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Circulaire du Gouvernement wallon du 12 juillet 2018 relative à la formalisation du processus de licenciement des membres du personnel contractuel (M.B 30 juillet 2018)

Mis en ligne le mardi 20 novembre 2018


Circulaire du Gouvernement wallon du 12 juillet 2018 relative à la formalisation du processus de licenciement des membres du personnel contractuel (M.B 30 juillet 2018)

Aux Services du Gouvernement wallon et aux organismes d’intérêt public soumis à l’autorité de la Région, Monsieur le Ministre-Président, Mesdames et Messieurs les Ministres, Madame la Secrétaire générale, Mesdames et Messieurs les fonctionnaires dirigeants,

1. Objectif poursuivi

La Déclaration de politique régionale du 25 juillet 2017 entend simplifier les procédures disciplinaires et de suspension dans l’intérêt du service à l’égard des agents statutaires et de licenciement pour les membres du personnel contractuel. Il y est également envisagé de mettre en place un accompagnement spécifique pour les responsables hiérarchiques lorsqu’ils doivent y recourir.

La ligne de conduite souhaitée a pour but, non pas de donner un mouvement d’amplification des procédures de licenciement, qui sont des procédures lourdes de conséquences, mais de correctement les encadrer pour garantir leur objectivité, le respect des formes prescrites et des droits et obligations des parties concernées.

Conformément à cet objectif, la présente circulaire précise les lignes directrices que le Gouvernement souhaite voir observées en la matière.

La présente circulaire ne vise que les procédures de licenciement des membres du personnel contractuel. Les procédures disciplinaires et de suspension dans l’intérêt du service à l’égard des agents statutaires feront l’objet d’un texte distinct.

Ces lignes directrices s’inscrivent dans le cadre du respect de la législation en vigueur.

A cet effet, il peut être rappelé que la rupture du contrat de travail est règlementée par la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail. La rupture s’inscrit également dans le cadre du respect de la jurisprudence, notamment de la Cour constitutionnelle, ajoutant certaines contraintes spécifiques, comme celle de procéder à l’audition préalable du membre du personnel. Des règles spécifiques en matière de délégation de compétences s’imposent par ailleurs [1].

Le Gouvernement entend toutefois rappeler qu’au-delà des règles spécifiques de protection contre le licenciement et des dispositions prescrites à peine de nullité, le non-respect d’une des étapes du processus ne peut rendre irrégulière une décision de licenciement.

La présente circulaire traite, en son point 2, du licenciement sans motif grave, avec octroi d’un délai de préavis ou d’une indemnité compensatoire.

La rupture pour motif grave fait l’objet, quant à elle, du point 3, dans la mesure où ce type de rupture obéit à des règles particulières.

De manière à pouvoir identifier toute situation problématique dès son origine, un accompagnement de la hiérarchie est également envisagé (point 4).

De manière à assurer une harmonisation et une objectivation des procédures de licenciement, le Gouvernement recommande que les étapes suivantes soient suivies dans le cadre d’un processus de licenciement.

2. Rupture du contrat de travail sans faute grave moyennant préavis ou indemnité

2.1. Généralités

Dans le cadre d’un contrat de travail, l’employeur peut, au même titre que l’employé, mettre fin unilatéralement à ce contrat.

Ce droit à la rupture d’un contrat de travail à durée indéterminée est consacré par les articles 32, 3°, 37 et 39, de la loi du 3 juillet 1978 moyennant la remise dans ce cas d’un préavis à l’autre partie ou en accordant une indemnité. Pour les contrats à durée déterminée ou pour un travail nettement défini, ce droit est régi par l’article 40 de ladite loi.

Toutefois, envisager un licenciement dans le cadre d’une relation de travail est un acte grave et délicat et la décision, sur le plan humain, difficile à prendre.

2.2. Procédure à suivre

2.2.1. Préalables à la décision de licenciement

Suivant un arrêt du 6 juillet 2017 de la Cour constitutionnelle, il est conseillé aux employeurs publics d’entendre le travailleur en lui donnant l’occasion de s’expliquer oralement ou, à défaut, par écrit sur ce qui lui est reproché, à tout le moins lorsque la mesure est liée au comportement ou à la personne du travailleur.

Avant toute proposition de licenciement, le Directeur général [2] dont relève le membre du personnel :

  • avertit par écrit le membre du personnel des motifs qui le conduit à envisager de proposer à l’autorité de licencier. Si ces motifs sont liés à la conduite du membre du personnel, cet avertissement indique de manière claire et précise les faits qui sont reprochés au membre du personnel, sur la base d’un dossier établi par le supérieur hiérarchique ;
  • donne l’occasion au membre du personnel concerné de s’expliquer oralement dans un délai raisonnable (par exemple, 10 jours ouvrables) ou, à défaut, par écrit ;
  • permet au membre du personnel concerné de consulter le dossier, s’il y en a un ;
  • en cas d’audition, permet au membre du personnel concerné d’être assisté d’une personne de son choix, étant entendu que le supérieur hiérarchique doit également assister à cette audition ;
  • établit un compte-rendu de l’audition.

2.2.2. Décision de licenciement

A la suite de la procédure décrite au point 2.2.1, le Directeur général peut établir une proposition de licenciement. La proposition de licenciement est accompagnée de toutes les informations utiles. Le Directeur général soumet à l’autorité qui détient le pouvoir de licencier la proposition de licenciement (au SPW, le Secrétaire général [3]).

La lettre de licenciement énonce clairement les motifs concrets justifiant objectivement le licenciement, en reprenant le cas échéant les éléments établis sur lesquels le membre du personnel a eu l’occasion de s’expliquer au cours de la procédure préalable.

Le licenciement moyennant préavis est notifié par l’autorité qui détient le pouvoir de licencier au moyen d’un courrier recommandé ou par voie d’exploit d’huissier conformément à l’article 37 de la loi du 3 juillet 1978. Le courrier doit mentionner le début et la durée du préavis. Ces formalités sont prescrites à peine de nullité du préavis.

Le licenciement moyennant indemnité n’est quant à lui soumis à aucune forme particulière. Il est néanmoins recommandé, pour des raisons probatoires, que l’autorité compétente notifie également dans ce cas le licenciement au moyen d’un courrier recommandé.

3. Rupture du contrat de travail pour motif grave

3.1. Généralités

L’article 35 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail permet à l’employeur de rompre le contrat sans préavis ni indemnité compensatoire pour un motif grave. Ce type de licenciement se caractérise par une série de spécificités.

Est considérée comme constituant un motif grave, toute faute grave qui rend immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle entre l’employeur et le travailleur.

Cette définition fait référence à trois éléments :

  • un comportement fautif (fait isolé ou manquement continu et répété) ;
  • une faute intrinsèquement grave rendant intenable la poursuite de la relation de travail dans le contexte professionnel particulier.

Les faits suivants ont été considérés par la jurisprudence comme constitutifs, dans certaines circonstances, d’un motif grave :

  • l’absence injustifiée au travail ;
  • l’exercice d’une activité pendant une incapacité de travail ;
  • le vol ;
  • l’insubordination ;
  • l’usage à titre privé de bien appartenant à l’employeur ;
  • des faits de mœurs de la vie privée ;
  • la consommation d’alcool ou de stupéfiants sur les lieux de travail ;
  • la dégradation volontaire de matériel de l’employeur ;
  • la falsification de notes de frais.

Les exemples repris ci-avant ne sont pas limitatifs. Néanmoins, certains de ces faits ne pourront faire l’objet d’une faute grave que dans certaines circonstances particulières.

Le contrat de travail doit être rompu dans les trois jours ouvrables (y compris le samedi) qui suivent la prise de connaissance des faits par l’autorité qui détient le pouvoir de licencier.

Le délai de trois jours court à partir du moment où l’autorité a la certitude suffisant à sa propre conviction et aussi à l’égard de l’autre partie et de la justice.

3.2. Procédure à suivre

3.2.1. Préalables à la décision de licenciement

Suivant un arrêt du 22 février 2018 de la Cour constitutionnelle, il est conseillé aux employeurs publics d’entendre le travailleur en lui donnant l’occasion de s’expliquer oralement ou, à défaut, par écrit sur ce qui lui est reproché.

Avant toute proposition de licenciement, le Directeur général [4] dont relève le membre du personnel :

  • avertit immédiatement par écrit le membre du personnel des faits qui lui sont reprochés en lui indiquant les conséquences encourues pour sa situation professionnelle, sur la base d’un dossier établi par le supérieur hiérarchique ;
  • donne l’occasion au membre du personnel concerné de s’expliquer dans un délai raisonnable [5] oralement ou, à défaut, par écrit ;
  • permet au membre du personnel concerné de consulter le dossier, s’il y en a un ;
  • en cas d’audition, permet au membre du personnel concerné d’être assisté d’une personne de son choix, étant entendu que le supérieur hiérarchique doit également assister à cette audition ;
  • établit un compte-rendu de l’audition.

3.2.2. Décision de licenciement

A la suite de la procédure décrite au point 3.2.1., le Directeur général peut établir une proposition de licenciement. La proposition de licenciement est accompagnée de toutes les informations utiles. Le Directeur général soumet la proposition de licenciement immédiatement après l’audition à l’autorité qui détient le pouvoir de licencier (au SPW, le Secrétaire général [6]).

Le contrat de travail doit être rompu dans les trois jours ouvrables qui suivent la prise de connaissance des faits par l’autorité qui détient le pouvoir de licencier.

L’autorité peut, avant notification de la décision de licenciement, requérir toute autre mesure d’instruction supplémentaire (enquête, auditions supplémentaires,...) qui se révèle indispensable pour obtenir la certitude voulue.

L’autorité notifie tous les motifs [7] qui justifient la rupture du contrat au membre du personnel, en énonçant, avec rigueur, clarté et précision, les faits reprochés, par recommandé ou par exploit d’huissier, en même temps qu’on lui signifie son licenciement ou dans les trois jours ouvrables qui suivent.

4. Accompagnement

La Déclaration de politique régionale a pour objectif d’encadrer les procédures de licenciement pour permettre à l’autorité de prendre ses responsabilités. Cette responsabilité ne pourra être optimale qu’à la condition d’un accompagnement de la hiérarchie, ce qui lui permettra de lever les contraintes et les charges liées à l’instruction des dossiers.

Il est recommandé au supérieur hiérarchique de prendre contact avec la Direction fonctionnelle et d’appui afin de lui signaler toute difficulté rencontrée avec un membre du personnel qui pourrait aboutir à un licenciement et ce, dès la constatation de situations problématiques.

A cette fin et au sein de chaque Direction fonctionnelle et d’appui, une personne sera tenue de suivre des formations en matière de droit du travail, et notamment de licenciement, afin de pouvoir conseiller le management et accompagner le processus de licenciement.

Ce type d’accompagnement, dès la détection d’un problème, permettra, dans certaines circonstances, de solutionner certaines situations sans devoir nécessairement aboutir au licenciement.

Dans le cadre du présent processus de licenciement, la Direction de la Fonction publique du Secrétariat général apporte, suivant demande, toute l’aide voulue, que ce soit pour des avis ponctuels ou pour un accompagnement tout au long de la procédure. La Direction de la Fonction publique est garante du respect de la légalité de la procédure, qu’elle vérifie.

Namur, le 12 juillet 2018.

Pour le Gouvernement :
Le Ministre-Président, W. BORSUS
La Ministre de l’Action sociale, de la Santé, de l’Egalité des chances, de la Fonction publique et de la Simplification administrative, A. GREOLI

[1] Au niveau du Service public de Wallonie, l’article 44 de l’arrêté du Gouvernement wallon du 8 octobre 2009 relatif aux délégations de pouvoirs aux agents statutaires du Service public de Wallonie prévoit que : « Délégation est accordée au secrétaire général pour prendre, sur proposition ou avis conforme du directeur général dont relève l’agent, toute décision en matière de licenciement du personnel contractuel ».

[2] Pour ce qui concerne les organismes auxquels est applicable le décret du 22 janvier 1998 relatif au statut du personnel de certains organismes d’intérêt public relevant de la Région wallonne, il s’agit, à moins que le décret constitutif de l’organisme d’en dispose autrement, de l’administrateur général ou toute fonction prévue par le décret constitutif de l’organisme et qui consiste à en assumer de façon permanente la direction.

[3] Pour les organismes auxquels est applicable le décret du 22 janvier 1998 relatif au statut du personnel de certains organismes d’intérêt public relevant de la Région wallonne, il s’agit du fonctionnaire général du rang A 2 compétent en matière de personnel.

[4] Voir note infrapaginale n° 2.

[5] Si les faits sont flagrants, ce délai tiendra compte de la nécessité de notifier le licenciement dans les trois jours de la connaissance certaine des faits par l’autorité compétente pour licencier. Cela peut justifier une convocation urgente, le cas échéant, dans les 24 heures.

[6] Voir note infrapaginale n° 3.

[7] L’article 35, alinéa 3, de la loi relative aux contrats de travail prévoit que le congé pour motif grave ne peut plus être donné sans préavis ou avant l’expiration du terme, lorsque le fait qui l’aurait justifié est connu de la partie qui donne congé, depuis trois jours ouvrables au moins. La jurisprudence admet toutefois qu’il puisse être tenu compte de faits ou circonstances, non repris dans le courrier, dans l’appréciation du motif grave s’ils sont de nature à éclairer la gravité du motif reproché.


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