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Droit pénal (social) - Liste des décisions publiées


Cr.E.D.H.


  • Il ressort de la jurisprudence de la Cr.E.D.H. qu’il ne sera pas satisfait au critère du « lien matériel et temporel suffisamment étroit » si l’un ou l’autre des deux éléments – matériel ou temporel – fait défaut).
    Les éléments pertinents pour statuer sur l’existence d’un lien suffisamment étroit du point de vue matériel sont notamment les suivants :

    • le point de savoir si les différentes procédures visent des buts complémentaires et concernent ainsi, non seulement in abstracto mais aussi in concreto, des aspects différents de l’acte préjudiciable à la société en cause ;
    • le point de savoir si la mixité des procédures en question est une conséquence prévisible, aussi bien en droit qu’en pratique, du même comportement réprimé (idem) ;
    • le point de savoir si les procédures en question ont été conduites d’une manière qui évite autant que possible toute répétition dans le recueil et dans l’appréciation des éléments de preuve, notamment grâce à une interaction adéquate entre les diverses autorités compétentes, faisant apparaître que l’établissement des faits effectué dans l’une des procédures a été repris dans l’autre ;
    • et, surtout, le point de savoir si la sanction imposée à l’issue de la procédure arrivée à son terme en premier a été prise en compte dans la procédure qui a pris fin en dernier, de manière à ne pas faire porter pour finir à l’intéressé un fardeau excessif, ce dernier risque étant moins susceptible de se présenter s’il existe un mécanisme compensatoire conçu pour assurer que le montant global de toutes les peines prononcées est proportionné.
  • L’article 4 du Protocole n°7 doit être compris comme interdisant de poursuivre ou de juger une personne pour une seconde « infraction » pour autant que celle-ci a pour origine des faits identiques ou des faits qui sont en substance les mêmes. Il s’agit des faits qui constituent un ensemble de circonstances factuelles concrètes impliquant le même contrevenant et indissociablement liées entre elles dans le temps et l’espace, l’existence de ces circonstances devant être démontrée pour qu’une condamnation puisse être prononcée ou que des poursuites pénales puissent être engagées.

C. const.


  • L’article 18bis de la loi du 29 juin 1964 « concernant la suspension, le sursis et la probation », lu en combinaison avec l’article 41bis du Code pénal et avec les articles 101, 103 et 181, § 1er, alinéa 1er, 3°, et alinéa 2, du Code pénal social, viole les articles 10 et 11 de la Constitution. (Dispositif)
    En ce qui concerne la possibilité d’infliger une peine avec sursis pour une infraction à la disposition pénale, la gravité et la sévérité des faits et de leurs conséquences pèsent davantage vis-à-vis des personnes morales que vis-à-vis des personnes physiques. Compte tenu de l’objectif du législateur d’éviter des discriminations entre personnes physiques et morales et de poursuivre un parallélisme le plus étroit possible entre les deux, il n’est ni pertinent, ni raisonnablement justifié que la même infraction (article 181, § 1er, alinéa 1er, 3°, du Code pénal social), commise vis-à-vis de 41 travailleurs concernés (en l’espèce), soit traitée différemment selon que cette infraction est commise par une personne physique ou une personne morale. (Cons. B.15 in fine)

  • L’article 17, § 5, du Décret flamand du 30 avril 2004 « portant uniformisation des dispositions de contrôle, de sanction et pénales reprises dans la réglementation des matières de législation sociale qui relèvent de la compétence de la Communauté flamande et de la Région flamande » viole les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 6, § 1er, de la Convention européenne des droits de l’homme, dans l’interprétation selon laquelle le délai de recours qu’il prévoit prend cours le jour suivant l’expédition de la notification de la décision. La même disposition ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 6, § 1er, de la Convention européenne des droits de l’homme, dans l’interprétation selon laquelle ce délai de recours prend cours le troisième jour ouvrable suivant l’envoi de la notification de la décision, sauf si le contrevenant prouve que le pli recommandé n’a été présenté à son domicile qu’ultérieurement. (Dispositif)

  • L’article 128 du Code pénal social, tel qu’il était applicable au moment des faits au cours de la période du 1er janvier 2014 au 16 août 2014, dans l’interprétation selon laquelle il serait applicable à l’utilisateur d’un travailleur intérimaire, viole les articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, avec l’article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et avec le principe général exprimé à l’article 2 du Code pénal. (Dispositif)
    Il ressort en effet des modifications législatives successives et des travaux préparatoires y afférents que les articles 39bis de la loi du 24 juillet 1987 et 176/1 du Code pénal social établissent de nouvelles incriminations à l’égard de l’utilisateur d’un travailleur intérimaire, de son préposé ou de son mandataire. Partant, l’utilisateur du travailleur intérimaire ne pouvait, au moment des faits, être considéré comme employeur au sens de l’article 128 du Code pénal social. Interpréter la loi autrement heurterait le principe de légalité et reviendrait aussi à donner à la loi pénale un effet rétroactif.

  • Invitée à examiner la compatibilité de l’article 24 du Code pénal social avec les articles 10, 11, 15 et 22 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec les articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et avec l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce que l’article 24 du Code pénal social n’offrirait pas aux personnes faisant l’objet d’une visite domiciliaire autorisée par le juge d’instruction les mêmes droits et garanties qu’aux personnes qui font l’objet d’une perquisition ordonnée par un juge d’instruction dans le contexte d’une instruction judiciaire relative à une infraction pénale, la Cour constitutionnelle juge que l’article 24 du Code pénal social poursuit un but légitime au sens de l’article 8, paragraphe 2, de la Convention européenne des droits de l’homme. L’ingérence dans le droit au respect du domicile et de la vie privée est prévue par une disposition légale et peut être considérée comme nécessaire pour atteindre le but légitime précité. La procédure d’autorisation prévue garantit par ailleurs le respect du principe de proportionnalité dans la mise en œuvre des visites domiciliaires.

  • L’article 81 de la loi du 4 août 1996 sur le bien-être des travailleurs lors de l’exécution de leur travail (actuellement abrogé par l’article 109, 43°, a), du Code pénal social) incriminant certains comportements de l’employeur, de ses mandataires et préposés ou encore de tiers n’appartenant pas au personnel de l’employeur mais qui exécutent les missions qui leur sont dévolues par ladite loi n’est pas contraire au principe de légalité en matière pénale – renvoi à l’arrêt du 6 juin 2013 (n° 77/2013).

  • L’article 233 du code pénal social, interprété comme imposant au juge pénal de prononcer la sanction qu’il prévoit à l’encontre de prévenus qui ont déjà subi une sanction administrative présentant un caractère répressif prédominant pour des faits identiques à ceux qui sont à l’origine des poursuites ou qui sont en substance les mêmes, viole les articles 10 et 11 de la Constitution lus en combinaison avec le principe non bis in idem, avec l’article 4 du Septième Protocole additionnel à la C.E.D.H. et avec l’article 14, par. 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Cass.


  • La loi (articles 132, 5°, du Code pénal social ainsi que 25 et 29 de la loi du 4 août 1996) punit le fait pour le maître d’œuvre de méconnaître par sa faute personnelle les dispositions relatives à la santé et la sécurité au travail. Une délégation ne saurait abolir la responsabilité pénale de ce maître d’œuvre au titre de manquement à des obligations que la loi a entendu mettre personnellement à sa charge. Le juge du fond ne peut dès lors considérer que le maître d’œuvre peut s’exonérer de sa responsabilité pénale en déléguant par contrat à un sous-traitant la sécurité sur le chantier pendant une intervention.
    Le transfert de la responsabilité pénale n’est admissible que lorsqu’il est autorisé – fût-ce implicitement – par le législateur ou l’autorité réglementaire, et ce à charge pour le déléguant de prouver la délégation opérée sur la tête du tiers qu’il prétend tenu de remplir certaines obligations à sa décharge. La délégation de pouvoirs, qui n’est pas une convention d’exonération de la responsabilité pénale, ne met pas à charge du délégataire la responsabilité des infractions commises par le déléguant.

  • (Décision commentée)
    Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 5 février 2016 modifiant le droit pénal et la procédure pénale et portant des dispositions diverses en matière de justice que le principe de l’appel sur grief détermine la saisine du juge d’appel et que les exceptions qu’elle y prévoit ne peuvent conduire celui-ci à élargir cette saisine en soulevant d’office un moyen relatif à un fait infractionnel non visé par l’appel.

  • La circonstance qu’il est établi définitivement (en vertu des articles 4, 5 § 1er, 7 § 3, 7 § 4 et 8 de la loi du 30 juin 1971 relative aux amendes administratives applicables en cas d’infractions à certaines lois sociales) qu’une amende a été infligée pour des faits établis par procès-verbal n’a pas pour conséquence que ces faits ne peuvent plus être contestés par l’employeur dans le cadre d’une action introduite au civil par un travailleur sur la base de ceux-ci.

  • En vertu de l’article 9 de la loi du 16 novembre 1972 concernant l’Inspection du travail, les procès-verbaux dressés par les inspecteurs sociaux font foi jusqu’à preuve du contraire pour autant qu’une copie en soit communiquée au contrevenant et, le cas échéant, à son employeur dans un délai de 14 jours prenant cours le lendemain du jour de la constatation de l’infraction. La force probante particulière de ces procès-verbaux ne vaut que dans l’intérêt de l’action publique et de l’action en réparation du dommage causé par les infractions. L’autorité que la disposition confère à ceux-ci ne peut être invoquée par l’O.N.S.S. comme élément de preuve du défaut de publicité des horaires de travail normaux à l’occasion du recouvrement des cotisations de sécurité sociale sur la base de la présomption de l’article 22ter de la loi du 27 juin 1969.

  • L’article 181 C.P.S. sanctionne l’absence de communication à l’institution chargée de la perception des cotisations de sécurité sociale des données imposées par l’A.R. du 5 novembre 2002 instaurant une déclaration immédiate de l’emploi. Sont assimilées aux travailleurs, au sens de cette obligation, les personnes qui, autrement qu’en vertu d’un contrat de travail, exécutent des prestations de travail sous l’autorité d’une autre personne. Dès lors qu’est constatée l’existence d’un lien de subordination, il ne peut être conclu que, à défaut de preuve d’un contrat de travail, l’employeur (son préposé ou mandataire) n’est pas tenu par l’obligation de communiquer les données requises d’identification de ce travailleur.

  • Le principe général de droit non bis in idem a une portée identique à celle de l’article 4 § 1er du Septième Protocole additionnel à la C.E.D.H. : de secondes poursuites sont interdites du chef de faits identiques ou substantiellement identiques qui, ayant fait l’objet de poursuites antérieures, ont donné lieu à une décision définitive d’acquittement ou de condamnation. Par ’’faits identiques ou substantiellement identiques’’, il faut entendre un ensemble de circonstances de fait concrètes relatives à un même suspect, qui sont indissociablement liées en temps et en lieu.

  • Peut constituer l’infraction d’obstacle à la surveillance visée à l’article 28, § 3, 2° C.P.S. le fait de ne pas présenter volontairement les supports d’information demandés par l’inspection sociale contenant des données sociales ou dont l’établissement, la tenue ou la conservation sont prescrits par la loi. L’infraction peut exister même si l’inspecteur n’a pas agi dans le cadre des compétences reprises à cette disposition.

  • Le transfert de la responsabilité pénale de l’employeur sur ses préposés et mandataires ne prive pas le juge du pouvoir de constater une faute susceptible d’engager sa responsabilité pénale – en l’espèce, manquements ayant entraîné un accident du travail (manquements à la sécurité constatés à de nombreuses reprises, absence de contrôle d’une bonne répartition des tâches tenant compte des compétences des travailleurs,...)

  • L’article 87, 3° et 4° de la loi du 4 août 1996 a été remplacé par l’article 131, 3° et 4° Code pénal social. Celui-ci est libellé dans des termes similaires, de telle sorte que le comportement visé à l’article 465 du R.G.P.T. (protection des ouvertures) demeure punissable.

C. trav.


Trib. trav.


  • Les infractions reprises dans l’arrêté royal du 5 novembre 2002 instaurant une déclaration immédiate de l’emploi n’imposent pas que tous les éléments constitutifs du contrat de travail, à savoir le travail, la rémunération et le lien de subordination, soient réunis. Il faut et il suffit de prouver lors des constatations l’existence d’un lien d’autorité d’une personne sur une autre, indépendamment du cadre juridique sous lequel ces personnes prétendent travailler. L’autorité correspond à la simple possibilité de demander, de commander un travail, de donner des directives, de surveiller. En matière répressive, l’employeur est la personne qui dispose de l’autorité sur le travailleur et l’a mis au travail. Ce travail peut se limiter à une activité, une besogne ou une tâche réalisée par une personne sans qu’il soit nécessaire de prouver tous les éléments constitutifs du contrat de travail.

  • Un inspecteur social peut, sur la base de l’article 34 C.P.S., prendre, via son smartphone, copie des documents qui lui sont présentés par l’employeur et renfermant des données sociales. Ce faisant, l’inspecteur social n’excède pas ses pouvoirs, s’agissant d’une modalité actuelle d’exercice de ses compétences, eu égard aux évolutions technologiques.
    La valeur probante particulière des procès-verbaux des inspecteurs sociaux ne s’applique que dans l’intérêt de l’action publique et de l’action en réparation du dommage causé par les infractions qui y sont constatées ; l’autorité que l’article 9, alinéa 2, de la loi du 16 novembre 1972 concernant l’inspection du travail confère à ces procès-verbaux ne peut être invoquée par l’Office national de sécurité sociale comme élément de preuve du défaut de publicité des horaires de travail normaux lors du recouvrement de cotisations de sécurité sociale sur la base de la présomption prévue à l’article 22ter de la loi du 27 juin 1969 révisant l’arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs (renvoi à Cass., 7 mars 2016, S14.0102.N).

  • (Décision commentée)
    L’ignorance n’est une cause d’excuse que si elle est invincible, étant que l’on puisse déduire des circonstances dans lesquelles l’infraction a été commise que la personne qui y a versé a agi comme l’aurait fait toute personne raisonnable et prudente.

  • (Décision commentée)
    Parmi les mesures de prévention visées à l’article 43 C.P.S., les inspecteurs sociaux peuvent ordonner, dans le cadre de la prévention de menaces pour la santé ou la sécurité des travailleurs et afin de remédier à des nuisances constatées, que des modifications nécessaires soient apportées dans un délai à déterminer par eux ou immédiatement si le danger apparaît comme étant imminent. Il importe peu que les personnes à l’encontre desquelles les mesures sont décidées soient l’employeur (ou une personne assimilée) ou non.
    Le contrôle judiciaire du maintien des mesures ordonnées par les inspecteurs sociaux porte – au-delà du simple contrôle de la légalité de celles-ci – sur l’opportunité de leur maintien (article 2, § 1er, de la loi du 2 juin 2010 comportant des dispositions de droit pénal social).

  • Transmission du dossier à l’Auditorat du travail


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