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Dispense d’inscription en frais d’administration en cas d’indu irrécupérable : obligations de l’organisme assureur

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 20 octobre 2010, R.G. 2009/AB/52.367

Mis en ligne le mardi 8 mars 2011


Cour du travail de Bruxelles, 20 octobre 2010, R.G. 2009/AB/52.367

TERRA LABORIS A.S.B.L.

Dans un arrêt du 20 octobre 2010, la Cour du travail de Bruxelles reprend les conditions requises en vue de l’autorisation pour l’organisme assureur de dispense d’inscription en frais d’administration d’un indu et rappelle les obligations à charge de celui-ci, telles que dégagées par la jurisprudence récente.

Objet du litige

La question tranchée par la Cour porte sur une demande introduite par un organisme assureur, tendant à dire pour droit que la dispense d’inscription en frais d’administration peut être accordée pour un de ses affiliés.

L’organisme assureur est dès lors en contestation avec l’INAMI sur cette question.

Décision de la Cour du travail de Bruxelles

La Cour du travail est amenée à se pencher sur la question de la dispense d’inscription en frais d’administration.

Elle rappelle qu’en vertu de l’article 194 de la loi coordonnée le 14 juillet 1994, il faut entendre par frais d’administration les dépenses entraînées par l’application de la loi, à l’exclusion notamment des prestations indûment payées dont la non-récupération a été admise comme justifiée dans les conditions et selon les modalités fixées par le Roi. Les indus non récupérés sont, en conséquence, en principe des frais d’administration de l’organisme assureur. Ils peuvent cependant être considérés comme frais du régime de l’assurance soins de santé et indemnités s’ils répondent aux conditions fixées par le Roi.

En vertu de l’arrêté royal du 3 juillet 1996, le fonctionnaire dirigeant du Service du Contrôle administratif peut dispenser l’organisme assureur d’inscrire ce montant en frais d’administration, notamment si l’indu ne résulte pas d’une faute, d’une erreur ou d’une négligence de l’Institution, ou si celle-ci en a poursuivi le recouvrement par toutes voies de droit, y compris la voie judiciaire.

La demande de dispense d’inscription doit être introduite par lettre recommandée avant l’expiration du délai de trois mois suivant l’expiration d’autres délais, eux-mêmes fixés à l’article 326, § 1er de l’arrêté royal (délai de deux ans dont le point de départ diffère selon le cas visé).

La Cour du travail rappelle que l’article 327 énonce un principe et une exception. Le principe est l’inscription en frais d’administration si l’indu n’est pas récupéré dans le délai de deux ans (éventuellement prolongé) à compter de la constatation de l’indu, l’exception étant la dispense d’inscription dans les hypothèses visées.

Il s’agit dès lors d’une obligation comptable qui ne peut être isolée de l’ensemble du système dans lequel elle s’inscrit, découlant de l’autonomie de gestion reconnue aux organismes assureurs. Rappelant un précédent arrêt de la même cour (C. trav. Brux., 4 janvier 2007, R.G. 47.175), la Cour souligne que la dispense de l’inscription constitue une dérogation et doit être appliquée comme telle. Elle est de stricte interprétation.

L’organisme assureur doit établir qu’il se trouve dans les conditions prévues par l’article 327, § 2, s’il entend contester la décision de refus de la dispense d’inscription en frais d’administration.

Il doit donc établir que le non paiement ne résulte pas d’une faute, d’une erreur ou d’une négligence de sa part et qu’il en a poursuivi le recouvrement par toutes voies de droit, dont la voie judiciaire.

La Cour insiste particulièrement sur l’obligation de diligence dans le chef de l’organisme assureur. Il s’agit certes d’une obligation de moyen mais elle existe dès lors que celui-ci a connaissance de l’indu. Il doit tout mettre en œuvre en vue de la récupération de celui-ci. Cependant, il faut apprécier cette obligation de manière raisonnable, étant que l’on ne peut exiger de lui qu’il épuise des recours qu’il sait aléatoires ou encore qu’il engage des frais hors de proportion avec l’ampleur de la créance. La Cour retient, ici, la jurisprudence tirée d’un autre arrêt de la Cour du travail de Bruxelles (C. trav. Brux., 23 décembre 2004, R.G. 43.839), selon laquelle ce ne sont pas les résultats obtenus qui doivent être examinés mais les efforts faits et les initiatives prises aux fins de récupérer, et ce même partiellement.

Elle cite en outre l’arrêt du 26 mai 2008 de la Cour de cassation (Cass., 26 mai 2008, S.07.0083.F), selon lequel le manque de diligence de l’organisme assureur à poursuivre la récupération de l’indu ne fait obstacle à la dispense d’inscription en frais d’administration que dans la mesure où il a pu influencer ladite récupération. Ceci signifie que l’organisme assureur peut démontrer que, même s’il a fait diligence, l’indu n’aurait pas pu être récupéré.

Tels sont les principes à appliquer et la Cour va, après avoir repris toute la chronologie des démarches faites par la mutuelle (depuis l’invitation à rembourser jusqu’au commandement de payer et la tentative de saisie immobilière), relever que l’organisme assureur n’a pas en l’espèce manifesté toute la diligence requise, étant notamment que le jugement par défaut n’a pas été exécuté immédiatement mais qu’il fallut attendre huit mois pour ce faire. La Cour retient également que l’absence de lien entre le manque de diligence et les possibilités de récupération n’est pas établie. Cette obligation à charge de l’organisme assureur, n’est pas remplie en l’espèce, de telle sorte que la Cour rejette l’appel.

Intérêt de la décision

L’arrêt de la Cour du travail rappelle les règles permettant à l’organisme assureur d’actionner le mécanisme de dispense d’inscription en frais d’administration, en cas de paiement indu irrécupérable.

L’arrêt attire particulièrement l’attention sur les obligations de l’organisme assureur dans ce cadre.


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