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Quand introduire la demande de dispense ?

Commentaire de C. trav. Liège, section de Namur, 22 septembre 2009, R.G. 8.661/2008

Mis en ligne le jeudi 10 décembre 2009


Cour du travail de Liège, section de Namur, 22 septembre 2009, R.G. n° 8.661/2008

TERRA LABORIS ASBL – Sophie Remouchamps

Dans un arrêt du 22 septembre 2009, la Cour du travail de Liège (section Namur) rappelle les règles en matière de dispense demandée par un chômeur pour suivre des cours, particulièrement dans l’hypothèse où il y a reprise des cours après la date officielle de la rentrée scolaire.

Les faits

Madame G. bénéficie d’allocations de chômage depuis le 1er novembre 2004.

Le 6 décembre 2005, elle introduit une demande de dispense auprès de l’ONEm afin de suivre des cours tout en bénéficiant d’allocations de chômage. La période visée est celle du 15 septembre 2005 au 30 juin 2006, les études projetées devant être suivies dans une Haute Ecole (communication – vente). La direction de l’établissement confirme que l’intéressée est inscrite en tant qu’élève régulière depuis le 15 septembre 2005. Le certificat de fréquentation délivré mentionne, toutefois, une inscription à la date du 5 novembre 2005 uniquement.

L’ONEm décide, le 14 décembre 2005, de refuser la dispense. La motivation de sa décision est que la demande ne relève pas de l’article 94 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 mais de l’article 93 : à la date officielle du début de la première année académique du cycle d’études faisant l’objet de la dispense, l’intéressée ne bénéficie pas, selon lui, d’au moins 312 allocations de chômage au cours des deux années qui précèdent.

Une deuxième décision est prise ultérieurement, excluant l’intéressée du droit aux allocations à dater du 15 septembre 2005, avec récupération d’un indu de l’ordre de 8.500€. Ceci correspond à l’année académique 2005-2006.

Position du tribunal

Le premier juge considère que le droit à la dispense ne pouvait être reconnu dès lors que le 15 septembre 2005 l’intéressée ne remplissait pas les conditions susvisées (312 jours d’indemnisation). Il confirme ainsi la position de l’ONEm en ce qui concerne la date à retenir, étant celle du début de l’année scolaire.

Cependant, vu que les cours n’ont été suivis qu’à partir du 15 novembre 2005, l’exclusion et la récupération ne peuvent intervenir qu’à partir de cette date.

Position de la Cour

La Cour rappelle que la réglementation en matière de dispense réside dans les articles 68, alinéa 1er et 93 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991. Le chômeur ne peut bénéficier d’allocations pendant la période durant laquelle il suit en Belgique des études de plein exercice (organisés, subventionnés ou reconnus par une Communauté) ou durant laquelle il suit des études comparables à l’étranger sauf si les cours sont dispensés à des moments bien particuliers (principalement le samedi ou après 17 heures) ou s’il bénéficie d’une dispense. Le mécanisme d’octroi de cette dispense est exposé à l’article 93, qui prévoit, notamment dans son § 1er, 6° que le chômeur doit avoir bénéficié préalablement d’au moins 312 allocations au moment où il reprend les études. Une fois la dispense accordée, elle couvrira toute l’année scolaire, en vertu du § 2.

La Cour relève qu’il n’y a pas lieu d’appliquer la durée reprise au § 2, étant toute l’année scolaire aux conditions d’octroi visées au § 1er. Le texte de l’arrêté royal ne prévoit en effet pas que, pour que la condition de durée de chômage soit atteinte, le bénéfice d’au moins 312 allocations doit être prouvé au moment où ladite année scolaire débute. En outre, il n’est pas exigé que le chômeur reprenne les cours à la date de la rentrée scolaire officielle. Il peut s’inscrire ultérieurement et ne reprendre les cours qu’après celle-ci. Ceci relève non de la compétence de l’ONEm mais de l’établissement d’enseignement ainsi que, en l’occurrence, de la Communauté Française. Il en découle que la condition relative au nombre de journées durant lesquelles le chômeur a bénéficié d’allocations de chômage doit être remplie à la date à laquelle il reprendra effectivement les cours.

Appliquant ces principes au cas d’espèce, la Cour constate que l’intéressée a repris effectivement des études de plein exercice en cours de jour et qu’elle doit satisfaire aux conditions exposées ci-dessus. Il s’avère qu’elle justifie du nombre de journées de chômage à la date du début des cours.

Reste cependant deux dernières questions, pour lesquelles la Cour va ordonner une réouverture des débats.

La demande à la CAPAC a été introduite après la reprise des cours, soit en décembre 2005, les cours ayant été repris le 15 novembre. Il n’y a, comme le relève la Cour, ainsi pas d’antériorité dans la demande introduite. Or, l’article 93, § 1er prévoit que la demande doit avoir été adressée préalablement au bureau de chômage. La Cour pose dès lors la question de savoir si l’octroi doit être refusé pour toute l’année scolaire ou si le refus peut être limité à la période antérieure à la demande.

Par ailleurs, à partir du moment où l’ONEm était au courant en décembre 2005 de ce que la demande de dispense ne pouvait pas être admise vu qu’elle était tardive et qu’elle avait fait l’objet d’un rejet, la rétroactivité de la décision d’exclusion (et la récupération) pour toute la période comprise entre le début effectif des cours (15 novembre 2005) et la fin de l’année est-elle conforme aux dispositions réglementaires ? Pour la Cour, en effet, la décision de refus de dispense a été prise en décembre 2005 et les allocations ont continué à être versées jusqu’au 30 juin 2006 alors que l’ONEm aurait dû donner des instructions à la CAPAC pour éviter la poursuite des paiements. Ne le faisant pas, ceci a eu pour effet d’aggraver la dette de l’intéressée.

Intérêt de la décision

Un point important est dégagé dans cet arrêt, étant que l’article 93 dans ses §§ 1er et 2 visent deux notions différentes, étant que, dans les conditions d’octroi, le nombre de jours pendant lesquels le chômeur doit avoir bénéficié d’allocations s’apprécie à la date effective de reprise des cours et que, une fois la dispense accordée, elle vaut pour la totalité de l’année scolaire, en ce compris les vacances.

L’arrêt ne répond pas encore à la question de la sanction de l’absence d’antériorité de la demande par rapport à la date effective de reprise des cours et à l’aggravation du dommage de la chômeuse vu le paiement des allocations pendant toute l’année académique.


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