En application des principes énoncés par la Cour de justice de l’Union européenne (dont notamment C.J.U.E.,6 novembre 2018, C-684/16, points 45 à 47), qui prévalent sur les règles de droit interne (en ce compris les règles de droit de la preuve) :
• conformément aux obligations d’information et d’incitation qui incombent à l’employeur envers son travailleur, l’employeur doit veiller concrètement et en toute transparence à ce que le travailleur soit effectivement en mesure de prendre ses congés annuels payés, en l’incitant, au besoin formellement, à le faire, tout en l’informant, de manière précise et en temps utile pour garantir que lesdits congés soient encore propres à garantir à l’intéressé le repos et la détente auxquels ils sont censés contribuer, de ce que, s’il ne prend pas ceux-ci, ils seront perdus à la fin de la période de référence ou d’une période de report autorisée ;
• la charge de la preuve incombe à l’employeur d’établir qu’il a fait preuve de toute la diligence requise pour que le travailleur soit effectivement en mesure de prendre les congés annuels payés auxquels il avait droit. Il ne suffit pas à cet égard d’invoquer que le travailleur n’a pas introduit de demande de congés annuels. À défaut d’une telle preuve rapportée par l’employeur, une extinction du droit auxdits congés à la fin de la période de référence ou de report autorisée et, en cas de cessation de la relation de travail, l’absence corrélative de versement d’une indemnité financière au titre des congés annuels non pris, méconnaîtraient, respectivement, l’article 7, paragraphe 1er, et l’article 7, paragraphe 2, de la directive 2003/88 ;
• si l’employeur est à même de rapporter la preuve lui incombant et qu’il apparait ainsi que c’est délibérément et en toute connaissance de cause quant aux conséquences appelées à en découler que le travailleur s’est abstenu de prendre ses congés annuels payés après avoir été mis en mesure d’exercer effectivement son droit à ceux-ci, l’article 7, paragraphes 1er et 2, de la directive 2003/88 ne s’oppose pas à la perte de ce droit ni, en cas de cessation de la relation de travail, à l’absence corrélative d’indemnité financière au titre des congés annuels payés non pris.
Le fait que le travailleur qui s’est vu refuser des congés pour des raisons de continuité du service aurait, conformément à une circulaire interne, pu introduire une demande pour reporter davantage que le maximum autorisé des congés annuels non pris à condition de démontrer des circonstances exceptionnelles et qu’il ne l’a pas fait est insuffisant pour le priver de son droit d’encore revendiquer plus que ce solde. Non seulement, cela reviendrait à faire fi de l’obligation d’information et d’incitation incombant à l’employeur et à inverser la charge de la preuve lui incombant mais, de plus, c’est oublier que le travailleur aurait dû pouvoir démontrer des circonstances exceptionnelles et que même s’il avait introduit pareille demande, il ne disposait de toute manière d’aucune garantie que les éventuelles circonstances invoquées auraient été acceptées.
Ce constat n’empêche nullement les parties d’envisager entre elles, d’un commun accord et à titre exceptionnel, de remplacer la planification de ces heures de congé subsistantes par une indemnisation financière sous la forme d’une rémunération en lieu et place d’une prise d’heures de congé.