Commentaire de C. trav. Bruxelles, 22 mai 2020, R.G. 2018/AB/424
Mis en ligne le 13 novembre 2020
Les articles 3, 5 et 6 de la Directive n° 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, lus à la lumière de l’article 31, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ainsi que de l’article 4, § 1er, de l’article 11, § 3, et de l’article 16, § 3, de la Directive n° 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation d’un État membre qui, selon l’interprétation qui en est donnée par la jurisprudence nationale, n’impose pas aux employeurs l’obligation d’établir un système permettant de mesurer la durée du temps de travail journalier effectué par chaque travailleur. (Dispositif)
Il ne peut, en aucun cas, être inféré de l’arrêt C-55/18 ci-dessus que le droit belge de la preuve devrait être interprété de façon telle à être conforme à la Directive du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, laquelle ne comporte du reste aucune disposition en matière de preuve et ne fait pas directement obligation aux employeurs de mettre en place un système d’enregistrement du temps de travail.
L’arrêt n° C-55/18 de la C.J.U.E. ci-dessus n’emporte pas, en l’absence d’un système d’enregistrement du temps de travail, un renversement de la charge de la preuve des heures supplémentaires. En effet, la Directive n° 89/391/CEE en cause, étant consacrée au bien-être, n’a pas d’effet horizontal direct dans les rapports entre particuliers (travailleurs et employeurs), avec pour conséquence qu’un tel renversement de la charge de la preuve doit être prévu par la loi. Tel n’est pas le cas en l’état actuel du droit belge de la preuve.
En l’état actuel du droit belge, l’arrêt C-55/18 ci-dessus n’a pas pour portée de rendre un employeur occupant des travailleurs en Belgique, qui n’aurait pas mis en place un système permettant de mesurer la durée du temps de travail journalier effectué par chaque travailleur et qui ne parviendrait pas à établir le nombre précis d’heures accomplies par son travailleur, redevable du paiement de toute heure supplémentaire réclamée par ce dernier, ce malgré que celui-ci ne soit pas en mesure de démontrer la prestation de ces heures.
On peut, à la lumière de l’arrêt n° C-55/18 de la Cour de Justice, conclure à l’obligation faite à l’employeur de mettre en place un système d’enregistrement du temps de travail journalier de chaque travailleur qui soit objectif, fiable et accessible, faute duquel il lui appartient de démontrer quelles heures de travail ont, ou non, été prestées, avec à la clé, s’il n’y parvient pas, condamnation au paiement des heures supplémentaires réclamées mais non prouvées.
(Décision commentée)
L’employeur est tenu de mettre sur pied dans l’entreprise un système objectif, fiable et accessible permettant de mesurer le temps de travail de chaque travailleur. Cette obligation découle de la Directive n° 2003/88/CE et de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. A défaut, l’employeur est tenu d’établir les heures qui ont été effectivement prestées et, dès lors que le demandeur avance un nombre d’heures déterminé, de prouver que celles-ci n’ont pas été travaillées.