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Chômage : droit aux allocations en cas convention de rupture d’un commun accord

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 17 novembre 2011, R.G. n° 2011/AB/27

Mis en ligne le jeudi 3 juillet 2014


Cour du travail de Bruxelles, 17 novembre 2011, R.G. n° 2011/AB/27

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 17 novembre 2011, la Cour du travail de Bruxelles examine les effets d’une convention de rupture d’un commun accord sur les conditions d’octroi des allocations de chômage et rappelle les pouvoirs du juge dans l’examen de cette situation.

Les faits

Un travailleur est licencié pour motif grave, étant une absence injustifiée pendant trois jours. N’ayant cependant pas encore reçu la lettre recommandée de licenciement, il se représente chez son employeur. Une convention est alors signée entre les parties en vertu de laquelle elles décident d’une rupture du contrat de travail d’un commun accord. Un document C4 est établi en ce sens.

Deux jours plus tard, l’intéressé sollicite les allocations de chômage. Il est alors convoqué afin de s’expliquer sur le motif de la rupture. Il déclare qu’il pensait qu’il perdrait ses droits au chômage s’il n’acceptait pas la proposition de l’employeur de rompre le contrat d’un commun accord.

Il fait alors l’objet d’une décision d’exclusion pendant une période de huit semaines, et ce au motif d’abandon d’emploi sans motif légitime.

Un recours est introduit devant le Tribunal du travail de Louvain.

Décision du tribunal du travail

Par jugement du 13 décembre 2010, le tribunal du travail déclare la demande partiellement fondée. L’abandon d’emploi est confirmé, ainsi que l’absence de motif légitime. La sanction est cependant ramenée à quatre semaines.

L’intéressé interjette cependant appel de ce jugement.

Décision de la cour du travail

La cour examine dès lors l’ensemble du litige et constate, avec le premier juge, que la mention figurant sur le C4 relative à une rupture d’un commun accord n’est pas contestée et qu’aucune procédure n’a été introduite par le travailleur contre son employeur devant le tribunal. Elle rappelle les articles 44 et 51 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 relatifs aux conditions d’octroi des allocations de chômage : le travailleur doit être privé de travail et de rémunération pour des circonstances indépendantes de sa volonté, sous peine d’exclusion. Est ainsi visé l’abandon de l’emploi convenable (exclusion de 4 à 52 semaines) et le motif équitable eu égard à l’attitude fautive du travailleur (sanction de 4 à 26 semaines).

En l’occurrence, la cour relève que vu les éléments qui lui sont soumis l’on ne peut considérer que le travailleur a quitté volontairement son travail. Il est fait état dans la convention de transaction du fait qu’il disposait d’une attestation médicale permettant de justifier son absence et qu’il a, en conséquence, signé celle-ci de bonne foi. L’employeur y marquait accord pour revenir sur le licenciement pour motif grave et payer une indemnité de rupture de deux semaines.

La cour considère dès lors devoir annuler la décision administrative sur cette base.

Cependant, elle constate qu’il y a application en l’espèce de l’hypothèse du motif équitable dû à une attitude fautive du travailleur au sens de l’article 51, § 1, 2e alinéa, 2° de l’arrêté royal. Rappelant l’arrêt de la Cour de cassation du 18 février 2002 (Cass., 18 février 2002, J.T.T., 2002, p. 445), la cour rappelle que l’exclusion prononcée sur la base de l’article 51 ne constitue pas une sanction mais est une décision sur les conditions d’octroi des allocations de chômage. Dans une telle hypothèse, il est demandé au juge d’examiner le droit à une prestation sociale déterminée. Après avoir annulé la décision administrative, le juge ne peut reconnaître le droit à celle-ci que s’il est établi que l’intéressé en remplit toutes les conditions d’octroi. C’est l’enseignement d’un ancien arrêt de la Cour de cassation du 26 mai 1976 (Cass., 26 mai 1976, Arr. Cass., 1976, p.1072). Le rôle du juge est, dès lors, après avoir annulé la décision administrative, de se prononcer sur le droit de l’assuré social à la prestation, et ce eu égard aux conditions d’octroi prévues dans le texte légal (la cour renvoyant ici à l’arrêt de la Cour de cassation du 27 juin 2005, Chron. D.S., 2008, p.88).

Elle conclut, en conséquence, à l’exclusion sur la base de l’article 52, § 1, 2e alinéa, 2° de l’arrêté royal et limite celle-ci à quatre semaines, ainsi que l’avait également décidé le tribunal.

Intérêt de la décision

Dans ce type de situation, où une convention de rupture d’un commun accord suit – en l’annulant – un licenciement pour motif grave, la cour du travail conclut (contrairement au tribunal) qu’il n’y a pas abandon d’emploi convenable sans motif légitime mais licenciement pour un motif équitable eu égard à l’attitude fautive du travailleur. La cour insiste également sur les pouvoirs du juge dans cette hypothèse : annulation de la décision administrative et examen du droit à la prestation sociale eu égard aux conditions d’octroi fixées dans la réglementation.


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