

Tout comme pour l’allocation d’intégration, cinq catégories sont prévues pour fixer le degré de la perte d’autonomie : celle-ci, dans le cadre de la réglementation actuelle, est mesurée à l’aide de l’échelle médico-légale et du guide figurant en annexe de l’arrêté ministériel du 30 juillet 1987.

Vu les éléments déposés par la partie demanderesse, concluant à une perte d’autonomie de 9 points, le tribunal retient que la contestation médicale est valablement formée
Pour ce qui est des revenus, le texte applicable est le Code réglementaire wallon de l’action sociale et de la santé en ses articles 10/21 à 10/39. Ces dispositions visent les revenus des pensions, les revenus d’immeubles ainsi que les cessions de meubles ou immeubles.

Le tribunal ordonne dès lors une mesure d’instruction, chargeant l’expert d’une mission en deux points.

Le premier est de déterminer le degré de réduction d’autonomie au sens de l’échelle médico-légale et du guide, étant de préciser le nombre de points, notamment pour l’item déplacement.

L’avis de l’expert est également requis sur l’existence d’une invalidité permanente d’au moins 50 % conformément à l’annexe à l’arrêté royal du 8 février 2006, pour les lésions aux membres inférieurs. Il demande à l’expert de préciser la méthode selon laquelle cette invalidité est constatée. Sa décision doit être motivée.

Enfin, la question de la détermination des revenus en cause est renvoyée aux débats après l’expertise.

Intérêt de la décision

La perte d’autonomie est, selon la loi du 27 février 1987 relative aux allocations aux personnes handicapées, à régler par le Roi, qui pouvait faire une distinction entre l’allocation d’intégration et l’allocation pour l’aide aux personnes âgées. Le Roi n’a cependant pas fait usage de cette possibilité, l’arrêté royal du 5 mars 1990 relatif à l’allocation pour l’aide aux personnes âgées ayant prévu en son article 3 la manière de mesurer l’autonomie par le recours au Guide pour l’évaluation du degré d’autonomie (annexé à l’arrêté ministériel du 30 juillet 1987 fixant les catégories et le guide pour l’évaluation du degré d’autonomie en vue de l’examen du droit à l’allocation d’intégration).
Dans un jugement du 9 janvier 2009 (Tribunal du travail de Bruxelles, 9 janvier 2009, R.G. n° 3.802/07 – précédemment commenté), le Tribunal du travail de Bruxelles avait relevé que ce ne sont pas, en vertu du guide, les lésions elles-mêmes qui sont mesurées mais bien leurs répercussions sur les différentes fonctions envisagées, la référence devant être faite à une personne moyenne de la même catégorie d’âge.
Il ne s’agit cependant pas de comparer purement et simplement la situation de la personne âgée avec celle d’une personne du même âge et présentant également des limitations - façon de voir qui aurait pour conséquence tout à fait paradoxale de faire diminuer la cotation en fonction de l’âge -, alors que le manque d’autonomie lui-même croît ou reste inchangé.
Rappelons en outre d’une part que la plus grande fréquence du manque d’autonomie chez les personnes âgées est déjà prise en compte par la circonstance que les montants de l’APA sont moins importants que ceux fixés pour l’allocation d’intégration et de l’autre que, pour les personnes dont le manque d’autonomie est né avant l’âge de 65 ans, l’allocation d’intégration reste maintenue, ce qui confirme déjà là un traitement différencié selon que le manque d’autonomie procède de la vieillesse elle-même ou d’une situation antérieure.
Quant aux critères à prendre en compte pour évaluer la perte d’autonomie, ils ont été résumés par la Cour du travail de liège, qui renvoie à l’Annexe à l’arrêté ministériel du 30 juillet 1987 fixant les catégories et au Guide pour l’évaluation du degré d’autonomie, comme suit : i) il faut tenir compte de la possibilité ou non d’accomplir la fonction, mais aussi de la rapidité, des efforts requis, etc., (ii) il faut évaluer la situation moyenne et non la situation particulière au moment de l’évaluation, s’agissant de prendre en considération la réalité des difficultés que la personne déclare rencontrer en général, (iii) il faut se référer à une personne moyenne de la même catégorie d’âge, (iv) il faut avoir en compte que l’énumération donnée dans l’échelle médico-sociale n’est pas exhaustive et (v) de même pour les exemples mentionnés dans les commentaires, ceux-ci ne devant pas être interprétés de manière cumulative (C. trav. Liège (div. Liège), 11 mars 2022, R.G. 2021/AL/182).


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