Le travailleur qui se prévaut d’une autre qualité que celle de cohabitant au sens de la réglementation relative au chômage doit l’établir. En vertu de l’article 110, § 4, de l’arrêté royal organique, cette preuve doit être apportée au moyen du formulaire dont la teneur et le modèle sont déterminés par le comité de gestion. La seule mention par le travailleur sur le formulaire C 1 de sa qualité d’isolé ou de travailleur ayant charge de famille est une déclaration unilatérale. Tant qu’elle n’est pas mise en doute par l’ONEm, le travailleur bénéficie des allocations en cette qualité. Dès lors qu’elle l’est, il incombe à l’intéressé d’apporter la preuve de ses déclarations par toutes voies de droit. La démonstration de la qualité de travailleur isolé ou de travailleur ayant charge de famille peut imposer la preuve d’un fait négatif : la preuve peut cependant en être apportée par la démonstration du fait positif inverse.
Dans la mesure où le couple est domicilié à des adresses différentes, il incombe à l’ONEm de renverser la présomption de résidences séparées. Dans son avis écrit, le ministère public a épinglé plusieurs éléments particulièrement circonstanciés qui remettent largement en cause les déclarations de la chômeuse. La cour du travail s’y rallie. Elle constate ensuite que la chômeuse reste en défaut de produire le moindre document relatif aux charges que son compagnon aurait personnellement assumées de son côté dans ses différents domiciles officiels au cours de la période litigieuse. La cour retient la cohabitation et souligne que les déclarations que l’intéressée a complétées dans non moins de sept formulaires C1 dénotent dans son chef une intention de tromper l’administration pour son propre profit. La prescription quinquennale est d’application.
Il revient à l’ONEm de prouver que la situation de l’assuré ne correspond pas à la réalité. Tel est le cas lorsqu’est démontrée, entre autres, une consommation anormalement basse d’eau et d’électricité (en l’espèce 5 m3 du 9 janvier 2018 au 16 septembre 2019, alors que la consommation moyenne annuelle pour une personne célibataire est de 34 m3) et d’énergie (882 kWh pour la même période alors que la consommation moyenne annuelle pour une personne célibataire s’élève selon l’ONEm à 1000 kWh), consommation considérée par ailleurs compatible avec celle d’un immeuble non habité où s’effectuent des travaux de rénovation.
Dans ce cas, l’assuré doit apporter la preuve contraire, en particulier, qu’il réside effectivement dans l’habitation qu’il indique comme étant sa résidence principale et non pas avec un tiers où sont en l’espèce concentrés de nombreux éléments relatifs à la vie quotidienne (envoi de factures, présence régulière, etc).
Si l’absence d’intention frauduleuse est en l’espèce retenue (entraînant l’application de la prescription de 3 ans), l’intéressée échoue à démontrer sa bonne foi, constituée de l’absence légitime de conscience du caractère indu du paiement. Celle-ci doit, en effet, pour la cour, rapporter la preuve qu’au moment où elle a perçu les allocations de chômage litigieuses, elle ne devait pas se rendre compte que celles-ci étaient indues. Tel n’est pas le cas, celle-ci ayant fait une déclaration inexacte relative à la composition de son ménage, alors qu’elle ne pouvait ignorer que sa situation n’était pas conforme à la réglementation du chômage ni qu’elle n’avait pas droit aux allocations qui lui ont été accordées.
La répartition de la charge de la preuve entre l’ONEm et le chômeur implique (i) que le montant des allocations est déterminé sur la base de la déclaration de la situation familiale effectuée par le chômeur, (ii) que, si l’ONEm conteste le taux d’indemnisation, il lui appartient d’établir que la situation telle que déclarée n’est pas exacte et (iii) que, si le caractère inexact de la déclaration est établi, c’est au chômeur à prouver qu’il se trouve dans une situation lui permettant d’être indemnisé au taux isolé ou au taux réservé au travailleur ayant charge de famille. Il a dès lors la charge de la preuve dans les deux cas.