Terralaboris asbl

Marché du travail


Cass.


C. trav.


Documents joints :

Cass.


C. trav.


  • Il y a lieu dans l’évaluation d’associer les éléments d’ordre fonctionnel au profil socioprofessionnel de l’intéressé (étant son âge à la date de consolidation, ses diplômes éventuels, sa formation, son expérience professionnelle) et de superposer l’ensemble au marché général de l’emploi.
    En l’espèce, la cour considère qu’en dehors du métier d’aide-soignante exercé par l’intéressée son marché général de l’emploi accessible avant l’accident se limitait à des professions manuelles réservées à des travailleurs peu qualifiés et qu’elle a, suite à celui-ci, perdu une part importante de son marché du travail. Les critères relevés par la cour sont que (i) l’exercice d’une activité manuelle nécessite d’être en possession de toutes ses facultés physiques pour exercer pleinement sa capacité concurrentielle sur le marché général de l’emploi, (ii) les métiers toujours accessibles sont des métiers sollicitant exclusivement les mains, voire des métiers limitant sérieusement la station debout et la marche et (iii) même en faisant appel à ses facultés de réadaptation et à ses possibilités de rééducation professionnelle, les contraintes physiques inhérentes à une large part des professions manuelles non qualifiées, voire à l’activité d’aide-soignante, s’avèrent peu compatibles avec les limitations fonctionnelles qu’elle rencontre, son âge ne faisant qu’accentuer la tendance.

  • Il s’agit d’apprécier l’inaptitude à gagner sa vie par son travail et non d’apprécier l’invalidité physiologique, l’atteinte à l’intégrité physique qui en est à la base mais qui n’est pas nécessairement le facteur déterminant. L’incapacité recouvre donc la répercussion de l’invalidité physiologique sur la capacité concurrentielle de la victime, compte tenu de sa situation socio-économique.
    Concernant le critère de l’âge, ce facteur est pris en compte en ce qu’il a de l’influence sur la capacité concurrentielle et non dans sa dimension d’accès effectif au marché du travail compte tenu de la conjoncture économique. Plus l’âge avance, plus l’incidence de ce critère impactera, en principe, l’incapacité de travail dès lors que la faculté d’adaptation, de rééducation professionnelle et la capacité de concurrence se réduisent avec l’âge.
    En l’espèce, examinant le marché général du travail de l’intéressée, la cour note que sa formation et son passé professionnel relèvent exclusivement de la sphère Horeca, qu’elle travaille pour le même employeur depuis plus de quarante-cinq ans, relève donc du marché du travail manuel et ne présente pas un parcours professionnel diversifié de nature à favoriser une réorientation ou une réadaptation. Elle peut poursuivre son travail et pourrait également exercer un travail équivalent ou, a fortiori, moins lourd dans son secteur ou sur le marché général du travail non qualifié. Il s’agit donc d’évaluer les efforts accrus sans qu’aucune fonction ne soit exclue.

  • Le taux retenu et proposé par l’expert ne lie pas le juge, sa mission ne pouvant avoir pour objet que de procéder à des constatations ou de donner un avis d’ordre technique. En l’espèce, le taux de 30% proposé par l’expert avait été porté à 65% par le tribunal. La cour précise que les conclusions médicales de l’expert n’ont pas été remises en cause mais que le tribunal s’est adéquatement appuyé sur celles-ci et les a confrontées au profil socio-professionnel de l’intéressée ainsi qu’aux restrictions observées au niveau du marché général de l’emploi. Il a abouti à une conclusion différente. Il n’est nul besoin – comme le demande l’assureur - de réinterroger l’expert ou de solliciter encore des pièces médicales, puisque la discussion se poursuit sur un terrain « que le juge maîtrise et qui relève de son champ de compétence exclusif ». La cour poursuit en s’écartant, par ailleurs, du taux retenu par le tribunal et fixe celui-ci à 90%. Elle précise ne pas vouloir considérer que l’intéressée ne disposerait plus d’aucune capacité de gain mais que, vu son profil socio-professionnel et les sévères limitations fonctionnelles qu’elle endure, les métiers qui lui restent accessibles sont devenus « une denrée rare ».

  • Lorsqu’il s’agit de déterminer les répercussions des séquelles identifiées de l’accident sur la capacité professionnelle de la victime sur le marché général de l’emploi en tenant compte de son profil socio-professionnel, il faut savoir, concrètement, en gardant à l’esprit les contours de ce profil socio-professionnel, (i) ce qu’était le marché du travail accessible à la victime avant l’accident, (ii) si, à la date de la consolidation, existent des métiers (ou groupes de métiers) que la victime ne peut plus exercer vu qu’elle ne peut plus accomplir toutes les tâches requises et (iii) quels types d’emplois lui restent encore ouverts sans perte concurrentielle et quels sont les métiers qu’elle ne peut plus exercer qu’au prix d’efforts significatifs, voire avec une efficacité moindre.

  • Constitue des séquelles psychiques indemnisables le fait que le travailleur a moins confiance dans sa main (blessée) et qu’il vit, de façon bien compréhensible, dans la peur d’un nouvel accident en manipulant une machine. Dès lors que ces séquelles ont amené l’intéressé à rechercher un emploi où il était moins exposé (soudure en l’espèce), il a vu l’éventail de ses possibilités de reclassement se réduire comparativement à d’autres travailleurs : sa faculté de réadaptation est entravée et il est moins concurrentiel.

  • Le taux de l’incapacité permanente doit être apprécié et fixé en fonction de la diminution de la valeur économique de la victime sur le marché général du travail et ne peut l’être au regard de sa seule perte de capacité dans le métier qu’elle exerçait au moment de l’accident. L’évolution conjoncturelle de l’économie n’est pas prise en compte dans l’évaluation.

  • Il faut distinguer l’évaluation de l’incapacité temporaire de travail (qui consiste à vérifier l’impossibilité totale ou partielle d’accomplir des prestations de travail dans la profession exercée normalement au moment de l’accident) et l’évaluation de l’incapacité permanente (qui se fait par rapport au marché général de l’emploi encore accessible à la victime, en vérifiant les différentes activités salariées qu’elle pourrait encore exercer). L’incapacité permanente peut donc n’être que partielle même si la victime a perdu complétement l’aptitude à exercer encore sa profession habituelle, pour autant qu’elle garde une capacité à exercer d’autres professions qui lui sont accessibles. Si elle est licenciée à la suite de l’accident du travail, la perte de l’emploi ne sera pas un critère déterminant de son indemnisation.

  • Le taux d’IPP proposé par l’expert peut être revu par le juge. Ainsi, si le taux proposé est de 80 %, il pourra être de 100% s’il est constaté que l’intéressé ne conserve pas de possibilité de gagner sa vie sur le marché général du travail compte tenu de son âge (plus de 60 ans), de son absence de qualification professionnelle et de faculté d’adaptation. Un poste de conditionnement de produits et de tri ne peut être proposé à un tel ouvrier qui souffre notamment d’une importante limitation fonctionnelle du bras droit ainsi que de troubles mnésiques et d’équilibre.

  • L’évaluation de la perte ou de la diminution du potentiel économique sur le marché général du travail se fait en tenant compte de l’incapacité physique, de l’âge, de la qualification professionnelle, des possibilités d’adaptation, de la possibilité de recyclage et du potentiel concurrentiel de la victime (renvoi à Cass., 10 mars 1980, 22 septembre 1986 et 3 avril 1989)

  • (Décision commentée)
    Définition du marché du travail

  • (Décision commentée)
    Notion de consolidation et du marché du travail (non pris en compte de la possibilité de travailler en ETA)

  • (Décision commentée)
    Appréciation de la capacité résiduaire de travail – compétence exclusive du juge : absence de caractère contraignant de l’avis de l’expert judiciaire

  • (Décision commentée)
    Evaluation de la capacité restante – état psychique consécutif à l’accident – limitations dans tous les aspects de l’activité professionnelle – incapacité permanente de 100%

  • (Décision commentée)
    Notion de facteurs propres à la victime – marché général (carrière professionnelle)

  • Critères : incapacité physique + âge + qualification professionnelle + capacité d’adaptation, possibilité de suivre de nouvelles formations et perte de concurrence sur le marché général du travail

  • Compétence du juge à partir des données relevées par l’expert - critères socio-économiques - problèmes liés à la manutention bi-manuelle - autres handicaps (âge, difficultés de déplacement) - irritabilité et anxiété - métiers considérés possibles par l’expert apparaissent trop théoriques.

  • Faible connaissance des langues nationales. Incidence sur les professions restant accessibles.

  • Absence de prise en compte de la situation générale du marché du travail.

  • (Décision commentée) Capacité professionnelle déjà réduite avant l’accident - incidence sur l’incapacité

  • (Décision commentée)
    Complément d’expertise - étude ergologique

  • Appréciation in concreto de la perte de capacité de concurrence : examen des limitations fonctionnelles et des professions encore accessibles – existence d’une faculté de réadaptation (chef d’équipe) – prise en compte des compétences.

  • Non prise en compte d’antécédents judiciaires qui restreignent le marché général du travail de la victime

Trib. trav.


  • L’incapacité de travail s’apprécie par rapport à l’incidence des lésions sur le marché de l’emploi, qu’il s’agisse d’emplois similaires à ceux exercés par le demandeur ou encore d’autres professions qui lui sont accessibles compte tenu de son âge, de son niveau de formation et de sa carrière professionnelle. En l’espèce, le parcours scolaire limité, l’âge (56 ans), mais également le peu d’expérience professionnelle constituent des facteurs réduisant la capacité concurrentielle sur le marché du travail.


  • L’absence de tout lien de causalité entre l’accident et une lésion résultant d’un état antérieur n’exclut pas pour autant toute prise en compte de celle-ci dans l’indemnisation de la victime, mais ce non pas en termes de détermination du dommage légalement réparable mais en termes d’évaluation concrète de la perte de capacité résultant de cet accident, en ce que cet état antérieur – même non activé ou aggravé par l’accident – serait pris en compte en tant qu’il exerce une répercussion sur la capacité de travail résiduelle de la victime, au même titre que d’autres caractéristiques (âge, formation, carrière professionnelle, etc.). Ainsi, une lésion au bras d’une personne, atteinte par ailleurs de cécité, aura concrètement des répercussions plus graves en raison de l’invalidité préexistante.


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