Terralaboris asbl

Absence de déclaration Dimona : la cotisation de solidarité ne peut être réclamée que si l’existence d’un contrat de travail est dûment avérée

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 17 décembre 2014, R.G. 2013/AB/98

Mis en ligne le lundi 18 mai 2015


Cour du travail de Bruxelles, 17 décembre 2014, R.G. n° 2013/AB/98

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 17 décembre 2014, la Cour du travail de Bruxelles rappelle que, si une déclaration immédiate de mise à l’emploi n’a pas été faite, l’O.N.S.S. est tenu d’établir qu’il y avait contrat de travail et qu’à défaut pour les parties d’avoir envisagé une rémunération qui, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, fasse l’objet d’un accord quant à son montant ou quant aux éléments permettant de la déterminer, il n’y a pas lieu à assujettissement à la sécurité sociale des travailleurs salariés.

Les faits

Un exposant à une foire commerciale est occupé à démonter son stand avec son neveu et une connaissance (aux fins de répondre aux exigences du lieu qui a accueilli cette manifestation), lorsqu’il fait l’objet d’un contrôle de l’Inspection sociale de l’O.N.S.S. Il explique qu’il est indépendant depuis 1980 et qu’il a demandé à cette connaissance de l’aider à transporter le matériel. Il déclare qu’aucun accord n’est encore intervenu en ce qui concerne le salaire « ou quoi que ce soit ». L’intéressé confirme ces explications et ajoute qu’il réside en Hollande et ne travaille pas en Belgique, la raison de sa présence étant de conduire le matériel avec sa camionnette. Un Pro Justitia est dressé, concernant également le neveu, qui, en ce qui le concerne, est au chômage mais n’a pas biffé sa carte de contrôle qu’il avait sur lui.

L’indépendant accepte de régulariser la situation O.N.S.S., mais pour un jour seulement, déclarant qu’il travaille seul et qu’il n’engagera pas de personnel à l’avenir.

Il conteste cependant ultérieurement avoir occupé les deux intéressés en tant que personnel salarié, rappelant qu’il s’agissait de connaissances venues l’aider parce qu’il devait de toute urgence quitter les lieux et, en sus, restituer le matériel de location.

L’O.N.S.S. ayant dressé un extrait de compte, il paie le montant y repris, de même que la cotisation de vacances. L’Office demande ensuite paiement de la cotisation de solidarité. Celle-ci, fixée par la loi du 27 juin 1969 (article 22quater), est de l’ordre de 4.900 € (+ majoration et intérêts).

Une procédure est engagée devant le tribunal du travail et, dans le cadre de celle-ci, l’intéressé demande reconventionnellement le remboursement de ce qu’il a payé.

Par jugement du 5 décembre 2012, le tribunal limite la cotisation de solidarité à un montant de l’ordre de 980 € et déboute le demandeur de sa demande reconventionnelle.

L’O.N.S.S. interjette appel sur le montant de la cotisation de solidarité.

La décision de la cour

Dans un bref arrêt, contenant cependant les principes sur la question, la cour rappelle en premier lieu que l’obligation de déclaration immédiate à l’emploi (Dimona) concerne les travailleurs sous contrat de travail.

La cour renvoie à un récent arrêt de la Cour de cassation du 17 décembre 2012 (Cass., 17 décembre 2012, n° S.12.0072.F – rendu en matière d’accident du travail) pour rappeler que le juge doit constater l’existence d’un accord des parties sur le montant de la rémunération ou sur les éléments permettant de la déterminer. A défaut, il n’y a pas contrat de travail.

La cour relève qu’en l’espèce, l’intéressé a contesté très rapidement l’existence du contrat de travail et que l’O.N.S.S., qui a la charge de la preuve, ne rapporte pas la preuve d’un accord sur le montant de la rémunération convenue et/ou sur les éléments qui permettraient de la déterminer.

L’absence d’un tel accord est également confirmée par les deux « aidants », qui ont tous deux confirmé qu’ils venaient donner « un coup de main » ou rendre un service.

La cour conclut dès lors avec fermeté que l’un des éléments constitutifs du contrat de travail n’a pas fait l’objet de l’accord légal requis et que, l’assujettissement à la sécurité sociale relevant de l’ordre public, l’accord donné par le travailleur indépendant, en début de dossier, en vue de « régulariser » la situation, ne peut le priver du droit de réclamer reconventionnellement le remboursement de l’indu.

La cour fait dès lors droit à sa demande à cet égard et confirme le jugement pour le surplus.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour du travail de Bruxelles est limpide sur la question : c’est à l’O.N.S.S. d’établir que les éléments constitutifs du contrat de travail sont présents s’il entend réclamer l’assujettissement et obtenir le paiement des cotisations correspondantes, en ce compris, dans le présent cas de figure où il y a absence de Dimona, le paiement de la cotisation de solidarité fixée à l’article 22quater de la loi du 27 juin 1969.

Rappelons qu’en cas d’existence d’un contrat de travail, lorsqu’il y a défaut de Dimona, la régularisation de la situation du travailleur ne peut se faire que par l’envoi d’un envoi rectificatif de cotisations pour les prestations prouvées (et même un jour !). Cependant, la loi a fixé une sanction bien plus lourde, étant celle de l’article 22quater de la loi du 27 juin 1969. La cotisation de solidarité est calculée sur une base forfaitaire, égale au triple des cotisations de base, effectuée à partir du revenu minimum mensuel moyen garanti (C.C.T. du C.N.T. n° 43), le minimum ne pouvant être inférieur à 2.500 € et étant indexé. L’employeur est cependant autorisé à établir l’impossibilité matérielle d’effectuer des prestations de travail à temps plein, hypothèse où il pourra bénéficier d’une réduction, proportionnelle, de ladite cotisation.

Sur la question, il peut encore être utilement renvoyé à un arrêt de la Cour du travail de Mons du 10 octobre 2013 (R.G. 2012/AM/330), précédemment commenté, dans lequel il avait été souligné que le mécanisme de la Dimona contient un tronc commun pour l’ensemble des mises à l’emploi et des obligations spécifiques dans le secteur de la construction.


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