Terralaboris asbl

Nature de l’infraction et éléments constitutifs


Cass.


C. trav.


Trib. trav.


Documents joints :

Cass.


  • (Décision commentée)
    Non-paiement de rémunération : « infraction instantanée » et non « délit continu »

  • La circonstance que l’élément moral consistant en une négligence peut en principe être déduit du fait matériel commis et que l’employeur ne conteste pas expressément l’existence de l’élément moral du délit ou n’invoque pas lui-même l’existence d’un cas de force majeure, d’une erreur invincible ou d’une autre cause d’excuse, ne fait obstacle à ce que le juge constate que cet élément moral est inexistant et que le travailleur n’en apporte par la preuve.

  • Si des décisions pénales sont intervenues précédemment et que l’employeur a été acquitté au bénéfice du doute, celles-ci ne peuvent être considérées comme une erreur invincible constituant un motif de non imputabilité d’une infraction ultérieure et permettant de considérer que la légalité du mode de fonctionnement de l’entreprise ne pouvait être mise en doute. Il y a lieu de procéder à une analyse comparative détaillée des modalités d’exécution des prestations de travail litigieuse avec celles des travailleurs concernés précédemment par les deux décisions pénales.

  • La bonne foi peut constituer une cause de justification lorsqu’elle provient d’une erreur invincible. L’erreur de droit peut, en raison de certaines circonstances, être considérée par le juge comme invincible à la condition que, de ces circonstances, il puisse se déduire que la personne qui y a versé a agi comme l’aurait fait toute personne raisonnable et prudente. Si le juge constate souverainement les circonstances sur lesquelles il fonde sa décision, la Cour contrôle s’il a pu légalement déduire de celles-ci l’existence d’une cause de justification.

C. trav.


  • Il y a unité d’intention lorsque l’employeur a, pendant des années et de manière constante et systématique, procédé de la même manière, étant qu’il n’a rémunéré la travailleuse (titres services) qu’en fonction des prestations réellement effectuées auprès d’un client, contrairement au texte clair de l’article 4 de la CCT du 7 mai 2014.

  • Ne prouve pas à suffisance de droit l’unité d’intention requise pour qu’il soit question d’un délit continué le travailleur qui, dans ses conclusions, rappelle le cadre théorique de la question et se limite à affirmer ensuite que, en l’espèce, « il s’agit d’une infraction continuée dans la mesure où elle consiste dans la succession d’infractions instantanées procédant d’une même intention délictueuse ». Ce disant, il cherche curieusement à démontrer le caractère continué de l’infraction par l’énoncé de ce qui définit une infraction continuée, sans prendre la peine d’établir l’unité d’intention.

  • Selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation, « le juge apprécie en fait et de manière souveraine si différentes infractions soumises à son examen constituent la manifestation successive et continue de la même intention délictueuse ». Cette appréciation du juge du fond n’empêche toutefois pas la Cour de Cassation « de vérifier si, des faits qu’il a constatés, le juge a pu légalement déduire l’existence ou l’absence de cette unité d’intention ».
    L’existence d’une unité d’intention ne doit pas être confondue avec l’élément moral requis pour toute infraction.

  • La cour rejette l’application de la prescription quinquennale pour une demande de paiement de rémunération sectorielle obligatoire dans une espèce concernant un transfert conventionnel d’entreprise du secteur privé (ASBL) au secteur public (CPAS), considérant que l’erreur de droit peut, en raison de certaines circonstances, être considérée par le juge comme invincible à la condition que, de ces circonstances, il puisse se déduire que la personne qui y a versé a agi comme l’aurait fait toute personne raisonnable et prudente (avec renvoi à Cass. 14 mai 2012 – S.11.0011.F -S.11.0127.N).

  • Le délit continué est caractérisé par l’unité d’intention délictueuse. Celle-ci peut être admise pour des infractions dont l’élément moral consiste à avoir sciemment contrevenu à une disposition légale, pour autant que le juge du fond constate que les différents faits constituent la manifestation successive de la même intention, ainsi entendue.

  • L’infraction alléguée étant le non-paiement de rémunération et de pécules de vacances, en violation de l’article 162 du Code pénal social, il s’agit d’une infraction réprimée par une sanction de niveau 2, soit une amende pénale de 50 à 500 euros (ou une amende administrative de 25 à 250 euros). Cette sanction place le non-paiement de rémunération dans la catégorie des délits soumis à une prescription de 5 ans. Ce manquement s’étant en l’espèce répété durant toute la durée de l’occupation et l’employeur ne pouvant se prévaloir d’aucune cause d’exonération, l’infraction continuée a persisté jusqu’à la fin de cette période et les demandes formées par requête introductive d’instance datant de moins d’un an par après ont été introduites en temps utile. Elles ne sont pas prescrites. (L’affaire concerne une requalification de contrat de stage en contrat de travail).

  • (Décision commentée)
    Le travailleur à domicile qui réclame l’indemnité forfaitaire de frais prévue par la loi peut donner un fondement délictuel à sa demande, sur pied des dispositions de l’article 2262bis du Code civil. Le non-paiement constitue une infraction instantanée et le délai de prescription commencera à courir le lendemain du jour où elle a été commise.
    En l’espèce, l’infraction ne peut être qualifiée de « continuée » à défaut de volonté établie dans le chef de la société d’inscrire sa stratégie de non-paiement dans une politique délibérée de délinquance sociale, se traduisant par un refus systématique de respecter le droit social. L’infraction instantanée ne permet pas de réclamer le paiement de l’indemnité depuis le premier fait infractionnel mais pendant la période de cinq ans précédant l’introduction de la demande.

  • L’existence de l’élément moral peut être déduite du simple fait matériel commis et de la constatation que ce fait est imputable au prévenu, étant entendu que l’auteur est mis hors cause si un cas de force majeure, une erreur invincible ou une autre cause d’excuse sont établis, à tout le moins, ne sont pas dénués de crédibilité (avec renvoi à Cass., 24 février 2014, n° S.13.0031.N).

  • Les infractions que représente le non-paiement de sommes dues en vertu de CCT sectorielles sont des infractions instantanées, commises à chaque échéance à laquelle la rémunération - incluant les indemnités - était due. Elles sont, en outre, reliées par une unité d’intention lorsque l’employeur a agi librement, consciemment et de manière systématique, en appliquant la même logique durant toute la période d’occupation et doivent, alors, être qualifiées ensemble de délit continué.
    Celui-ci est caractérisé par l’unité d’intention délictueuse, qui peut être admise pour des infractions dont l’élément moral consiste à avoir sciemment contrevenu à une disposition légale, pour autant que le juge du fond constate que les différents faits constituent la manifestation successive de la même intention.

  • L’unité d’intention est réalisée lorsque les différentes infractions répétées s’inscrivent dans un comportement voulu par l’auteur de l’infraction afin de réaliser un but défini. En l’espèce, l’employeur ne pouvait et ne devait pas ignorer que la rémunération payée depuis le début de l’engagement était inférieure au barème prévu par les conventions collectives. En faisant fi, sans discontinuer, de ses obligations légales en matière de rémunération, les infractions commises sont des infractions continuées, les délits n’étant pas séparés les uns des autres par un délai dépassant le délai de prescription.

  • Le non-respect d’une convention collective de travail rendue obligatoire par arrêté royal constitue une infraction qui justifie l’application du délai de prescription de 5 ans (action civile résultant d’une infraction) à la demande de dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice causé par le non-respect de cette convention collective. Lorsqu’une C.C.T. n’existe plus au moment où elle est rendue obligatoire par arrêté royal (ayant été entre-temps remplacée par une autre, qui ne fait pas encore l’objet d’un arrêté royal), l’élément matériel de l’infraction est absent. La prescription est dès lors annale et non quinquennale.

  • En cas de délit collectif ou continué, le délai de prescription pour l’ensemble des infractions qui peuvent être réunies entre elles par une unité d’intention ne commence à courir qu’au moment où le dernier fait a été commis. Ceci vaudra pour des arriérés de salaire, un salaire garanti, le pécule de sortie et la prime de fin d’année, au contraire de l’indemnité compensatoire de préavis, qui se prescrit conformément à l’article 15 de la loi du 3 juillet 1978.

  • (Décision commentée)
    Non-paiement de rémunération barémique et d’heures de « veille dormante »

  • Le non-paiement du pécule de vacances est une infraction instantanée. Il devient une infraction continuée dès lors qu’il existe une unité d’intention. Il n’est pas nécessaire que l’unité d’intention ait été présente dès la première infraction. Il n’est pas non plus nécessaire que soient identifiées les personnes physiques, organes ou préposés, par l’intermédiaire desquelles a agi la personne morale. Si la simple répétition des faits est insuffisante à établir l’unité d’intention, elle peut néanmoins se déduire de leur caractère systématique.

  • Unité d’intention - incidence sur le point de départ du délai de prescription

  • Arriérés de rémunération - classification de fonctions - chef d’équipe (en l’espèce, éléments de preuve insuffisants)

  • Elément intentionnel non requis - définition du délit collectif

  • Délit continué - droit à l’ensemble des arriérés - intérêts compensatoires

  • Non paiement de la rémunération - pas de dol particulier exigé - infraction instantanée

  • Régularisation de la classification professionnelle - infraction continuée - exigence d’une unité d’intention

  • Infraction instantanée / infraction continuée - mode de preuve

  • Non paiement de la rémunération due - régularisation barémique - délit continué - conséquences sur la prescription

  • Infraction instantanée - conséquences sur la prescription

  • Elément intentionnel - référence à l’employeur normalement diligent - pourvoi contre cet arrêt rejeté par Cass., 24 février 2014, R.G., S. 13.0031.N - ci-dessous

  • Pouvoirs du juge - non-respect d’une CCT rendue obligatoire - élément matériel - infraction instantanée

  • Délit - art. 162 C.P.S.

  • Dès lors que, de manière régulière et sans interruption, la société, depuis de nombreuses années, s’abstient de rémunérer toutes les heures de garde de nuit (et persiste au moment où la cour statue), il y a unité d’intention. De même, en cas de versement de manière régulière et sans interruption des pécules de vacances et des montants dus en vertu d’une convention collective sanctionnée par arrêté royal, l’unité d’intention étant établie. Cette unité d’intention est aussi démontrée par le fait que l’employeur refuse toutes les régularisations demandées.

  • Infraction continuée - notion - point de départ de la prescription : dernier fait punissable - non-paiement de la rémunération - principes

  • Eléments constitutifs de l’infraction - infraction matérielle

  • Obligation pour le juge du fond de vérifier la réunion des éléments constitutifs de l’infraction - après Cass., 9 février 2009

  • Pécules de vacances

  • Elément matériel et élément moral (non paiement de rémunération) - notion d’unité d’intention

  • Délit continué - unité d’intention - élément intentionnel (non) - point de départ de la prescription

  • Infraction - réparation en nature - règles de preuve (en matière pénale)

  • Infraction réglementaire - non respect de la classification contenue dans la C.C.T. du 29 mai 1989 - C.P. 218 - élément moral non requis

  • Infraction pénale - imputabilité - inexistence d’une cause de justification

  • Unité d’intention

Trib. trav.


  • Dès lors que l’employeur invoque que la travailleuse bénéficiait d’avantages en nature (étant nourrie, logée, blanchie) – ce qui pour lui compensait l’absence de paiement de la rémunération contractuellement due –, le non-paiement résulte d’une unité d’intention au niveau des faits. Il s’en déduit que l’infraction est une infraction continue.

  • (Décision commentée)
    L’infraction de non-paiement de la rémunération est une infraction instantanée, ce qui a des effets sur la prescription, puisque celle-ci prend cours en principe dès qu’elle est commise. Si les infractions instantanées sont reliées entre elles par une unité d’intention, il y a délit collectif (ou infraction continuée) et la prescription de l’action publique prend cours à partir du dernier fait commis procédant de la même intention.
    Il faut dès lors vérifier si les faits sont l’exécution successive d’une même résolution criminelle, ne constituant ainsi qu’une seule infraction (avec renvoi à Cass., 7 avril 2008, S.07.0058.F et à Cass., 12 février 2007, S.06.0051.F). La prescription de l’action publique ne prendra dans ce cas cours pour l’ensemble des faits qu’à partir du dernier de ceux-ci pourvu qu’aucun d’entre eux ne soit séparé du suivant par un temps excédant le délai de prescription.

  • (Décision commentée)
    Rappel des principes relatifs à l’existence d’une infraction


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